“Ils m’ont emmenée dans la chambre de torture, m’ont mis un masque à gaz et plaquée contre le mur.” Détenue avec son époux dans un petit entrepôt attenant à une clinique, Alla revient sur les lieux pour le Washington Post et raconte les sévices qui lui ont été infligés en mars. Dix jours durant, le couple a été séquestré par les soldats russes. “Ils ont été pris pour cibles car leur fils est dans les forces ukrainiennes et parce qu’Alla travaille pour la compagnie de gaz locale”, rapporte le quotidien américain.

Peu de temps après avoir été faite prisonnière, l’Ukrainienne de 52 ans a gravé son prénom sur un mur, et quelques mots pour décrire ce qu’elle subissait pendant sa captivité : “décharges électriques”, “déshabillée”, “souffrance”. Elle espérait, explique le journal de Washington, que “ces inscriptions donneraient un jour des indices à son fils sur ce qu’elle pensait être les derniers jours de sa vie”.

“J’ai décidé de me pendre”

Alla a finalement survécu. Mais dans la vidéo publiée par le Washington Post, elle raconte la torture et les viols qu’elle dit avoir endurés.

“Le chef m’a déshabillée, puis il a demandé à ses gars qui serait le premier à me violer. […] Je me suis dit qu’ils faisaient semblant, qu’ils voulaient juste me faire peur.”

Après les viols et la torture, Alla a tenté de mettre fin à ses jours : “Ils ont fini par me rendre folle, alors j’ai décidé de me pendre. J’avais un soutien-gorge, mais quand je l’attachais il n’y avait pas assez d’espace, ça ne marchait pas.”

Accusations de crimes de guerre

Le témoignage de cette femme “s’ajoute à un nombre croissant d’éléments corroborant les accusations de crimes de guerre envers les soldats et officiers russes dans les régions ukrainiennes qu’ils ont occupées”, souligne le Washington Post. Les journalistes américains précisent avoir visité à deux reprises le lieu où cette femme dit avoir été séquestrée, “une fois seuls, et une fois avec Alla et son mari”. Ils ont pu constater que son récit coïncidait avec les détails observés sur place.

En outre, l’ONG Human Rights Watch a enquêté sur les accusations de crimes de guerre à Izioum, recueillant les témoignages de huit hommes et une autre femme détenus dans l’entrepôt attenant à la clinique pendant l’occupation russe. L’un des hommes était prisonnier “à la même période qu’Alla”, et il a témoigné avoir “entendu des femmes crier, et des soldats dire qu’ils privaient de nourriture l’une d’entre elles parce qu’elle avait refusé un acte sexuel”. Le Washington Post a également pu visionner une vidéo montrant Alla rentrer à son domicile après sa libération, sur laquelle elle apparaît “amaigrie et échevelée”.

L’horreur découverte pas à pas

Alors que de nombreuses villes ukrainiennes ont été libérées après plusieurs mois d’occupation, “les témoignages de ce type se multiplient : les autorités ukrainiennes et les organisations de défense des droits humains tentent de documenter ces actes inhumains, dans l’espoir de traduire un jour leurs auteurs en justice”.

C’est le cas notamment à Izioum, la ville de la région de Kharkiv où vivent Alla et son mari, qui a été libérée en septembre après qu’une contre-offensive ukrainienne a contraint les forces russes à battre en retraite ; mais aussi à Boutcha, où des charniers ont été découverts et où les médias internationaux se sont fait l’écho des témoignages de civils violentés.