La mère de Kaja Kallas n’avait que six mois quand des militaires soviétiques l’ont embarquée dans un wagon à bestiaux pour la déporter en Sibérie dans un camp de prisonniers. Elle ne revit son pays, l’Estonie, qu’à l’âge de 10 ans.

Aujourd’hui, sa fille est Première ministre d’Estonie. Et nul ne s’oppose plus fermement que Kaja Kallas à toute forme d’apaisement vis-à-vis de Vladimir Poutine, qu’elle qualifie de terroriste dont les crimes de guerre doivent être jugés devant les tribunaux internationaux. L’Estonie a été le premier pays à féliciter l’Ukraine pour la destruction d’un pont crucial reliant la Russie à la région annexée de Crimée, le 8 octobre, alors même que Kiev n’avait pas revendiqué cette frappe.

“L’Ukraine doit gagner cette guerre”, a déclaré Kaja Kallas au Telegraph, à Prague, lors d’un sommet européen où elle a réitéré qu’il fallait imposer de nouvelles sanctions à Moscou et envoyer plus d’armes à Kiev. Aucun pays n’a envoyé à l’Ukraine autant d’équipement militaire que l’Estonie, en pourcentage du PIB par habitant.

Cette petite nation balte de 1,3 million d’habitants partage une frontière avec la Russie et n’est passée de l’autre côté du rideau de fer qu’en 1991, date de son indépendance. L’Estonie est aussi l’un des rares pays à avoir envoyé des armes à Kiev avant l’invasion de Poutine le 24 février.

Entre l’est et l’ouest de l’Europe, deux visions des choses

Ce n’est pas pour rien que la première femme à être devenue chef du gouvernement en Estonie, en 2021, qui dit admirer l’intraitable Margaret Thatcher, a été surnommée la nouvelle Dame de fer européenne. Elle a averti les Russes fuyant la mobilisation que l’Estonie rejetterait leurs demandes d’asile et elle leur a conseillé de rester au pays pour renverser le président. Elle veut que l’Union européenne (UE) interdise d’entrée les touristes russes et que l’Ukraine adhère à l’Otan. Elle multiplie les investissements militaires en Estonie et l’envoi d’armes à Kiev.

Lors du premier sommet de la Communauté politique européenne, à Prague, le 6 octobre, Kaja Kallas, 45 ans, à la tête d’une famille de trois enfants, s’est démarquée dans une robe bleue aux côtés de 43 grands pontes européens, des hommes en majorité. “La Russie nous terrorise pour que nous revenions sur nos décisions”, a-t-elle déclaré au sujet de la menace d’une guerre nucléaire que brandit Poutine.

En ce qui concerne Poutine, c’est évidemment un criminel de guerre et il doit être jugé pour les crimes d’agression dont il est coupable”, a-t-elle affirmé dans les magnifiques jardins du château de Prague lors d’une pause entre deux sé