Six mois de prison avec sursis, 140.000 euros d’amende et la remise en état des lieux ont été requis lundi au tribunal d’Ajaccio contre l’entrepreneur Patrick Rocca, accusé d’avoir détruit des tortues d’Hermann et leur habitat sur un chantier à Grosseto-Pugna, en Corse-du-Sud. La Corse et le Var sont les derniers refuges de la tortue d’Hermann, unique tortue terrestre de France métropolitaine, classée vulnérable sur la liste rouge nationale des espèces menacées et protégée au niveau international, européen et français

Une interdiction de gérer pendant cinq ans avec sursis a également été requise contre le promoteur, un des premiers employeurs de Corse avec 1.400 salariés dans son groupe, dont un millier sur l’île. Celui qui compte «13 condamnations à son casier judiciaire», selon la présidente du tribunal, était poursuivi pour mutilation et destruction non autorisées d’une espèce animale protégée, en l’occurrence des tortues d’Hermann, ainsi que pour l’altération et la destruction de leur habitat, entre décembre 2019 et mars 2020, sur un chantier de construction de 162 logements, au sud du golfe d’Ajaccio. L’entreprise Fortimmo, dont M. Rocca est le gérant, est également poursuivie pour atteinte non autorisée à la conservation de l’habitat naturel d’une espèce protégée. Une amende de 300.000 euros a également été requise contre l’entreprise, ainsi que sa suspension d’activité pendant un an, la remise en état des lieux dans un délai de 12 mois et l’exclusion de l’entreprise des marchés publics pendant cinq ans.

Une absence de preuves?

Le 9 décembre 2019, «six cadavres de tortues d’Hermann et une mortellement blessée» ont été découverts sur place par des agents de l’Office français de la biodiversité (OFB). Selon ces agents, 3,5 hectares d’habitat des tortues ont été «altérés» et 2,8 hectares «détruits». Malgré la demande de l’OFB, les travaux se sont poursuivis et le 14 décembre, deux cadavres supplémentaires et une «tortue agonisante» ont été retrouvés, a détaillé la présidente.

Pour la partie civile, Me Martin Tomasi, avocat de l’association de défense de l’environnement U Levante, a plaidé «la remise en l’état» des lieux ou «à titre subsidiaire, 500.000 euros d’indemnités pour l’État» ainsi que 30.000 euros pour le préjudice moral infligé à l’association. «Je pensais avoir respecté toutes les procédures», a assuré à la barre Patrick Rocca, reconnaissant la destruction des tortues mais assurant n’avoir eu «aucune volonté de passer en force». Les deux avocats de la défense, Me Philippe Gatti et Me Jean-Marc Fevrier, ont fait valoir des nullités justifiant, selon eux, l’annulation de la procédure. Ils ont ensuite plaidé la relaxe de leur client, arguant d’une «absence de preuves».Le jugement a été mis en délibéré au 24 janvier.

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