Autour du lac d’Annecy, les montagnes sont dépourvues de neige tout comme les stations environnantes. Les vacanciers se rabattent sur la visite de la vieille ville et s’interrogent. Peut-on encore skier quand il fait plus de 12°C pendant les vacances de Noël et que même la neige artificielle ne tient pas ? La station de La Clusaz est devenue le symbole de cette bataille polémique entre ceux qui veulent faire durer le ski et ceux qui veulent rendre la montagne durable.

La bataille se joue par réseaux sociaux interposés. Elle oppose Valerie Paumier, qui a créé Résilience Montagne, association entre ONG et think tank qui se bat pour "une montagne durable" et l’organisation Domaines skiables de France, qui défend une autre vision du développement durable compatible avec le ski sur neige artificielle. Symbole de la controverse la station de La Clusaz en Haute Savoie où les températures trop élevées de fin décembre ne permettent même pas de skier sur la neige artificielle.


Au cœur de la polémique, la retenue d’eau voulue par les exploitants du site pour pouvoir enneiger artificiellement la station. À l’automne, le projet a été stoppé par un tribunal pour les menaces qu’il fait peser sur la biodiversité.
Or cet hiver printanier hypothèque encore plus la viabilité du projet. L’affrontement entre les deux visions de la montagne et de son économie, qui oppose Résilience Montagne et Domaines skiables de France, résume à lui seul les enjeux de la transformation durable.

Deux visions de la montagne s’opposent


D’un côté, une association qui attaque en règle des modèles insoutenables et peu compatibles avec les changements radicaux déjà à l’œuvre. De l’autre, une organisation qui "défend la montagne et la vie économique", rassemble 400 adhérents dont 250 opérateurs de domaines skiables et prône un aménagement à travers une transition progressive basée sur des éco engagements comme celui d’atteindre la neutralité carbone en 2037.
Valerie Paumier de Résilience Montagne attaque cet engagement sur LinkedIn : "Dur, dur quand on sait qu’aucun plan rail n’est sur les rails, que plus de 50% des logements de montagne sont des passoires thermiques, qu’un vaste plan pour construire des retenues collinaires et donc de captage des sources et torrents est en place afin d’augmenter les taux de couverture en neige artificielle à toute altitude…"
Elle dénonce aussi la publicité incitant à prendre l’avion pour que "les Parisiens soient en moins de trois heures en bas des pistes", tout comme la pratique du ski nocturne, elle-aussi très consommatrice d’énergies fossiles.

Engagement de neutralité carbone des stations de ski


Le président de Domaines skiables de France, Alexandre Maulin, met en avant l’éco conduite des remontées mécaniques. Elle consiste, comme il l’a expliqué sur BFM Busines, à "être au maximum de la vitesse quand il y a du monde, et à réduire la vitesse quand il n’y en a pas car on n’a pas besoin d’autant de débit, ce qui représente déjà un gros effort de sobriété".
Pour tenir l’engagement de neutralité carbone, il mise sur le changement des dameuses qui représentent 80% de l’empreinte carbone des stations de ski. Il travaille pour cela avec les constructeurs de ces engins qui tassent la neige sur les pistes. Alexandre Maulin explique : "certains vont vers l’hydrogène, d’autres vers l’hydroélectricité. On s’est donné cinq ans pour les concevoir, deux ans pour les mettre en marché, et ensuite dix ans pour renouveler l’ensemble des flottes".
Impossible pour lui d’imaginer que, dans dix ans, ces dameuses propres pourraient ne pas avoir de neige, naturelle ou artificielle, à damer ? Au vu de l’accélération des manifestations du changement climatique dans les Alpes, il serait pourtant légitime de l’envisager. Actuellement, la moitié des pistes de ski françaises ont déjà été contraintes de fermer à cause de la douceur.
Anne-Catherine Husson-Traore, @AC_HT_, directrice générale de Novethic

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