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Le lourd bilan du déclin des pollinisateurs sur la santé humaine dans le monde

Biodiversité
Les trois quarts des cultures agricoles dépendent du transport naturel de pollen par des insectes et d'autres animaux. © Luke Schobert / Unsplash

Le déclin massif de la biodiversité n'est pas sans lien avec la santé humaine. Une étude publiée dans la revue Environmental Health Perspectives estime à près d'un demi-million le nombre de morts prématurées attribuables à la perte des insectes pollinisateurs. Explications.

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La biodiversité est parfois vue comme un concept abstrait, loin des préoccupations quotidiennes des citoyens. Une idée reçue battue en brèche par des scientifiques américains et britanniques, qui ont quantifié le lien entre le déclin des pollinisateurs d'une part, et la santé humaine d'autre part.

A travers le monde, les trois quarts des cultures agricoles dépendent du transport naturel de pollen par des insectes - abeilles sauvages, guêpes, bourdons, syrphes, papillons, etc. - ou par d'autres animaux tels que les chauves-souris. Le déclin à la fois de l'abondance et de la diversité de ces pollinisateurs a d'ores et déjà commencé à faire chuter la productivité de l'agriculture.

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AVC, maladies cardiaques, diabète, certains types de cancers...

Or, avec cette perte de productivité, le régime alimentaire des populations humaines s'appauvrit progressivement en fruits, en légumes et en noix, tandis qu'il s'enrichit en céréales - le blé consommé sous forme de pain, de semoule ou de pâtes, le riz, etc. - dont la plupart sont pollinisées non par des animaux mais par le vent.

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Ce déséquilibre alimentaire se traduit, concrètement, par la mort prématurée de plusieurs milliers de personnes, victimes de "maladies non transmissibles" telles que des accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou cardiaques, le diabète, et certains types de cancers.

Quelle quantité supplémentaire de nourriture aurait été produite dans le monde avec une pollinisation optimale ? Qui aurait consommé cette nourriture, avec quels avantages pour la santé ? Combien de maladies et de décès liés à l'alimentation auraient pu être évités ? Autant de questions auxquelles les auteurs de l'étude publiée dans Environmental Health Perspectives (12/2022) ont tenté de répondre.

Les scientifiques ont analysé des données de productivité et de rendement provenant de plusieurs centaines de fermes en Amérique centrale et du sud, en Afrique, en Asie et en Europe. Ils ont également fait appel à un modèle économique retraçant les échanges commerciaux de denrées alimentaires, puis rassemblé des connaissances existantes sur le lien entre déséquilibre alimentaire et mortalité précoce dans le monde.

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1 % de la mortalité humaine sur la planète est liée au manque de fruits et légumes

Selon les auteurs, la perte des pollinisateurs a provoqué une diminution de la productivité de l'ordre de 3 % (légumes) à 5 % (fruits et noix). D'après leurs calculs, la consommation de ces aliments sains en moindres quantités expliquerait environ 1 % de l'ensemble de la mortalité humaine sur la planète - soit 427.000 décès chaque année.

Un bilan qui se décline de manière différente selon le contexte socio-économique. Les plus affectés d'après l'étude sont les pays dont la richesse est considérée comme intermédiaire - Chine, Inde, Russie et Indonésie - ainsi que les classes pauvres des pays aisés, chez lesquelles le déclin des pollinisateurs vient s'ajouter à d'autres facteurs favorisant les maladies non transmissibles, notamment le tabagisme et le manque d'exercice physique.

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Quant aux pays pauvres, ce sont eux qui perdent le plus de rendement en fruits, en légumes (- 26 %) et en noix (- 8 %) à cause du déclin des pollinisateurs, détaille l'étude. En revanche, les catégories aisées des pays riches, elles, peuvent toujours se permettre d'acheter des aliments sains même lorsque ces denrées voient leur prix augmenter en raison d'une baisse de production.

Si chaque étape de l'analyse comporte une part d'incertitude, les auteurs considèrent le chiffre d'un demi-million de morts précoces comme une estimation basse, n'ayant considéré ni l'impact du manque de vitamines associés aux régimes pauvres en fruits et légumes, ni les pertes de revenus des agriculteurs. "L'impact global du déclin de la biodiversité sur la production agricole est probablement bien plus important que celui mesuré dans cette étude", confirme au Guardian le Pr David Goulson, chercheur à l'université de Sussex (Royaume-Uni), qui n'a pas contribué à l'étude.

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"L'aspect le plus inquiétant de ce travail est que, puisque les populations d'insectes continuent à décliner, cette perte de rendement des cultures va s'aggraver à l'avenir, alors que la population humaine va continuer à croître pour atteindre au moins 10 milliards d'habitants. Les problèmes décrits ici vont probablement s'aggraver au fur et à mesure que le 21e siècle avance", prévoit le scientifique britannique.

"La perte des pollinisateurs a déjà un impact sur la santé"

"Dans le débat sur la biodiversité, il a manqué un élément crucial : des liens directs avec la santé humaine", affirme le Dr Samuel Myers, de l'école de santé publique TH Chan de l'université Harvard et auteur principal de l'étude, cité dans un communiqué. "Notre étude établit le fait que la perte des pollinisateurs a déjà un impact sur la santé. Et ce, à une échelle comparable à celle d'autres facteurs de risque au niveau mondial, comme le cancer de la prostate ou les troubles liés à la consommation de drogue", précise-t-il.

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Si les auteurs reconnaissent l'existence d'un "défi immense", ils soulignent néanmoins que tout n'est pas perdu, en citant d'autres travaux démontrant l'efficacité de plusieurs méthodes contre le déclin des pollinisateurs. Par exemple, la réduction des pesticides - en particulier des insecticides de la famille des néonicotinoïdes - ainsi que la mise en place de bandes et de haies mellifères (plantes attractives et nutritives pour les insectes) dans les champs.

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