Par SudOuest.fr avec AFP
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De l’Allemagne au Niger, en passant par les États-Unis, on constate une désaffection du métier, amplifiée depuis la crise du Covid

La crise de recrutement des professeurs, de la maternelle au lycée, n’est pas uniquement une problématique française. De l’Allemagne au Niger, en passant par les États-Unis, on constate une désaffection du métier, amplifiée depuis la crise du Covid. Il manque 69 millions d’enseignants à travers le monde pour atteindre une « éducation de base universelle d’ici 2030 », selon un document de l’Unesco publié début octobre.

Pour Eric Charbonnier, expert éducation à l’OCDE, « on peut imaginer que la crise du Covid a donné de la visibilité au métier d’enseignant et de ce fait, le sujet de l’attractivité du métier, qui existait déjà, a pris de l’importance ». « On a 4.000 postes d’enseignants vacants cette année en France, un chiffre en hausse mais ce n’est pas mieux ailleurs », ajoute-t-il.

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Allemagne, Portugal…

En France, ces difficultés de recrutement inédites ont conduit le ministère de l’Éducation à prolonger en novembre de deux semaines le délai d’inscription aux concours pour la rentrée 2023, jusqu’à ce vendredi, faute de candidats. Dans un rapport sénatorial présenté en juin, Gérard Longuet avait évoqué au niveau européen « l’attractivité du métier d’enseignant » comme « problème général pour les pays, quel que soit le niveau salarial ».

Selon des estimations nationales, il va manquer par exemple 25 000 enseignants d’ici 2025 en Allemagne, 30 000 au Portugal d’ici 2030. L’Allemagne, le Portugal, la Suède ou encore l’Italie font par ailleurs face à des « départs massifs à la retraite, ce qui va accroître le problème », renchérit Eric Charbonnier. Dans le détail, au niveau de l’école élémentaire, 60 % des enseignants ont plus de 50 ans en Italie, 37 % en Allemagne, 42 % au Portugal, 36 % en Suède et 23 % en France, selon l’OCDE.

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« Déficit de considération »

Différentes causes peuvent être pointées, selon Régis Malet, professeur en sciences de l’éducation à l’université de Bordeaux : « le niveau peu élevé des salaires, en France particulièrement, mais aussi la dégradation des conditions de travail, des statuts, et une dimension plus symbolique fortement ressentie, qui est celle du déficit de considération, de reconnaissance ». Dans de nombreux pays, et notamment en France, on est passé selon lui, « d’un métier à forte valeur sociale ajoutée, un prestige, à une forme d’incertitude des missions demandées, de perte de sens et finalement de dissonance entre l’école et la vie », regrette ce membre de l’Institut universitaire de France.

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La pénurie concerne aussi les autres continents. En Afrique subsaharienne, « il y a en moyenne un enseignant qualifié pour 56 élèves en primaire, et un enseignant qualifié pour 55 élèves dans le secondaire », dit Borhene Chakroun, directeur de la division des politiques et des systèmes d’apprentissage à l’Unesco. D’ici 2030, « le Tchad et le Niger vont devoir plus que doubler leur effectif d’enseignants dans le primaire », souligne-t-il. Aux États-Unis, on assiste à une crise « sans précédent », selon Eric Charbonnier.