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Le jeu vidéo « Fortnite », accusé de créer une dépendance, poursuivi en justice

Au Canada, des parents accusent Epic Games, l’éditeur de « Fortnite », d’avoir rendu leurs enfants dépendants. Un tribunal devra donc, ces prochains mois, trancher sur l’existence, ou non, de risques et de dangers concernant son utilisation.

Le Monde avec AFP

Publié le 12 décembre 2022 à 16h38, modifié le 12 décembre 2022 à 17h45

Temps de Lecture 3 min.

Quelques mois après son lancement en 2017, Fortnite est devenu populaire après l’intégration d’un mode « battle royale », qui oppose cent joueurs entre eux, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un.

Au Canada, la justice va devoir prochainement se pencher sur un recours collectif accusant le concepteur et l’éditeur du jeu vidéo Fortnite, Epic Games, de créer une dépendance auprès des utilisateurs, d’après un jugement rendu par la Cour supérieure de Montréal le 7 décembre. « Le tribunal conclut qu’il existe une question sérieuse à débattre quant à l’existence de risques et de dangers naissant de l’utilisation de Fortnite », précise le document.

Ce recours collectif, lancé en 2019, a été déposé par les parents de trois enfants qui étaient âgés de 9, 13 et 15 ans lorsqu’ils ont commencé à jouer à ce jeu vidéo multijoueur en ligne, disponible sur toutes les plates-formes. Les plaignants dénoncent des symptômes comme « des migraines, des douleurs dorsales et cervicales, des manquements à l’hygiène de base, des troubles du sommeil ainsi que des troubles sociaux importants ».

Tout en rappelant que le diagnostic de dépendance au jeu vidéo n’est pas reconnu au Québec et que l’association américaine des psychiatres estime qu’« il y a des preuves encore insuffisantes pour conclure que les troubles liés au jeu vidéo constituent une pathologie à part entière », le tribunal conclut que cela « ne rend pas les prétentions en demande frivoles ou sans fondement ». A titre de comparaison, il évoque l’usage du tabac, « dont l’effet nocif n’a pas été reconnu du jour au lendemain ».

Dans les mois à venir, l’éditeur Epic Games devra donc se défendre devant les tribunaux québécois d’avoir développé et commercialisé un produit « dangereux et nocif », d’avoir omis d’en divulguer les risques et d’avoir lésé des mineurs avec sa monnaie virtuelle, appelée V-bucks.

Selon la classification PEGI, « Fortnite » est déconseillé aux joueurs de moins de 12 ans, notamment en raison de « fréquentes scènes de violence modérée ».

Temps excessif

Le dossier détaille le temps excessif passé par ces enfants sur Fortnite. Le plus jeune aurait effectué 1 891 parties – lesquelles durent au maximum une vingtaine de minutes – entre ses 9 et 10 ans. Ses parents déplorent une pratique du jeu vidéo qui est devenue « une source de conflit », son comportement « agressif et vulgaire » lorsqu’il est en ligne et l’abandon de ses activités sportives et sociales.

Celui qui a commencé à jouer à 13 ans, pour sa part, a effectué 7 781 parties en près de deux ans et passe au minimum trois heures par jour sur ce jeu. Ses parents ajoutent que cela peut le pousser à se coucher à trois heures du matin. Celui qui a débuté à 15 ans, enfin, compte 6 923 parties au compteur, soit l’équivalent de quarante-deux jours entiers devant l’écran. Ses parents, qui ont dû « à un moment installer un cadenas sur l’ordinateur », soulignent son désintérêt pour les activités familiales ainsi qu’une baisse de ses résultats scolaires.

Ces pratiques excessives s’accompagnent de dépenses importantes : entre 200 et 400 euros pour les deux plus jeunes, et jusqu’à 4 100 euros (6 000 dollars canadiens) pour le plus âgé, précise son avocat. En effet, Fortnite a beau être gratuit, il propose aux joueurs de mettre la main au portefeuille pour obtenir des éléments permettant de modifier l’apparence de leur personnage ou ses attributs, comme des tenues ou des danses. Pour cela, il leur faut acheter une monnaie virtuelle, les V-bucks, qui leur permet ensuite d’acheter des produits en ligne.

Lire l’enquête : Article réservé à nos abonnés Au secours, mon enfant est accro à « Fortnite » !

Les trois parents demandent en conséquence la reconnaissance des « dommages moraux et matériels ainsi que la restitution des prestations », notamment le remboursement de tous les achats de joueurs mineurs.

Epic conteste

Pour se défendre, l’éditeur avance l’absence de « rapport d’expertise » et d’études sur « les effets indésirables d’un jeu vidéo ». Ses avocats contestent également la validité du document diagnostiquant une « cyberdépendance » pour l’enfant le plus âgé.

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La procédure se fonde sur la reconnaissance d’« un trouble lié au jeu vidéo » établi par la 11e révision de la catégorisation internationale des maladies publiée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2019. Les représentants européens de l’industrie vidéoludique avaient alors dénoncé « une notion qui ne repose sur aucune preuve suffisamment solide ». L’utilisation de cette classification, entrée en vigueur en février 2022, par un tribunal pour un recours collectif est une première.

En 2019, Epic Games a déjà été ciblé par une autre procédure groupée, lancée par des parents américains, qui ciblait les coffres à butins, ou loot boxes, proposés dans Fortnite et Rocket League. Le jugement s’est soldé par un accord de 25 millions d’euros, en février 2021. Fortnite comptait 350 millions d’adeptes dans le monde en 2020, selon les chiffres de l’éditeur.

Le Monde avec AFP

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