« info 20 Minutes »« 81 % des Français les moins aisés prêts à faire plus pour l’écologie »

« 76 % des Français les moins aisés ne se sentent pas assez soutenus dans la transition écologique »

« info 20 Minutes »« 20 Minutes » dévoile, avec l’analyse de Jérôme Fourquet, les résultats d’un sondage Ifop pour Le Groupe Casino et l’Université de la Terre sur les Français des classes les moins aisées et l’écologie
Strasbourg, le 9 octobre 2015 - Centre de tri Altem (Alsacienne de tri d'emballages ménagers)
Strasbourg, le 9 octobre 2015 - Centre de tri Altem (Alsacienne de tri d'emballages ménagers) - F. Hernandez / 20 Minutes / F. Hernandez / 20 Minutes
Jean-Loup Delmas

Propos recueillis par Jean-Loup Delmas

L'essentiel

  • L’écologie et le réchauffement climatique sont des sujets concernants pour l’ensemble des Français.
  • Un sondage de l’Ifop pour Le Groupe Casino et l’Université de la Terre, auquel nous avons eu accès en exclusivité, montre que les catégories populaires se sentent très impliqués sur la question. La majorité d’entre eux estiment même en faire plus que la moyenne.
  • 20 Minutes a interrogé Jérôme Fourquet, directeur de département à l’Ifop, sur les enseignements à tirer de cette étude.

L’écologie, uniquement une préoccupation de bobos mangeurs de bio et roulant en Vélib' ? Rien n’est moins sûr. Une étude Ifop *, réalisée pour Le Groupe Casino et l’Université de la Terre, se penche ce lundi sur les liens existants entre les Français des classes les moins aisées (gagnant moins de 2.000 euros net par mois) et la transition écologique. 20 Minutes a pu interroger en exclusivité sur ce sujet Jérôme Fourquet, directeur du département « opinion et stratégies d’entreprise » à l’Ifop.

L’écologie est parfois caricaturée en une préoccupation uniquement liée aux classes aisées, à l’inverse des Français moins bien lotis qui se soucieraient davantage de leur pouvoir d’achat. Or, votre étude montre le contraire…

La prise de conscience écologique n’est pas cantonnée aux catégories les plus aisées. Il s’agit d’une prise de conscience très transversale qui touche toutes les catégories sociales. Pour les classes populaires ou moyennes inférieures, que nous avons regroupées dans cette étude derrière « La France à moins de 2.000 euros net », l’écologie est également un sujet préoccupation et de sensibilité, mais aussi une source d’implication concrète, actuelle et future. 86 % d’entre eux sont inquiets du réchauffement climatique, et 81 % se disent prêts à faire plus d’efforts à l’avenir pour lutter contre.

Vous parlez d’implication concrète. Comment se manifeste-t-elle ?

On voit se dessiner des choses assez classiques, en matière de tri et de recyclage, de seconde main ou de déplacements. D’une manière générale, ce qui fonctionne le mieux, ce sont des comportements qui peuvent présenter un bénéfice personnel en plus de l’action écologique. Cela peut être un bénéfice pour la santé, par exemple en mangeant moins de viande rouge (64 % des sondés le font ou sont prêts à le faire), ou un bénéfice économique, comme peut l’être la limitation de la consommation énergétique (86 % des sondés) - ou la seconde main (74 %).

Les pistes plus coercitives et punitives, comme la limitation ou l’interdiction, sont beaucoup moins appréciées. Par exemple, 67 % des sondés sont contre l’interdiction de vente des véhicules diesel et essence neufs, et 57 % contre la réduction de la vitesse sur les autoroutes. Il vaut mieux un accompagnement d’un public déjà sensibilisé à ces questions que des restrictions.

Les politiques publiques n’ont pas à rendre le sujet écologique concernant, il l’est déjà. Ce qu’il faut, c’est le rendre accessible. Dans le langage marketing, cela s’appelle le nudge, c’est-à-dire le petit coup d’épaule qui aide à adopter les bons gestes. Les gens ont de la bonne volonté, il faut désormais les inciter au passage à l’acte.



On a beaucoup parlé cet été, notamment avec les jets privés, du devoir d’exemplarité pour les plus fortunés avant de demander des efforts aux plus précaires. Cela figure-t-il dans votre sondage ?

Selon notre étude, la majorité des Français gagnant moins de 2.000 euros par mois considèrent qu’ils en font plus que la moyenne. Donc on peut effectivement penser qu’ils estiment que les plus aisés n’en font pas assez. De la même manière qu’il faut accompagner et aider, il faut aussi montrer que tout le monde participe, sinon cela donne un bon prétexte au fait de ne rien faire. Personne n’a envie d’être le seul à réaliser des efforts.

Et justement, ce que montre l’étude, c’est que les moins aisés n’attendent pas les autres pour agir…

Oui, ils font déjà des choses, c’est important de le souligner. Et ils sont prêts à faire davantage. La principale contrainte est économique, encore plus pour ces catégories et dans ce contexte d’inflation et de crise du pouvoir d’achat.

Mais assez rapidement derrière vient la question de l’exemplarité et de la praticité. Il faut bien comprendre qu’au-delà de la question de l’argent, ce qui manque particulièrement à ces catégories de population, c’est le temps. Il faut donc amener l’écologie vers le consommateur et la rendre la moins contraignante possible. On l’a vu par exemple avec les poubelles de recyclage de verre. Il y en a désormais quasiment partout, ce qui incite les gens à le faire, car c’est facile. On peut imaginer la même chose pour le recyclage de meubles, le covoiturage, les locations de vélo… Ce qu’il faut, ce sont des pouvoirs publics plus impliqués. 76 % de nos sondés estiment que les services publics ne font pas assez pour les accompagner dans la transition écologique.

* Enquête Ifop pour Le Groupe Casino et l’Université de la Terre, menée en ligne du 12 au 18 octobre 2022 auprès d’un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, et gagnant moins de 2.000 euros net par mois.

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