Fausses nouvelles

Parmi les groupes de professionnels de la santé qui, dans différents pays, ont défendu des idées controversées pendant la pandémie, America’s Frontline Doctors (AFLDS) a été l’un des plus visibles. Il semble toutefois être en train d’imploser, les administrateurs ayant déclenché une poursuite en justice contre leur fondatrice pour détournement de fonds.

Apparu en juillet 2020 par une conférence de presse en sarrau blanc sur les marches de l’édifice de la Cour suprême, à Washington, AFLDS a défendu des traitements contre la COVID aujourd’hui discrédités (dont l’hydroxychloroquine) et a dénoncé la dangerosité des vaccins sans jamais fournir de preuves. Une de ses vedettes lors du lancement, la Dr Stella Immanuel, défend l’idée que des maladies sont associées à des relations sexuelles avec des démons.

AFLDS s’est aussi allié à des groupes à la réputation douteuse, comme le projet Veritas. Mais il a surtout été très actif sur le plan politique, à travers ses liens avec la droite conservatrice: des élus d’au moins cinq États des États-Unis ont rédigé des projets de loi « antivaccins » qui reprennent mot pour mot un document d’AFDLS. Simone Gold, la fondatrice, a été une conférencière invitée de plusieurs événements réunissant des figures connues de l’extrême-droite ou même du mouvement complotiste QAnon. Et surtout, elle a fait partie des émeutiers qui ont pris d’assaut le Capitole, le 6 janvier 2021, ce qui lui a valu cet été une condamnation à deux mois de prison.

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Mais la dispute qui est apparue au grand jour le 4 novembre couvait apparemment depuis des mois, selon le magazine Vice. On y apprend en effet que celui qui avait pris la relève à la direction de l’organisme pendant que Simone Gold était en prison aurait découvert une utilisation inappropriée des fonds de l’organisme. Il est par exemple question d’une luxueuse résidence achetée en Floride par Simone Gold pour 3,6 millions$, ainsi que de trois voitures, un voyage en jet privé de 100 000$, et « près de 50 000$ par mois » sur les cartes de crédit.

De plus, depuis sa sortie de prison, Gold serait engagée dans une dispute pour reprendre le contrôle de l’organisme, en plus d’accuser son successeur de malversations et de continuer de s’exprimer en public en s’attribuant le titre de porte-parole d’AFLDS, voire de présidente.

Les accusations de détournement de fonds permettent au passage d’en apprendre plus sur les finances d’AFLDS, théoriquement un organisme à but non lucratif. Il apparaît que l’organisme a reçu de ses partisans des dons s’élevant à 10 millions$. Outre cela, une importante source de revenus a été de vendre des prescriptions, contre la COVID (ou plus récemment, contre la COVID longue), pour de l’hydroxychloroquine ou de l’ivermectine. Une enquête du magazine The Intercept avait révélé en septembre 2021 que cela avait valu à AFLDS des revenus d’au moins 6,7 millions$ US.

La bataille judiciaire pourrait durer longtemps, si aucune des deux parties n’est prête à faire des compromis. Simone Gold semble avoir le contrôle du site web d’AFDLS et est appuyée par des partisans pour qui elle est, selon ses dires, une « héroïne populaire ». Mais pour l’instant, conclut le magazine Daily Beast, « le rôle d’AFLDS comme groupe de pseudoscience médicale dominant de la droite, semble être passé ».

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