Comment a-t-on pu oublier Alice Sollier ?

Alice Sollier, Carnets d'histoire de la médecine - - BIU Santé
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Femme et noire dans les années 1890, Alice Sollier, une pionnière de la médecine en France.

Dans le répertoire photo-biographique du corps médical français, publié en 1898, les notices individuelles des praticiens sont accompagnées, le plus souvent, d'une photographie. Mais dans le cas d'Alice Sollier le cadre réservé à sa photo est resté vide.

Deux facteurs peuvent expliquer cette invisibilité : non seulement Alice Sollier était une femme, à une époque où l'exercice de la médecine était monopolisé par les hommes, mais Alice Sollier était aussi d'origine africaine par son père. L'entrée dans la corporation d'une femme métisse - on disait mulâtre - dans ce temps-là, suscita un tel étonnement dans l'opinion que la presse s'en fit l'écho en 1887. "La femme-médecin n’est déjà plus un objet de curiosité. Ce qui est plus rare, c’est la doctoresse nègre. Une de ces dernières, Mme Sollier, vient de passer avec succès sa thèse pour la médecine."

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Alice Sollier, née Maille (1861-1942)

Née le 3 avril 1861 à Compiègne, sous le nom d’Alice Maille, Alice Sollier est morte à Paris le 29 janvier 1942, Son père était un esclave guyanais affranchi en 1834 à la demande de sa propriétaire, qui émigra en métropole pour exercer l’art dentaire. A l'époque, il n'était pas nécessaire d’être médecin, ou officier de santé, pour soigner les dents. Il suffisait de payer une patente. Mais comme la loi du 30 novembre 1892, qui réglementa la profession, était en préparation, Alice - qui envisageait de reprendre le cabinet de son père – s’inscrivit à la Faculté de médecine de Paris, après avoir obtenu son bac. C'est là qu'elle fit la connaissance de son futur mari, Paul Sollier, et de son amie Blanche Edwards, qui joua un rôle majeur dans le combat ayant permis aux femmes d'exercer la médecine au début des années 1880. Reçue au concours de l'externat, Alice passa sa thèse avec succès, puis s’inscrivit en même temps que Blanche Edwards au concours de l'internat. Mais finalement, elle ne s'est pas présentée aux épreuves. Bien que l'on ne connaisse pas exactement les raisons de cet abandon, il se peut qu'elle ait été découragée par les manifestations organisées le jour du concours par de nombreux étudiants contre la présence des femmes. Alice fut peut-être découragée par ces discriminations sexistes, mais aussi par la stigmatisation de sa couleur de peau. Les témoignages de l'époque parlent en effet de "la petite créole que tous les étudiants appellent Bamboula". (...)

Bibliographie :

Pierrette Caire Dieu, Le docteur Alice Mathieu-Dubois épouse Sollier (1861-1942). Un destin d’exception, Carnets d’histoire de la médecine, 2020, n°4.

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Le Cours de l'histoire
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