L'administration britannique a accumulé plus de 100 000 dossiers de demande d'asile de retard (image d'illustration). Crédit : Pixabay, DR (Archive)
L'administration britannique a accumulé plus de 100 000 dossiers de demande d'asile de retard (image d'illustration). Crédit : Pixabay, DR (Archive)

Grâce aux informations d'un lanceur d'alerte, le Guardian a révélé l'ampleur de la désorganisation des services de l'asile au Royaume-Uni. Avec plus de 110 000 dossiers en retard, l'administration embauche des officiers de protection à tour de bras mais ne les forme pas correctement. Un scandale alors que ces personnes sont amenées à prendre des décisions déterminantes pour l'avenir des demandeurs d'asile.

Dans un article publié samedi 5 novembre, le quotidien britannique The Guardian révèle que des employés de McDonald's et des supermarchés Tesco et Aldi ont été embauchés comme agents de protection pour mener des entretiens de demande d'asile.

L'information a pu être révélée grâce au témoignage d'un lanceur d'alerte. La personne, "qui a près de vingt ans d'expérience en matière de droit d'asile", a été chargée de former ces nouveaux employés venus de l'univers de la vente alimentaire.

"Ils [les services de l'asile, ndlr] accueillent beaucoup trop de personnes inexpérimentées, qui ne comprennent rien au système d'asile, et elles n'ont tout simplement pas le soutien dont elles ont besoin, alors elles partent", a déclaré cette personne, décrivant des employés tellement novices et désemparés qu'ils se tournent parfois vers les guides touristiques Lonely Planet pour tenter d'avoir des informations sur les pays d'origines des demandeurs d'asile.

Formation expéditive

Les employés en question travaillaient précédemment à des postes tels que le service aux clients ou la vente. Embauchés par le biais d'annonces en ligne et d'agences de recrutement, ils n'ont bénéficié que d'une courte formation avant de débuter leur activité alors qu'ils n'avaient quasiment aucune connaissance dans le système d'asile.

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Selon le Guardian, les personnes sont généralement "placées sur des contrats temporaires, généralement de trois mois, sans cesse renouvelés". Certains de ces nouveaux officiers de protection ont décrit au Guardian avoir été livrés à eux-mêmes après seulement deux jours et alors qu'on leur avait promis une formation solide.

"La formation consiste littéralement à aller s'asseoir avec un autre membre du personnel et à le regarder faire, puis il vous donne l'occasion de travailler sur un cas pratique pendant qu'il vous observe. Une fois que vous l'avez fait devant eux quelques fois, vous êtes pratiquement livré à vous-même", a décrit l'un d'eux au Guardian.

Nombres dossiers acceptés en appel

Selon plusieurs personnes interrogées par le quotidien, la qualité des entretiens de demande d'asile aurait commencé à décliner en 2012 lorsque les officiers de protection ont été rétrogradés "d'officiers supérieurs à officiers exécutifs". Pourtant, il s'agit d'une étape fondamentale dans le parcours de demande de protection.

"Vous ne pouvez pas simplement rejeter une demande sans preuve. Si vous n'avez pas posé les questions, vous n'avez aucune base pour dire 'non'. Le nombre de cas qui sont annulés par les tribunaux en dit long sur la qualité des entretiens", déplore le lanceur d'alerte interrogé par le Guardian. Or, selon les chiffres officiels du Home office, plus de la moitié des dossiers refusés obtiennent une protection en appel.

Le Royaume-Uni, et plus particulièrement le Home office, est actuellement dans la tourmente pour plusieurs dossiers liés à la prise en charge des demandeurs d'asile dans le pays. Sur les 28 526 personnes arrivées par "small boats" au Royaume-Uni l'année dernière, seuls 4% ont déjà vu leur dossier de demande de protection traité. Le centre d'enregistrement des demandes d'asile de Manston, dans le Kent, s'en retrouve surchargé. Prévu pour accueillir 1 600 personnes, il en a hébergé jusqu'à 4 000 fin octobre, dans des conditions déplorables.

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Le Home office a également été mis en cause récemment dans une affaire d'agressions sexuelles sur un enfant et un adolescent. Les agressions ont eu lieu dans un hôtel de Londres utilisés comme centre d'hébergement pour migrants et dans lequel des mineurs côtoient des adultes.

 

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