TÉMOIGNAGES - En Iran, la révolution de l'intérieur

L'Iran fait face à une importante contestation depuis la mort d'une étudiante en septembre, arrêtée après avoir enfreint le code vestimentaire du pays. ©AFP - Anadolu Agency / Fatemeh Bahrami
L'Iran fait face à une importante contestation depuis la mort d'une étudiante en septembre, arrêtée après avoir enfreint le code vestimentaire du pays. ©AFP - Anadolu Agency / Fatemeh Bahrami
L'Iran fait face à une importante contestation depuis la mort d'une étudiante en septembre, arrêtée après avoir enfreint le code vestimentaire du pays. ©AFP - Anadolu Agency / Fatemeh Bahrami
Publicité

Trois mois après la mort de Mahsa Amini, arrêtée par la police des mœurs pour un foulard mal ajusté, la contestation ne faiblit pas en Iran en dépit d’une répression brutale. Témoignages rares recueillis par un journaliste à Téhéran, à l’occasion de trois jours de grève prévus dans le pays.

C’était le 16 septembre 2022. Mahsa Amini, 22 ans, interpellée par la police des mœurs pour un foulard mal ajusté, décédait trois jours après son arrestation violente. Depuis, la contestation ne faiblit pas en Iran, en dépit d’une répression brutale. Et même si cette police, qui faisait régner la terreur dans les rues, a soit disant été abolie par les Mollahs, les jeunes iraniennes et iraniens continuent de descendre dans la rue, avec une seule revendication : vivre libres.

Sous couvert d’anonymat, l’un des très rares journalistes professionnels encore présents à Téhéran a recueilli pour France Inter des témoignages exceptionnels à l’occasion de trois jours de grève prévus dans le pays.

Publicité

“Porter les habits que je veux”

Tous les soirs, des voix s’élèvent dans l’obscurité pour crier “Mort au Dictateur, Mort à Khamenei”. Un acte de défiance envers le Guide Suprême, passible de la peine de mort. Des mots qui résonnent néanmoins d’un appartement à l’autre dans le centre de Téhéran. Et jusqu’à l’université islamique Azad de la capitale iranienne où un bruit gronde depuis la cantine réservée en principe aux garçons. Terminé, les cantines séparées, les filles ont investi les lieux et affichent leur unité.

À l’extérieur de l’université, des photos sont accrochées à une grille et de bougies allumées au bas. “Ce sont des étudiants qui sont en prison. Là, regarde, c’est notre camarade Yalda qui est morte il y a un mois”, explique Mahnaz, étudiante de 22 ans. La jeune femme s’inquiète pour ses amis dont elle est sans nouvelles. Ils ont été arrêtés comme des milliers d’autres depuis le début du soulèvement. Elle ne sait pas dans quelle prison ils se trouvent et s’ils sont toujours en vie. “Tous les jours on se réveille avec ce sentiment d’inquiétude et de frustration. On a peur de ce qui peut arriver demain.”

L'invité de 8h20 : le grand entretien
23 min

Mahnaz le dit sans détours, elle soutient les manifestations. “Je veux porter les habits que je veux”, lance l’étudiante de 22 ans qui se maquille et se coiffe avant de sortir, sans son foulard. Des vêtements “dans lesquels je me sente bien, confortables ; je veux mettre les mêmes vêtements que tous les autres jeunes du monde entier”. Elle partage un dortoir avec dix autres filles de son âge, dans une auberge de jeunesse.

Mahnaz, dans son auberge de jeunesse.
Mahnaz, dans son auberge de jeunesse.
© Radio France

“On sait ce qu'on veut dans la vie”

Dès qu’elle le peut, Mahnaz poste des vidéos sur les réseaux sociaux. En Iran, les VPN qui permettent de contourner la censure du régime sont devenus l’unique moyen de communiquer avec l’extérieur. Ali, 31 ans, ingénieur en informatique, met ses connaissances au service de la révolution. “Ces VPN aident les jeunes”, dit-il, “car le régime pratique de plus en plus la censure”. “Ils leur permettent de partager sur les réseaux les images qu’ils ont tourné, pour qu’ils puissent les mettre à disposition des médias et que le monde soit informé.”

Au premier jour de la protestation, Ali s’est rasé les cheveux en signe de solidarité avec les femmes iraniennes. Il est de toutes les manifestations. “Notre génération est la génération connectée. On est en contact avec le monde entier. On est éduqué. On sait ce qu’on veut dans la vie”, constate-t-il. “Et nous savons ce que veut dire ‘être unis’. On se bat pour la liberté d’expression, pour la liberté de choisir nos vêtements, comme tous les gens dans ce monde, pour la démocratie, pour l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. C’est pour cela qu’on se bat. C’est notre combat.”

L'invité de 8h20 : le grand entretien
25 min

Un combat à armes inégales qui a fait, selon les estimations, entre 300 et 450 morts en grande majorité dans les rangs des manifestants.

L'équipe

pixel