Il aura fallu Zizou pour que Noël Le Graët, président de la Fédération française de football (FFF), tremble. Accusé depuis des mois de harcèlement sexuel, c'est une formule "irrespectueuse" envers la légende Zinédine Zidane qui a conduit à la mise en retrait du patron de la Fédération. Malgré des témoignages accablants de femmes, le comité exécutif de la "3F" a toujours apporté son "soutien unanime" à Le Graët. Insulter Zidane ou harceler des femmes, deux poids deux mesures.  

C’est une petite phrase qui pourrait faire tomber le patron de la Fédération française de football (FFF). Noël Le Graët, président de la FFF, a été mis en retrait de la Fédération par le comité exécutif extraordinaire de l’instance mercredi 11 janvier. Une décision qui intervient trois jours après les propos polémiques du dirigeant envers Zinédine Zidane.
Interviewé dans l’émission Bartoli Time (RMC) le 8 janvier sur la possibilité que la légende du football puisse remplacer Didier Deschamps en tant que sélectionneur de l’équipe de France, il répond : "Certainement pas, je ne l’aurais même pas pris au téléphone". Quant au fait que Zidane puisse prendre la tête de la sélection brésilienne, Le Graët tacle : "Zidane au Brésil ? Je n’en ai rien à secouer, il peut aller où il veut !" De quoi mettre en émoi la planète football.
"Zidane, c’est la France, on ne manque pas de respect à la légende comme ça… ", charge Kylian Mbappé sur Twitter, sortant de sa réserve habituelle. "C’est honteux de parler comme ça", ajoute le lendemain l’ancien acolyte de Zizou, Bixente Lizarazu. Partout, les critiques pleuvent contre Noël Le Graët qui, face à la polémique, a présenté ses excuses dans un communiqué diffusé par l’AFP. Fin de l’histoire ? Pas vraiment. Car si l’affaire Zidane a pris une telle ampleur, elle n’est que la partie émergée de l’iceberg.

"Climat sexiste et comportements misogynes"


Depuis plusieurs mois, Noël Le Graët est accusé par des femmes de harcèlement sexuel sans que le Comex ne s’en émeuve. Pire, le 15 septembre dernier, Noël Le Graët a reçu le "soutien unanime de son comité exécutif". La FFF a même déposé plainte en diffamation contre So Foot à l’origine des révélations de harcèlement sexuel. En septembre 2022, le magazine avait en effet publié une longue enquête et plusieurs témoignages de femmes destinataires de messages à caractère sexuel de Le Graët. En octobre, la cellule d’investigation de Radio France révélait, elle, de nouvelles accusations de harcèlement. Un ancien cadre évoquait alors un "climat sexiste et des comportements misogynes à la FFF"
Le 9 janvier, c’est un nouveau témoignage accablant qui est venu alourdir les charges pesant sur Noël Le Graët. Sonia Souid, agente de joueurs et de joueuses a raconté à BFMTV avoir elle aussi été victime de harcèlement de la part du patron de la "3F". "Il me voit comme deux seins et un cul", témoigne-t-elle, révélant à l’antenne des SMS de Le Graët : "Vous me manquez" ou encore "Sonia, je suis à ma troisième bouteille, je vous attends pour la quatrième"

Un problème de gouvernance


Sur Twitter, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra apporte alors son soutien à l’agente : "Bravo Sonia Souid pour le courage de votre témoignage. Notre audit en sera digne". L’audit en question a été lancé à l’initiative de la ministre quelques semaines après les premières révélations de So Foot. En attendant ses conclusions, qui devraient être rendues fin février, Noël Le Graët a accepté de se "mettre en retrait". La directrice générale, Florence Hardouin, a elle été mise en pied à titre conservatoire par le Comex.


Reste qu’il aura fallu une formule "irrespectueuse" envers une légende du sport pour qu’enfin la place de Le Graët soit questionnée. À 81 ans, et en poste depuis 2011, le président de la FFF paraissait jusqu’ici intouchable, symbole des défaillances de gouvernance de la Fédération. Fier d’avoir refusé que l’équipe de France porte le brassard One Love contre les discriminations lors de la Coupe du monde au Qatar, niant le racisme dans le football malgré les insultes reçues par Kylian Mbappé, refusant l’arrêt d’un match pour des chants homophobes… les prises de position polémiques de Noël Le Graët étaient pourtant connues depuis longtemps. Et son autorité de tutelle, le ministère des Sports, a longtemps fermé les yeux. 

Marina Fabre Soundron @fabre_marina 
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