Mais où est donc passé l’“hiver de colère” que tout le monde pressentait, se demande la Zeit. Alors qu’à la fin de l’été de nombreux journaux s’attendaient à voir un vaste mouvement de contestation émerger lors des grands froids, l’Allemagne semble relativement paisible.

Des manifestations nationales ont bien lieu tous les lundis, mais elles ne rassemblent généralement que quelques milliers, voire des centaines de personnes par ville – soit souvent moins que les marches contre les mesures sanitaires des deux dernières années.

“Ces jours-ci, ce n’est pas le chaos qui se répand dans le pays, mais le parfum du gros rouge et des clous de girofle [utilisés pour faire du vin chaud sur les marchés de Noël]”, souligne le journal de gauche. L’absence de forte mobilisation s’explique par plusieurs facteurs :

“Commençons par la raison la plus évidente : les Allemands ne sont pas français.”

Les mouvements sociaux comme celui des “gilets jaunes” demeurent rares dans un pays peu marqué par l’esprit de la révolution et par la culture de la grève générale. “Tout cela ne correspond tout simplement pas à l’état d’esprit d’un peuple dont Lénine avait dit : ‘Quand ils veulent attaquer une gare, ils commencent par acheter un billet de train.’”

Des manifestations associées à l’extrême droite

Mais la culture allemande ne suffit pas à expliquer la faiblesse des contestations, à une période où le pays s’apprête très probablement à entrer en récession. Pour l’hebdomadaire de Hambourg, les manifestations contre la politique de la coalition “feu tricolore” (sociaux-démocrates, Verts, libéraux) sont associées dans les esprits à l’extrême droite, qui appelait dès la période estivale à sortir dans la rue. “Cela a dissuadé une partie de la population – certains militants de gauche radicale et des représentants syndicaux – de se joindre au mouvement.”

En parallèle, le gouvernement du social-démocrate Olaf Scholz a bichonné les syndicats en proposant une réforme de l’assurance-chômage et une augmentation des allocations des demandeurs d’emploi.

Il a aussi débloqué d’importantes sommes d’argent pour soutenir l’économie et les ménages – avec, notamment, une enveloppe de 200 milliards d’euros destinée à faire face à la hausse des prix de l’énergie, la mise en place d’un passe transports bon marché et une remise temporaire sur le prix de l’essence.

Autant de raisons, selon la Zeit, de ne pas aller manifester. “Même si toutes les aides ne sont pas encore arrivées à destination, les citoyens ont vraiment l’impression que les politiques font quelque chose – ce qui calme nettement leur colère, s’il y en avait.”