Données

Combien de personnes à la rue et en hébergement d’urgence ?

Plus de 100 000 personnes font appel au 115 pour obtenir un hébergement d’urgence. Parmi elles, 5 000 adultes et enfants restent à la rue, faute de place.

Publié le 14 décembre 2022

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Modes de vie Logement

Au cours de la nuit du 22 août 2022, 102 756 personnes ont dormi dans un hébergement d’urgence en France, selon les statistiques du 115 [1], le numéro de téléphone qui centralise les demandes des personnes sans domicile. La plupart ont été hébergées à l’hôtel : 47 % dans des hôtels d’Île-de-France, 16 % dans des hôtels d’autres régions. Les 37 % restants ont généralement été orientés vers des centres d’hébergement d’urgence, le plus souvent des dortoirs. Cette même nuit, 6 273 personnes ont appelé le 115, mais n’ont pas obtenu d’hébergement. Quelques-unes ont refusé la solution proposée par le service d’urgence ou sont finalement restées là où elles étaient, chez un ami par exemple. Mais 5 000 personnes n’ont pas obtenu d’hébergement, faute de places. Parmi elles, 80 % avaient appelé le 115 parce qu’elles dormaient à la rue.

L'hébergement des sans domicile
Nombre
Personnes hébergées à l'hôtel en Île-de-France48 412
Personnes hébergées à l'hôtel hors Île-de-France16 809
Autres hébergements d'urgence37 535
Ensemble des personnes hébergées102 756
Personnes ayant appelé le 115 mais non hébergées6 273
- dont demandes non pourvues faute de place5 002
Lecture : lors de la nuit du 22 août 2022, 102 756 personnes sans domicile ont été hébergées à l’hôtel ou en centre d’hébergement d’urgence. 5 002 personnes ont appelé le 115 mais n’ont pas obtenu d’hébergement, faute de places.
Source : Unicef et FAS – nuit du 22 août 2022 – © Observatoire des inégalités

Ces chiffres ne permettent pas d’estimer exactement le nombre total de personnes qui dorment dans la rue en France. Cette approche laisse en effet de côté les personnes qui ont appelé le numéro d’urgence sans obtenir de réponse, et tous les SDF sont loin d’appeler le 115. Rien qu’à Paris, 2 598 personnes sans abri ont été dénombrées lors de la « Nuit de la solidarité » de janvier 2022, une opération systématique de décompte organisée par la mairie et les associations. Or, à titre de comparaison, la capitale ne représente que 15 % des personnes hébergées par le 115 en France. La dernière enquête de l’Insee sur le sujet date de 2012. À l’époque, la population des sans-abri était estimée à 12 000 personnes. Il est très difficile de savoir comment la situation a évolué depuis.

Enfants à la rue et à l’hôtel social

40 % des personnes hébergées en urgence par le 115 sont des enfants de moins de 18 ans qui accompagnent leurs parents, très souvent leur mère seule. 41 098 mineurs ont été recensés lors de la nuit du 22 août 2022. Parmi eux, 29 % ont moins de trois ans. Les familles sont, pour près des trois quarts, hébergées à l’hôtel. Vivre dans un hôtel social, voire dans un hôtel touristique réservé par le 115, signifie pour ces enfants et adolescents déménager fréquemment, souvent loin de l’école où ils sont inscrits, manquer d’un espace personnel où s’isoler et faire ses devoirs, mais aussi ne pas disposer d’une cuisine et d’une pièce commune pour manger en famille.

Les familles sans domicile trouvent en proportion plus souvent un accueil de la part du 115 que les adultes seuls. Pour autant, des milliers d’enfants dorment à la rue, faute de places dans les hébergements d’urgence. 1 658 enfants n’ont pas pu être hébergés selon ce baromètre. 368 ont moins de trois ans, 823 entre 3 et 10 ans et 467 entre 11 et 18 ans. 80 % des familles qui n’ont pas obtenu d’hébergement ont dormi à la rue.

22 000 personnes dans des bidonvilles
22 200 personnes vivent dans les 439 bidonvilles et squats (de plus de dix personnes) recensés par la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement [2]. Plus de la moitié sont des ressortissants européens. Depuis 2018, ce nombre est en hausse (+ 2 800 personnes). Le nombre réel est sans aucun doute plus important encore, compte tenu des difficultés de mesure, même si on est très loin des 100 000 personnes enregistrées au milieu des années 1970 [3]. Dans chacun des bidonvilles de Nanterre et de Champigny-sur-Marne, en banlieue parisienne, on comptait alors plus de 10 000 personnes.
100 000 personnes dans des habitations de fortune
Pas moins de 100 000 personnes vivent dans une « habitation de fortune », selon les calculs du bureau d’études Compas à partir des données du recensement de l’Insee 2018. Il s’agit notamment de cabanons, d’Algéco, de logements squattés situés dans des bâtiments en voie de démolition, etc. Au total, 59 000 « logements » très précaires ont été recensés. Certes, 100 000 personnes représentent moins de 0,2 % de la population française. Mais cela représente tout de même l’équivalent de la population d’une ville comme Caen ou Nancy. Ce chiffre est d’ailleurs sans doute minimisé car une partie des plus précaires échappe à tout comptage. Il ne prend en compte que l’habitat particulièrement dégradé, et non l’ensemble des logements insalubres. Enfin, 37 000 personnes vivent à l’hôtel et n’ont pas d’autre logement, toujours selon les calculs du Compas.

Photo / CC Ev


[1« Baromètre 2022 « Enfants à la rue » », Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et Unicef, septembre 2022.

[2« Résorption des bidonvilles. Point d’étape », Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement, octobre 2021.

[3« Mal-logement, bidonvilles et habitat indigne en France », Julien Damon, in Recherches et Prévisions n° 76, Cnaf, 2004.

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Date de première rédaction le 14 décembre 2022.
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