Santé mentale

Toujours plus d'étudiants en détresse psychologique et toujours pas assez de psychologues

  • Publié le 16 janvier 2023 à 10:22
  • Actualisé le 16 janvier 2023 à 14:38

Depuis la pandémie, le gouvernement a mis en place un dispositif permettant aux étudiants qui en ont besoin d'avoir des consultations de psychologues gratuites. Stress, anxiété, mal-être... sont les causes poussant un bon nombre d'étudiants à consulter. Entre 2020 et 2022, la demande de prise en charge a doublé. Une situation aggravée par le nombre insuffisant de professionnels de la santé mentale.

"J'ai contacté une psychologue, elle m'a donné rendez-vous trois semaines après,. J'ai dû préciser que c'était urgent, sinon le temps d'attente allait être encore plus long" explique Hilda, une étudiante de master à l'université de La Réunion. La jeune femme a pu se faire prescrire des séances de psy gratuites grâce au dispositif "Santé psy étudiant".

Cette mesure a été mise en place par le Gouvernement à la suite de la crise Covid. Depuis le 10 mars 2021, un partenariat entre l'État et la Fédération française des psychologues et de psychologie donne aux étudiants la possibilité de bénéficier de huit séances gratuites."Aujourd'hui, on accorde plus d'attention à la santé mentale, on la déstigmatise" explique Marie Jouaville, responsable de la médecine préventive de l'Université.

- Deux psychologues à mi-temps pour deux campus -

Il est possible de consulter des psychologues sur les campus du sud et du nord par le biais au service de la médecine préventive. "Nous sommes passés de 600 consultations en 2020 à 1.440 pour 2022" annonce Marie Jouaville. Les demandes sont en hausse constante mais le nombre de professionnels reste insuffisant. La médecine préventive de l'Université compte seulement deux psychologues à mi-temps pour les campus du nord et du sud. Ce nombre devrait augmenter en 2023, précise Marie Jouaville.

Ces psychologues, présents sur le campus, accompagnent gratuitement les étudiants qui le souhaitent . Le temps d'attente pour une consultation est "d'environ 2 mois" informe la responsable de la médecine préventive.

En cas de détresse psychologique nécessitant une prise en charge en urgence "l'étudiant est d"abord reçu par un autre professionnel de santé, un infirmier ou un médecin généraliste" explique Marie Jouaville. Elle poursuit : " la médecine préventive peut également être un espace de transition pour les étudiants qui ont besoin d'un suivi plus long, ils peuvent être redirigés vers un dispositif spécifique ou vers un centre médico-psychologique".

- Le dispositif divise -

Pendant les vacances scolaires, les services de l'Université sont fermés. Il n'y a ni suivi, ni même téléconsultations au niveau du service universitaire de médecine préventive. Mais certains psychologues du dispositif Santé psy étudiant poursuivent leurs consultations et leurs téléconsultations, assurant ainsi un suivi psychologique à distance.

Une quinzaine de psychologues de toute l''île se sont portés volontaires pour ce dispositif qui ne remporte pas l’adhésion de tous. "Ce dispositif met à mal la profession de psychologue clinicien" déclare la psychologue et psychothérapeute, Stéphanie Laconi.

La faible rémunération des consultation est l’une des causes principales de ce manque de volontariat. Une psychologue, membre au dispositif Santé psy étudiant, explique : "les trois quart d'heure de consultation sont payés 30 euros. C'est beaucoup moins que le tarif en ville. Peu de psychologues sont d'accord, ils demandent un minimum de 60 à 80 euros pour une séance de 45 minutes à 1 heure 30".

Notre interlocutrice a accepté de participer à ce dispositif, "par conviction avant tout, et pour l'intérêt des étudiants, les rencontres avec ces étudiants sont riches et constructives" estime-t-elle.

Côté étudiants, le dispositif ne demande pas beaucoup de démarches. Maurine, étudiante en licence affirme : "c'était assez simple, j'ai juste donné à la psychologue mon ordonnance délivrée par mon médecin traitant. Je n'ai rien eu de plus à faire". Mais une fois ses huit séances terminées, Maurine confie "j'ai arrêté parce qu'il faut payer et je n'ai pas les moyens de continuer. Mais j'aurai aimé continuer pour mieux comprendre certaines choses". Sa dernière séance s'est achevée en 2022.

C'est pour éviter cette problématique, que l'État a renouvelé ce dispositif pour 2023, permettant à tous les étudiants - même ceux qui ont déjà eu un suivi psychologique -, de bénéficier à nouveau de Santé psy étudiant.

- La santé mentale des Réunionnais au cœur d'une étude -

En 2020, une étude comparative sur l'impact psychologique de la Covid-19 sur les Réunionnais et Métropolitains a été réalisée par la psychologue Stéphanie Laconi. "L'Étude a mis en avant un stress et un sentiment de solitude élevés chez les Réunionnais, mais aussi des scores de résilience (capacité à surmonter les chocs traumatiques - ndlr) et de satisfaction de la qualité de vie plus élevés que dans l’échantillon métropolitains" analyse-t-elle avant d'ajouter : "les résultats montrent que plus un individu fait preuve de résilience et moins il se sent stressé, ce qui est positif pour la santé mentale des Réunionnais".

La professionnelle de santé qui travaille beaucoup auprès des étudiants, a remarqué une détresse psychologique importante chez les jeunes Réunionnais, des troubles anxieux et dépressifs ayant plusieurs origines comme la qualité de vie, les relations interpersonnelles, le sentiment de solitude, les études ou encore les mouvements sociétaux.

Afin d'approfondir ces premiers résultats, Stéphanie Laconi a récemment lancé un questionnaire en ligne. En partenariat avec l'association AAPEJ (Association d'aide, de protection de l'enfance et de la jeunesse), il a pour objet d'étudier la santé mentale des personnes vivant à La Réunion et les facteurs influençant leur bonheur.

Les réponses seront traitées à partir du 20 mars 2023. Les résultats seront publiés ultérieurement.

Lire aussi : Lancement d’une enquête sur le bien-être des Réunionnais.es

lh/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

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