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Ukraine : Les forces russes ont torturé des détenus à Izioum

Des survivants ont décrit des passages à tabac, des chocs électriques et des simulacres de noyade

Un couloir menant à des cellules au Poste de police central d’Izioum, en Ukraine, où les forces russes ont détenu plusieurs personnes. Photo prise le 23 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

(Kiev, le 19 octobre 2022)  – Les forces russes et d’autres personnes opérant sous leur commandement ont régulièrement torturé des détenus durant les six mois d’occupation russe d’Izioum, une ville de la région de Kharkiv dans le nord-est de l’Ukraine, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Des survivants ont décrit comment ils ont été soumis à des chocs électriques, des simulacres de noyade, des passages à tabac, des positions douloureuses pendant de longues périodes, ainsi qu’à d’autres abus infligés sous la menace d’une arme. Ils ont identifié au moins sept endroits à Izioum, dont deux écoles, où, selon eux, des soldats les ont placés en détention et maltraités.

Sept lieux à Izioum, en Ukraine, utilisés par les forces russes et affiliées en tant que centres de détention et de torture lors des six mois (de mars à début septembre 2022), durant lesquels ils ont occupé la ville. Informations basées sur les témoignages de survivant-e-s recueillis par Human Rights Watch en septembre-octobre 2022. © 2022 Human Rights Watch/OpenStreetMap

« Ces cas de violences et d’abus cruels à Izioum n’étaient pas des incidents isolés », a déclaré Belkis Wille, chercheuse senior auprès de la division Crises et conflits à Human Rights Watch. « Plusieurs victimes nous ont livré des récits crédibles d’expériences similaires de torture lors d’interrogatoires dans des installations placées sous le contrôle des forces russes et de leurs subordonnés, indiquant que ce type de traitements faisait partie d’une politique et d'un plan. »

Fin septembre et début octobre, Human Rights Watch a mené à Izioum des entretiens avec plus de 100 personnes qui s’y trouvaient pendant l’occupation russe, ayant duré de mars à début septembre 2022. Presque toutes ces personnes ont déclaré qu’au moins un membre de leur famille ou un de leurs amis avait été torturé, et quinze personnes – 14 hommes et une femme – ont décrit comment elles avaient elles-mêmes été torturées. L’un des hommes avait des liens avec les forces armées, mais tous les autres étaient des civils. Les familles et les amis de deux autres hommes, détenus et torturés eux aussi, ont déclaré que ces derniers s’étaient suicidés peu de jours après leur libération.

Les personnes détenues ont été arrêtés chez elles, dans la rue ou sur un marché en plein air et maintenues en détention pendant une période allant parfois jusqu’à 14 jours. Tous les hommes ont dit avoir reçu des décharges électriques ou avoir reçu des coups portés avec les mains, des crosses de fusil, des tubes métalliques ou en plastique, un tuyau en caoutchouc et, dans un cas, avec un bâton sur lequel était fixé un sac de sable. Un homme a été détenu cinq fois, et torturé à plusieurs reprises au cours de chacune de ces détentions.

La femme a déclaré que les soldats l’avaient giflée et frappée à l’estomac, et qu’ils avaient menacé de la violer pendant sa détention, qui a duré une journée. Le Washington Post a rapporté le cas d’une autre femme, apparemment détenue dans la même pièce à un autre moment, et qui a déclaré avoir été violée à plusieurs reprises. Un homme détenu au même moment a déclaré avoir entendu des femmes crier et avoir entendu des soldats parler de violences sexuelles infligées à au moins une détenue.

Un homme de 21 ans a déclaré que des soldats l’avaient arrêté à un marché en plein air, le 5 ou le 6 juillet, parce qu’ils avaient vu un tatouage sur son coude qui, selon lui, est courant chez certaines personnes ayant des opinions marquées à droite. Il a ajouté que ce tatouage était également populaire chez certains fans ukrainiens de football.

Un homme arrêté début avril sur son lieu de travail, à la station de pompage d’eau, a déclaré que les soldats russes l’avaient forcé à se laisser filmer alors qu’ils l’accusaient d’être un « Banderovets », terme utilisé de manière péjorative par les Russes pour désigner les Ukrainiens qui soutiennent leur gouvernement, et qui fait allusion au mouvement partisan antisoviétique du même nom, actif pendant la Seconde Guerre mondiale. Lorsque l’homme a été libéré deux jours plus tard, certains de ses amis lui ont dit qu’ils avaient vu la vidéo. Human Rights Watch a également retrouvé sur YouTube cette vidéo, dans laquelle des soldats russes accusaient cet homme d’être un « Banderovets ».

Tous les anciens détenus dont Human Rights Watch a recueilli les témoignages ont déclaré qu’on leur avait donné l’ordre de révéler les noms des habitants d’Izioum qui servaient dans la police ou au sein des Forces de défense territoriale, ou ayant participé aux opérations menées en 2014 par l’armée ukrainienne et les forces de sécurité (sous de le nom d’Anti-Terrorist Operation, ATO) dans la région du Donbass. Certains détenus ont été accusés de posséder des armes ou de la drogue, et deux d’entre eux ont dit qu’on leur avait demandé directement s’ils soutenaient la Russie. Les forces russes ont tenté de contraindre un homme qui possédait un générateur électrique à signer un document aux termes duquel il leur cédait son domicile. Un autre a déclaré que les forces russes étaient venues chez lui, avaient déposé de la marijuana sur la table de la cuisine et lui avaient demandé de signer une déclaration selon laquelle il possédait de la drogue.

Tous ces anciens détenus ont ajouté que les soldats russes leur avaient volé divers biens, notamment de l’argent, des bijoux, des appareils électroniques et des voitures.

Human Rights Watch a précédemment documenté plusieurs cas de tortures infligées par les forces russes à des habitants d’autres régions d’Ukraine lors de leur occupation de ces zones.

Les organisations et agences médicales internationales et nationales devraient d’urgence mettre en place des services dans la région de Kharkiv et dans d’autres zones libérées afin de soutenir les victimes de torture, y compris des services de soutien psychosocial et de santé mentale et des d’autres services spécialisés destinés aux survivant-e-s de violences sexuelles.

« Même sans tout savoir sur l’ampleur des crimes et d’autres abus commis contre les habitants d’Izioum pendant l’occupation russe, il est clair que les survivants ont besoin d’aide dès maintenant », a déclaré Belkis Wille. « Nos recherches indiquent que les troupes russes ont commis d’horribles abus dans de nombreuses zones qu’elles ont occupées, et suscitent une forte inquiétude quant à la possibilité que des abus similaires aient été commis dans d’autres zones qu’elles continuent de contrôler. »

Informations complémentaires sur les centres de torture à Izioum et sur les types de torture utilisés et documentés par HRW
 
Centres de torture à Izioum

Des témoins ont identifié sept endroits à Izioum que les forces russes auraient utilisés comme bases et lieux de détention : deux écoles, un poste de police, un ancien complexe hospitalier, une station d’épuration, une résidence privée et une usine. Les chercheurs ont pu visiter quatre de ces lieux, afin de vérifier les allégations de leur utilisation comme centres de détention. Les personnes dont Human Rights Watch a recueilli les témoignages sont identifiées par des pseudonymes, pour leur protection.

Deux des détenus ont dit avoir été déplacés dans différents endroits et ne pas être en mesure de dire où ils avaient été détenus. Plusieurs familles ont entendu dire que des personnes étaient également détenues à l’École n° 2 d’Izioum, mais les chercheurs n’ont identifié personne qui y aurait été détenu.

Un ancien détenu a montré à Human Rights Watch une maison privée abritant désormais les forces ukrainiennes, où il pense avoir été détenu pendant une journée par les forces russes. Il a déclaré que ses ravisseurs l’avaient menacé en disant : « Ne nous cherche pas, ou les forces spéciales de Kirov vont rappliquer ». Plus tard, ils l’ont emmené dans une autre maison, beaucoup plus loin, en lui disant qu’elle se trouvait « sur la ligne de front » et qu’il allait disparaître, avant de le ramener en ville et de le libérer. Des habitants de la région ont déclaré que les forces russes s’étaient bien servies de cette première maison pendant la période où l’homme dit avoir été détenu.

L’un des deux garages situés dans l’enceinte de la Polyclinique de la gare municipale à Izioum, en Ukraine, où les forces russes ont détenu plusieurs hommes. Photo prise le 22 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Polyclinique de la gare municipale

Le quartier de Verkhnie Selysche, sur la rive gauche de la rivière Donets, à Izioum, où se situe la gare ferroviaire, est surnommé « quartier de la gare ». Dans ce quartier se trouve un bâtiment qui a cessé de fonctionner comme hôpital environ deux ans avant l’arrivée des forces russes à Izioum. À côté du bâtiment principal se trouve un autre bâtiment avec au moins trois garages. Huit hommes, interrogés séparément, ont déclaré que les forces russes les avaient détenus, avec d’autres personnes, dans deux garages situés à proximité du bâtiment principal, que les soldats occupaient. La femme dont Human Rights Watch a recueilli le témoignage a dit qu’elle avait été détenue dans une petite pièce qui se trouvait dans un bâtiment en face des garages.

Le 22 septembre, Human Rights Watch a visité l’hôpital, qui était en grande partie intact, et a inspecté les garages. Les deux salles de ces garages correspondaient aux descriptions faites par d’anciens détenus, avec un mur en briques dans l’une, et des murs en ciment pour l’autre. Avant la visite de Human Rights Watch, la police ukrainienne avait fouillé l’enceinte de l’hôpital.

Des prises électriques noircies dans une salle de la Polyclinique de la gare municipale à Izioum, en Ukraine. Les forces russes ont utilisé le bâtiment pour y établir leur base et torturer plusieurs personnes, notamment en leur administrant des chocs électriques. Photo prise le 22 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Les huit hommes ont déclaré avoir été torturés avec des décharges électriques. Dans une pièce du bâtiment, Human Rights Watch a vu deux prises électriques noircies, sans être certain que cela soit dû aux mauvais traitements. Selon deux ingénieurs électriciens ukrainiens, les prises peuvent noircir de cette manière si elles surchauffent, par exemple lors de chocs électriques, quand les électrodes sont situées à proximité l’une de l’autre sur le corps de la victime.

Boghdan, 36 ans, a déclaré qu’il était policier, et vétéran de l’opération antiterroriste (Anti-Terrorist Operation, ATO), et qu’il avait été détenu dans un garage de la Polyclinique de la gare municipale. Boghdan était d’abord détenu avec un autre vétéran de l’ATO, Yevgeny, âgé d’environ 40 ans. Selon le témoignage de Boghdan, des soldats sont ensuite venus et ont emmené Yevgeny. Depuis que la zone est repassée sous contrôle ukrainien, Boghdan a déclaré qu’il avait essayé en vain de savoir si Yevgeny avait été libéré, et s’il était toujours en vie.

Deux hommes ont déclaré avoir entendu des cris de femmes pendant leur détention dans les garages. Taisa, 36 ans, a déclaré que les forces russes les avaient arrêtés, elle et son mari, à leur domicile à la mi-juin et les avaient emmenés à la Polyclinique de la gare municipale. Elle a dit avoir été détenue seule pendant une journée dans une petite pièce d’un bâtiment situé en face des garages, dans l’enceinte de l’hôpital. À un moment donné, un soldat s’est présenté à la porte et lui a crié qu’elle devait « se préparer, un [autre] soldat va venir te violer », mais cela ne s’est jamais produit.  Elle a dit avoir été emmenée dans une pièce du bâtiment principal où elle a été interrogée une fois.

Alla, une femme détenue pendant dix jours en juillet 2022 dans une petite pièce d’un bâtiment situé dans l’enceinte de la Polyclinique de la gare municipale à Izioum, en Ukraine, a gravé son nom sur le mur, avec les mots et fragments de phrases suivants : « électricité, déshabillée, violée », « à peine vivante », « assassinée », « très douloureux » et « au secours ». Photo prise le 7 octobre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Le journal américain Washington Post a interrogé une autre femme qui a déclaré avoir été détenue pendant dix jours au début du mois de juillet, manifestement dans la même pièce, compte tenu des similitudes entre les descriptions détaillées faites par les deux femmes. Cette femme, Alla, a déclaré qu’elle avait avoir soumise à des chocs électriques et à des viols répétés, et forcée de pratiquer des fellations. Boghdan, qui a été détenu là-bas pendant la même période, a déclaré avoir entendu des cris de femmes à de multiples reprises, et a dit avoir surpris un jour la conversation de deux soldats qui parlaient devant la porte du garage. Il s’est souvenu que l’un d’eux avait dit : « Ne lui donnez pas à manger, elle n’a pas fait de fellation ».

En inspectant la pièce, Human Rights Watch a vu le nom « Alla » – le nom de la femme interviewée par le Washington Post –  inscrit sur le mur, ainsi que les mots « électricité, déshabillée ou violée », « à peine vivante », « assassinée », « très douloureux » et « au secours ». Alla a indiqué au Washington Post qu’elle avait envisagé de se suicider lors de sa détention.

Les personnes détenues dans ces garages ont dit qu’elles n’étaient nourries qu’une seule fois par jour et qu’on leur donnait environ 1,5 litre d’eau à partager avec toutes les personnes détenues dans le garage, dont le nombre pouvait aller jusqu’à 13 personnes.

Les mots allemands « Wahreit macht frei » (« La vérité rend libre ») ont été inscrits sur le mur d’une salle de la Polyclinique de la gare municipale, à Izioum, en Ukraine. L’emblème dessiné à gauche semble représenter des grenades à manche croisées, symbole de la brigade « Dirlewanger », une brigade SS allemande de la Seconde Guerre mondiale. Photo prise le 22 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Sur le mur de l’une des pièces de l’hôpital, les chercheurs ont vu le dessin d’un emblème et les mots allemands « Wahreit macht frei » (« La vérité rend libre »). Cela semblait être une allusion au slogan « Arbeit macht frei » (« Le travail rend libre »), autrefois inscrit sur la grille d’entrée d’Auschwitz et d’autres camps de concentration nazis. Un ancien employé de l’hôpital a déclaré aux chercheurs que l’emblème et la phrase étaient apparus sur les murs après le début de l’occupation du bâtiment par les forces russes. L’emblème ressemble à des grenades à manche croisées, symbole de la brigade « Dirlewanger », une brigade SS allemande de la Seconde Guerre mondiale.

Inscription vue le 27 septembre 2022 sur une porte du Centre culturel d’Izioum, en Ukraine, utilisé par les forces russes comme l’une de leurs bases lors de leur occupation de cette ville. Sous l’étoile (symbole soviétique), on peut lire de manière abrégée : « 2ème brigade, 2ème peloton, 8ème compagnie ». Le centre culturel se trouve juste à côté de la Polyclinique de la gare municipale, où les forces russes ont détenu et torturé plusieurs personnes. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch
Les mots « Brigade 3, Peloton 2 » inscrits au-dessus d’un grand Z sur une porte du Centre culturel d’Izioum, utilisé comme base par les forces russes lors de leur occupation de cette ville. Photo prise le 27.09.22. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

L’enceinte de l’hôpital se trouve à côté du centre culturel d’Izioum, utilisé comme base par l’armée russe selon les habitants des environs. Human Rights Watch a visité le centre et a pu constater de nombreux signes d’une présence militaire russe. Sur les portes de deux bureaux du rez-de-chaussée, les enquêteurs ont vu les inscriptions « 3ème brigade, 2ème peloton » au-dessus d’une grande lettre Z (utilisée par les forces russes), et « 2ème brigade, 2ème peloton, 8ème compagnie », écrits au stylo noir.

Poste de police central d’Izioum

Le poste de police central d’Izioum est situé sur la rive droite de la rivière Donets ; selon la police, des responsables municipaux et des habitants d’Izioum, ce poste de police était utilisé comme l’une des principales bases des forces russes pendant leur occupation de la ville. Human Rights Watch a recueilli les témoignages de cinq hommes qui ont déclaré y avoir été détenus et torturés. Ils ont décrit les cellules où ils étaient enfermés – sur le côté est du bâtiment, au rez-de-chaussée ou au sous-sol. Sur huit portes de cellules, les chercheurs ont trouvé des cartes qui semblaient indiquer le nombre de personnes (entre un et quatre) qui se trouvaient dans chaque cellule.

Des masques à gaz abandonnés dans une pièce au sous-sol du Poste de police central d’Izioum, en Ukraine, où les forces russes ont détenu et torturé plusieurs personnes. Deux hommes détenus dans cette pièce ont déclaré que leurs ravisseurs leur imposaient le port d’un masque à gaz pour étouffer leurs cris quand ils subissaient des mauvais traitements. Photo prise le 23 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Les cinq hommes ont déclaré avoir été emmenés presque tous les jours au sous-sol, du côté ouest du bâtiment, où ils ont été interrogés et torturés. Deux d’entre eux ont déclaré que leurs ravisseurs leur avaient imposé de se couvrir le visage de masques à gaz lorsqu’ils criaient trop fort. Les chercheurs ont trouvé cinq masques à gaz dans une grande pièce qui servait de stand de tir, au sous-sol, sur le côté gauche du poste de police.

Taras, un maçon de 31 ans, a déclaré que le 19 ou le 20 août, deux soldats russes l’avaient arrêté à un poste de contrôle, l’avaient emmené chez lui et avaient fouillé son domicile où ils ont trouvé des douilles de balles qu’il avait récupérées, avant de l’arrêter. Taras a déclaré qu’il avait attendu dans leur véhicule pendant plusieurs heures, avant que trois soldats ne l’emmènent au poste de police.

Une cellule du Poste de police central d’Izioum, en Ukraine, où les forces russes ont détenu plusieurs personnes. Photo prise le 23 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

« Ils m’ont emmené dans l’un des bureaux à l’intérieur et m’ont battu à plusieurs reprises pendant trois heures, l’un avec une tige métallique et l’autre avec un tuyau en plastique, tout en exigeant que je leur donne les noms des habitants qui faisaient partie des Forces de défense territoriale », a déclaré Taras. « Ils ont même mis un pistolet sur ma tête et ont menacé de tirer si je ne donnais pas des noms ».

Taras a déclaré qu’il avait été détenu pendant deux semaines dans une autre pièce avec deux à quatre autres personnes, selon les moments. Il a ajouté qu’un des hommes détenus avec lui, Vitali, âgé de 21 ans, avait été détenu avec son père, détenu dans une pièce adjacente, et qu’ils l’avaient entendu crier. Taras a déclaré qu’il avait récemment été détenu avec deux autres hommes, mais qu’il ne savait pas ce qu’il leur était arrivé.

Yura, un homme de 46 ans qui travaille pour une entreprise d’énergie, a déclaré que les forces russes l’avaient détenu au poste de police central une semaine durant à la fin du mois d’août. Il a dit qu’un vétéran de l’ATO se trouvait dans la cellule du dessous et que les prisonniers se passaient des cigarettes d’un étage à l’autre par les fenêtres situées à l’arrière des cellules. Il a expliqué qu’un jour, l’homme l’avait appelé pour lui demander une cigarette, en disant que ce serait sa dernière, parce que les soldats allaient le tuer. Yura a déclaré que peu de temps après, il avait entendu une porte s’ouvrir et un coup de feu retentir, et qu’il n’avait plus jamais entendu la voix de l’homme après cela.

École n° 6

Le 23 septembre, Human Rights Watch s’est rendu à l’École n° 6, située sur la rive gauche de la rivière Donets, où deux hommes ont dit avoir été détenus et torturés. Trois personnes vivant à côté de l’école ont déclaré que les forces russes avaient occupé l’école, plus ou moins entre avril et juillet. Des agents des services d’urgence ukrainiens ont déclaré avoir retiré des mines terrestres et des munitions non explosées placées autour de l’école, qui présentait quelques signes de dommages. Les chercheurs ont vu les fragments de trois mines terrestres antipersonnel PFM-1 qui avaient explosé, ainsi qu’une quatrième mine qui ne semblait pas avoir explosé, dans une parcelle d’herbe à côté de l’école.

Le 21 avril, Ihor, un électricien de 48 ans arrêté cinq fois, a déclaré que trois soldats russes étaient venus à son appartement et l’avaient accusé de posséder de la marijuana. Après avoir fouillé son appartement, ils lui ont mis un sac sur la tête et l’ont passé à tabac pendant qu’il descendait les escaliers et qu’ils le conduisaient à leur voiture. Il a déclaré qu’ils l’avaient conduit à l’École n° 6 et qu’ils l’avaient enfermé dans un placard de rangement dans le couloir pendant environ une demi-heure. À un moment, il a dit les avoir traités de fascistes, après quoi ils ont commencé à lui donner des coups de poings et des coups de pied et à le gifler. Ils l’ont amené à un commandant qui lui a demandé d’identifier les habitants qui étaient membres des Forces de défense territoriale ou de l’ATO. Ils l’ont relâché le jour suivant.

Un autre homme, Zhenia, 19 ans, a été détenu à deux reprises, dont une fois à l’École n° 6. Il a déclaré que des soldats étaient venus le chercher chez lui le 24 août : « À l’école, l’un des soldats responsables est venu et a voulu me frapper. Je me suis couvert le visage. Il m’a dit : "Tu es quoi, boxeur ?"  Puis il a appelé trois soldats et ils se sont tous mis à me frapper. Ils m’ont d’abord enfermé dans un placard de rangement, puis dans un bureau pendant trois jours, mais ils m’emmenaient parfois dehors pour me poser des questions et ils me donnaient des coups ; ils m’ont même frappé à la tête avec leurs talkies-walkies ».

Un homme qui vit à proximité de l’École n° 6 a déclaré qu’il s’était rendu à l’école et avait parlé aux soldats à de nombreuses reprises et qu’il avait déduit de leur accent que les forces qu’il avait rencontrées étaient des forces de la LNR (« Luganskaya Narodnaya Respublika » la soi-disant « République populaire de Louhansk ») ou de la DNR (« Donetskaya Narodnaya Respublika », la soi-disant « République populaire de Donetsk »), des zones des régions de Louhansk et de Donetsk, actuellement occupées par la Russie.

École 12

Le 22 septembre, Human Rights Watch a visité l’École n° 12, également située sur la rive gauche de la rivière Donets, qui avait été considérablement endommagée. Quatre voisins et un enseignant de l’école maternelle située en face de l’école aujourd’hui fortement endommagée ont déclaré que les forces russes avaient occupé l’école du début du mois de mars jusqu’au mois de juillet.

L’École n° 12 à Izioum (Ukraine), que les forces russes ont occupée et utilisée pour détenir plusieurs personnes. Photo prise le 20 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Andrii, un fonctionnaire de 55 ans, a déclaré que le 7 avril, les forces russes étaient venues le chercher chez lui pour l’emmener à l’école pendant plusieurs heures. Il a déclaré que les soldats lui avaient bandé les yeux, ainsi qu’à d’autres personnes détenues dans la cour de l’école, et les avaient obligés à marcher sur des objets ronds :

Lorsque nous avons marché sur ces objets, ils ont crié que nous ne devions plus bouger parce que nous étions sur des grenades, et ils ont fait des bruits comme s’ils retiraient les goupilles. Ils nous ont obligé à rester comme ça pendant quatre heures, sans bouger ; nous étions pétrifiés. Finalement, un des soldats m’a dit de bouger et je lui ai dit non, parce que je ne voulais pas mourir. Il m’a dit : « Ne t’inquiète pas, j’ai remis la goupille en place ». Plus tard, en partant, j’ai aperçu la zone où nous nous trouvions dans la cour, et j’ai réalisé qu’ils nous avaient menti ; ils nous avaient fait monter sur un tas de pierres.

Il a montré aux chercheurs des photos que sa femme a prises de lui à son retour à la maison, avec des ecchymoses aux jambes, sur le flanc, à la poitrine et au coude, dues aux coups qu’il avait reçus.

Types de torture

Passages à tabac

Un policier à la retraite a déclaré que des soldats russes étaient venus chez lui en juin ou juillet et l’avaient interrogé au sujet de son fils, un policier et vétéran de l’ATO qui avait fui la région. Il a déclaré que des soldats de la LNR et un autre soldat, qui s’est identifié comme tchétchène, étaient entrés chez lui, l’avaient frappé avec la crosse de leurs fusils, l’avaient projeté au sol et avaient exigé de lui qu’il leur donne l’adresse de policiers et d’autres personnes qui stockaient des armes, en le menaçant de l’emmener « sous terre, où tu nous diras tout ».

Un autre homme, un policier en service, a déclaré qu’alors que des soldats fouillaient son appartement fin avril, l’un d’eux l’avait frappé à la mâchoire, le faisant tomber d’une volée de marches et lui cassant le bras gauche. Il a déclaré :

J’ai commencé à crier. Les voisins sont sortis et le soldat leur a dit de rentrer chez eux et que je venais de tomber. Il m’a attrapé par le col, m’a traîné dans notre appartement et m’a forcé à m’asseoir sur le canapé à côté de ma femme en me demandant : « Où sont vos armes ? »

Mykhailo Ivanovych, 67 ans, a été détenu pendant 12 jours à la fin du mois d’août 2022, à Izioum, en Ukraine. Un soldat russe lui a cassé le bras gauche en le frappant violemment avec un tuyau en plastique, selon le témoignage de Mykhailo Ivanovych. Photo prise le 23 septembre 2022.   © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Mykhailo Ivanovych, 67 ans, qui a été détenu pendant 12 jours à la fin du mois d’août, a déclaré qu’un soldat lui avait cassé le bras gauche en le frappant avec ce qui semblait être un tuyau en plastique. Fin septembre, son bras n’était toujours pas remis et il était en attente d’une intervention chirurgicale pour le remettre en place.

Ihor, l’électricien qui a été arrêté cinq fois, a déclaré que les soldats l’avaient passé à tabac, notamment avec la crosse d’un fusil, lorsqu’ils l’ont arrêté le 24 juin et emmené au garage de l’hôpital. Ils lui ont bandé les yeux avant de le conduire dans une pièce où ils ont commencé par lui baisser son pantalon pour lui frapper les fesses avec un objet dur. Ils ont ensuite exigé qu’il leur donne les noms d’habitants membres des Forces de défense territoriale, de la police ou de vétérans de l’ATO.

Mykhailo Ivanovych a déclaré qu’à une occasion, quand il avait les yeux bandés, il a eu la sensation que des soldats lui avaient enfoncé des aiguilles dans le dos. Les chercheurs n’ont pas vu de cicatrices dans son dos et selon le Directeur médical de Physicians for Human Rights, les chocs électriques donnent parfois l’impression que des aiguilles vous pénètrent sous la peau.

Les hommes interrogés ont déclaré avoir également reçu des coups de pied, des gifles et des coups de poing. Au moins deux hommes avaient des côtes cassées lorsqu’ils ont été relâchés, et l’un d’entre eux a déclaré qu’il avait également une fracture du sternum.

Positions douloureuses

Ihor a déclaré qu’à plusieurs reprises, les soldats l’avaient fait asseoir sur le sol, ses genoux repliés vers le haut. Ils lui ont ensuite attaché les mains sous les genoux et ont inséré une tige métallique juste devant sa poitrine et sous ses bras, dans une position qu’il a appelée la position du « perroquet ». Il a expliqué qu’ils ont ensuite soulevé le tuyau métallique, de sorte qu’il était suspendu.

« À un moment, je leur ai dit : "Donnez-moi une liste de noms de qui vous voulez, je la signerai " », a-t-il raconté, mais ils ne lui ont jamais rien donné à signer. Il a déclaré qu’ils avaient procédé à un deuxième interrogatoire de ce type le lendemain, avant de le relâcher. Il a précisé que les forces russes l’avaient obligé à adopter la même position à chaque fois qu’il était détenu.

« Ihor », détenu par les forces russes lors de leur occupation d’Izioum, en Ukraine, a déclaré qu’à plusieurs reprises, les soldats l’avaient fait s’asseoir par terre, les genoux pliés vers le haut. Ils lui ont lié les mains sous les genoux avant d’insérer une tige métallique juste devant sa poitrine et sous ses bras, dans une position qu’il a appelée « position du perroquet ». Ensuite, a-t-il expliqué, ils ont soulevé la tige métallique de manière à ce qu’il reste suspendu ainsi. © 2022 John Holmes pour Human Rights Watch

Boghdan, le policier, vétéran de l’ATO et membre des Forces de défense territoriale, a déclaré que les soldats l’avaient forcé à adopter la « position du perroquet » au moins une fois, mais il l’a décrite un peu différemment, en expliquant que la tige métallique était sous ses genoux et au-dessus de ses coudes. Il a déclaré qu’une fois, le tuyau métallique n’avait pas pu supporter son poids et que lorsque les soldats l’avaient soulevé, le tuyau avait plié et s’était cassé. Les deux hommes ont déclaré qu’après avoir été suspendus dans cette position, ils avaient été incapables de se servir de leurs bras pendant plusieurs heures.

Boghdan a déclaré que dans la cellule du garage, l’un des détenus était un homme qu’il avait arrêté en tant que policier. Il a dit que l’homme l’avait nourri après qu’on l’ait suspendu dans la position du perroquet parce qu’il ne pouvait pas bouger les bras. Selon Boghdan, les soldats lui ont également mis un sac en plastique sur la tête en lui coupant l’arrivée d’air à plusieurs reprises. À un certain moment, alors qu’il refusait de donner des informations aux soldats, l’un d’eux l’a menacé de le faire « s’asseoir sur une bouteille », suggérant un viol anal. Boghdan a déclaré que les forces russes ne l’avait libéré qu’après qu’il ait accepté de travailler pour eux à l’avenir, en tant qu’informateur. Une fois libéré, il s’est enfui en Russie, puis en Estonie et en Pologne, avant de revenir en Ukraine, à Kharkiv.

« Boghdan », détenu par les forces russes lors de leur occupation d’Izioum, en Ukraine, a déclaré que les soldats l’avaient au moins une fois forcé à adopter une variante de la « position du perroquet ». Une fois, selon son témoignage, le tuyau de métal n’a pas supporté son poids : quand les soldats l’ont soulevé, le tuyau a plié et s’est cassé. © 2022 John Holmes pour Human Rights Watch

Oleksandr, un agronome de 52 ans, détenu début septembre, a décrit la position qu’on l’a obligé de prendre comme étant celle de « l’araignée » : des soldats l’ont forcé à se coucher sur la poitrine et lui ont attaché les mains et les pieds, ensemble, derrière le dos. Ils lui ont ensuite placé des coussinets électriques dans les mains et lui ont administré des chocs électriques.

Oleksandr a déclaré que les soldats étaient venus le chercher dans sa maison, qui dispose de son propre générateur et d’une connexion Internet, et que pendant ses interrogatoires, notamment lorsqu’ils l’ont mis dans la position de l’araignée, ils avaient essayé de le forcer à signer un document selon lequel il cédait ses biens à l’armée russe. Pendant ses cinq jours de détention, les soldats russes l’ont également détenu dans ce qu’il pense être un hangar de stockage, en t-shirt, short et chaussures.

« Oleksandr », également détenu par les forces russes lors de leur occupation d’Izioum, en Ukraine, a décrit comment il a été soumis à la position de « l’araignée » : les soldats l’ont forcé à s’allonger sur le ventre et lui ont attaché les mains et les pieds, ensemble, derrière son dos. Ils ont ensuite placé des coussinets électriques dans les mains, et lui ont administré des chocs électriques. © 2022 John Holmes pour Human Rights Watch

Ils ont ouvert les portes et l’ont laissé là, les yeux bandés, pendant toute une journée, avec des températures qui avoisinaient ce qu’il pensait être une dizaine de degrés Celsius, en particulier la nuit. « Lorsqu’ils sont venus me chercher le lendemain, j’avais envie qu’ils me tuent, qu’ils mettent fin à tout cela », a-t-il déclaré. Il dit avoir entendu les voix d’autres personnes détenues dans le hangar de stockage.

Pendant sa détention, la femme d’Oleksandr a déclaré que les forces russes étaient venues à la maison et lui avaient affirmé qu’elles avaient tué Oleksandr et qu’elles lui apporteraient ses oreilles ou son corps tout entier pour le prouver. Elle n’a appris qu’il était vivant que lorsqu’il a été libéré. Elle pensait qu’ils avaient tenté de l’inciter à quitter leur maison pour que les soldats puissent en prendre le contrôle.

Oleksandr a montré aux chercheurs son genou, qui était toujours enflammé en raison des coups violents qu’il avait reçus.

Simulacre de noyade

Deux hommes ont déclaré avoir été soumis à des simulacres de noyade. « Oleh », un maçon de 25 ans, a déclaré que les soldats l’avaient plaqué au sol, avaient recouvert son visage d’un morceau de tissu, et lui avaient versé de l’eau sur le visage à plusieurs reprises pendant environ 30 minutes.

Andrii a déclaré que la deuxième fois que les soldats l’avaient arrêté, le 11 août, ils l’avaient emmené dans une maison et l’avaient laissé dans la cour pendant deux heures, les yeux bandés. « Ensuite, ils m’ont emmené dans une cave, m’ont pincé le nez et m’ont versé au moins deux litres d’eau dans la gorge », a-t-il raconté. « J’ai commencé à vomir et l’un d’eux m’a dit : "Si tu ne te mets pas à parler, on t’emmène voir les [soldats] de la ligne de front et là, tu parleras" ».

Andrii a montré aux chercheurs le morceau de tissu et le ruban adhésif utilisés pour lui ceindre la tête et lui couvrir ses yeux. Les mauvais traitements se sont ensuite poursuivis, avec les décharges électriques que les soldats lui ont administré aux chevilles pendant un jour supplémentaire. Pour finir, un soldat lui a annoncé : « Tu ne nous sers à rien, nous allons te tuer », et ils l’ont conduit dans une zone boisée, l’ont forcé à s’agenouiller et lui ont mis un pistolet sur la tempe. Puis un soldat lui a dit que s’il racontait à qui que ce soit ce qui lui était arrivé, les soldats reviendraient et tueraient sa famille. Puis ils l’ont laissé partir.

Chocs électriques

L’un des deux garages situés dans l’enceinte de la Polyclinique de la gare municipale à Izioum, en Ukraine, où les forces russes ont détenu plusieurs hommes. Photo prise le 22 septembre 2022. © 2022 Belkis Wille/Human Rights Watch

Les 14 hommes interrogés ont dit avoir reçu des chocs électriques, parfois à plusieurs reprises, principalement aux chevilles, mais certains ont dit avoir aussi reçu des chocs aux oreilles, aux orteils, aux mains, au bout des doigts et aux organes génitaux. Oleh a déclaré que les soldats lui avaient administré des décharges électriques aux oreilles et que trois hommes détenus avec lui dans le même garage lui avaient dit avoir reçu des décharges électriques aux parties génitales.

Ihor a déclaré qu’au cours de plusieurs des interrogatoires qu’on lui avait fait subir, des soldats lui avaient enroulé des fils électriques autour des chevilles et lui avaient administré des décharges en continu pendant 30 minutes ou plus.

« Ils m’ont électrocuté aux chevilles pendant si longtemps et avec une telle puissance que j’avais l’impression que j’allais avoir une crise cardiaque », a déclaré Oleksandr. « Ils arrêtaient toujours les chocs au dernier moment, quand le cœur était sur le point de s’arrêter. Après quoi, ils me passaient à tabac, mais à cause des chocs, je ne sentais même plus les coups ; je ne sentais plus rien. »

Pillage

Ihor et Zhenia ont déclaré que le 17 avril, vers 10 heures du matin, ils avaient conduit une voisine, dont la maison avait été endommagée par une attaque et qui avait emmené quelques effets personnels, vers la maison d’un ami. Ils ont expliqué qu’ils sont arrivés à un poste de contrôle mis en place par les forces russes devant une église dans la partie centrale de la rive gauche du fleuve. Des membres des forces de la LNR ou de la DNR, qu’ils ont reconnues en raison de leurs accents, ont alors arrêté la voiture et ont contrôlé leurs documents d’identité. Ils les ont ensuite accusés d’avoir volé des effets personnels, alors que leur propriétaire était elle-même dans la voiture.

Les soldats ont arrêté Ihor et Zhenia et les ont emmenés dans un garage, où ils les ont détenus pendant trois jours. Ihor a déclaré que durant cette période, un soldat l’avait frappé à la poitrine avec la crosse d’un fusil. Il a ajouté qu’ils n’avaient pas arrêté leur voisine, mais avaient pris possession de la voiture avec ses affaires. Ihor a déclaré que lors de leur détention dans le garage, ils étaient à peine nourris et ne recevaient qu’environ 1,5 litre d’eau par jour, à partager avec les huit autres personnes détenues avec eux. Il a ajouté que les soldats l’avaient passé à tabac une fois, après l’avoir fouillé et avoir trouvé un tournevis dans sa poche.

D’autres personnes ont déclaré que les soldats russes étaient entrés dans leurs maisons et avaient pris tous leurs appareils électroniques, tablettes, iPhones, télévisions, ainsi que des bijoux de famille, notamment des colliers et des bagues en or et en argent. Ils ont déclaré que les soldats avaient également pris l’argent qu’ils avaient trouvé chez eux ou qu’ils avaient sur eux pendant leur détention ; dans certains cas, ils ont aussi volé leurs voitures.

Suicides

Human Rights Watch a mené des entretiens avec des proches et amis de deux hommes, Mykola Papirnyi, 55 ans, et Alexander Glushchenko, 43 ans, qui ont tous deux été détenus – Papirnyi pendant environ deux jours à la fin du mois de juin, et Glushchenko pendant un jour ou deux en juin et à nouveau pendant trois jours en juillet. Les deux hommes ont mis fin à leurs jours par pendaison un jour ou deux après leur libération.

Un homme qui avait été détenu avec Glushchenko dans l’un des garages de la Polyclinique de la gare municipale a déclaré que Glushchenko et lui-même avaient été torturés pendant leur détention et que Glushchenko avait ce que ses codétenus pensaient être plusieurs côtes cassées quand Glushchenko avait quitté le garage. L’une des amies de Papirnyi a déclaré que ce dernier avait tenté de se suicider en mai, après que les forces russes eurent confisqué sa remorque. Le jour de sa mort, cette amie l’a retrouvé pendu dans son jardin, vêtu de son meilleur costume et de ses chaussures, avec une échelle à proximité, a-t-elle dit.

Obligations légales

Toutes les parties au conflit armé en Ukraine sont tenues de respecter le droit international humanitaire, ou les lois de la guerre, notamment les Conventions de Genève de 1949, le premier Protocole additionnel aux Conventions de Genève et le droit international coutumier. Les forces armées belligérantes qui ont le contrôle effectif d’une zone sont soumises au droit international de l’occupation.

Le droit international relatif aux droits humains, notamment l’interdiction absolue de la torture, s’applique également à ce conflit. La Russie et l’Ukraine sont toutes deux des États parties à la Convention contre la torture et ont l’obligation, en vertu du traité, non seulement d’empêcher la torture, mais aussi d’enquêter et de punir les personnes soupçonnées d’y avoir eu recours.

Le droit de la guerre interdit l’homicide volontaire, le viol et autres violences sexuelles, la torture et le traitement inhumain des combattants capturés et des civils en détention. Toute personne qui ordonne ou commet délibérément de tels actes, ou qui les aide et les encourage, est responsable de crimes de guerre. Les commandants de forces qui avaient connaissance ou avaient des raisons d’avoir connaissance de tels crimes, mais qui n’ont pas tenté de les arrêter ou de punir les responsables sont pénalement responsables de crimes de guerre au titre de la responsabilité du commandement.

La Russie et l’Ukraine ont l’obligation, en vertu des Conventions de Genève, d’enquêter sur les crimes de guerre présumés commis par leurs forces ou sur leur territoire et de poursuivre les responsables de manière appropriée. Les victimes d’exactions et leurs familles doivent recevoir une réparation rapide et adéquate.

L’Ukraine a souscrit à la Déclaration sur la sécurité des écoles, un engagement politique à prendre des mesures concrètes pour rendre les élèves, les enseignants et les écoles plus sûrs pendant les conflits armés, notamment en acceptant de ne pas utiliser les écoles à des fins militaires ; à ce jour, la Russie n’a pas adhéré à cette Déclaration.

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