Aux États-Unis, avec le projet Freedom, des familles veulent créer une ville pour les Afro-Américains

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Aux États-Unis, avec le projet Freedom, des familles veulent créer une ville pour les Afro-Américains

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Le projet Freedom, né après la mort de George Floyd, veut lutter contre le racisme systémique [capture d'écran du site du projet]
Le projet Freedom, né après la mort de George Floyd, veut lutter contre le racisme systémique [capture d'écran du site du projet]
© Radio France

Le projet Freedom est né dans l'État de Géorgie, dans le sud des États-Unis, ancien État ségrégationniste. Son objectif : créer une ville imaginée par des Afro-Américains, où les habitants seront noirs ou militants de l'égalité raciale. Il est né après la mort de George Floyd.

La mort de George Floyd, homme noir de 42 ans étouffé par un policier blanc lors d'une arrestation à Minneapolis (Minnesota) en 2020, a précipité le projet Freedom en Géorgie, État du sud anciennement ségrégationniste et État du pasteur Martin Luther King. "Créer un refuge pour les familles noires traumatisées était devenu une urgence extrême. Voilà comment The Freedom Georgia Initiative a été créée", résume le profil du compte Twitter du projet Freedom.

C'est Ashley Scott, agent immobilier, qui a eu l'idée du projet Freedom, avec son amie Renee Walters. "Une de mes amies de l'église, Renee Walters, m'a appelée un jour en me disant "tu as vu qu'une ville entière est à vendre ?" Et on est parties de là ! On est allées visiter la commune de Toomsboro, on a rencontré le chef de la police, le maire et on s'est dit que ce serait une superbe communauté pour nous !" Ashley est vite conquise par l'espace, la verdure, les fleurs.

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Alors en 2020, 19 familles s'associent et acquièrent plus de 200 hectares de terrain dans cette commune rurale de Toomsboro, au cœur de la Géorgie. "Pour l'instant, c'est une ville mixte, environ à 65% noire. Elle devient de plus en plus mixte car les gens se sont mariés et ont eu des enfants." Le projet grandit. À ce jour, 25 familles ont investi dans le projet. "Nous sommes tous des familles de classe moyenne, certains sont des anciens combattants, nous avons tous de bonnes situations professionnelles, nous avons tous fait des études."

Peinture murale en hommage à George Floyd dans les rues d'Atlanta en Géorgie (États-Unis)
Peinture murale en hommage à George Floyd dans les rues d'Atlanta en Géorgie (États-Unis)
© Radio France - Valérie Cantié

A terme, le projet prévoit 225 habitations, 13 fermes, 16 hectares de terres agricoles pour l'élevage, un potager, des arbres fruitiers, des installations solaires produisant 40 megawatts d'électricité. D'ici cinq ans, 2300 personnes y habiteront, et 4000 lorsque tout sera installé.

Pas un ghetto mais une communauté "pour les pro-Noirs"

Mais le risque n'est-il pas de créer un ghetto, une communauté à l'écart du reste de la société ? Ashley balaye cette accusation d'un revers de main : "À chaque fois que des personnes noires veulent s'associer, on les accuse de vouloir créer un ghetto !" Mais plutôt que de vouloir créer une ville noire pour les Noirs, Ashley affirme vouloir créer une communauté "pour les pro-Noirs. Tout le monde est le bienvenu mais nous créons cette communauté pour répondre aux problèmes et aux disparités qui affectent spécifiquement les Noirs."

Et Ashley fait des rappels historiques. "Depuis la fondation des États-Unis, les Afro-Américains sont criminalisés de manière disproportionnée, ils sont traités comme si leur vie n'avait pas d'importance. Et donc c'est un mouvement pour
répondre aux besoins de la communauté noire, nous voulons montrer que notre vie a de l'importance, et créer une communauté adaptée à notre mode de vie, où nous sommes traités de manière juste", explique-t-elle. "Nous voulons prendre le contrôle, avoir le pouvoir économique et politique."

Ashley Scott a créé le projet Freedom, une ville pour les Afro-Américains en Géorgie (États-Unis)
Ashley Scott a créé le projet Freedom, une ville pour les Afro-Américains en Géorgie (États-Unis)
© Radio France - Valérie Cantié

Prendre le contrôle pour lutter contre le "racisme systémique"

Ashley rappelle que les entrepreneurs noirs ne sont pas à égalité avec les entrepreneurs blancs aux États-Unis. Les fermiers noirs obtiennent difficilement des prêts lorsqu'ils ont besoin d'argent pour sauver leur ferme. Et les Noirs ne contrôlent jamais les entreprises intermédiaires dans l'industrie agricole, comme par exemple les abattoirs ou les supermarchés. Cela crée un racisme systémique, selon elle.

"Le capitalisme en général empêche les Noirs de gagner l'argent nécessaire pour leur donner le pouvoir politique et l'influence dont ils ont besoin pour vivre correctement", estime-t-elle. Elle estime que les fermiers noirs sont des personnes clés face à ce système. "Nous voulons devenir un modèle en créant notre propre système de distribution, notre propre marché, pour produire de la nourriture pour les familles qui en ont besoin." Ashley Scott affirme que ce projet permettra aux familles de mieux manger, et donc de lutter contre des maladies chroniques comme le diabète et les maladies du cœur.

"Les Afro-Américains n'ont pas accès à de la nourriture bio, bonne pour la santé. Les grands groupes comme Monsanto ou Perdue ajoutent de nombreux additifs et conservateurs dans leurs produits, et les Noirs achètent cette nourriture. En prenant le contrôle, notre communauté sera en meilleure santé !" conclut-elle.

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