En Afghanistan, une radio résiste pour aider les femmes privées d’école

En Afghanistan, où les talibans veulent réduire les femmes au silence, une radio résiste et les éduque malgré tout.
Une femme à la radio en Afghanistan
Une femme à la radio en Afghanistan (image d'illustration).picture alliance/Getty Images

Entièrement contrôlée par des femmes dans un pays dirigé par des hommes, une radio incarne liberté, résistance et dissidence. Son nom : Radio Begum, « reines » en persan, émet en FM dans 10 des 34 provinces du pays. Pilotée par une équipe de 15 animatrices et journalistes, la radio compose chaque jour avec les fondamentalistes au pouvoir pour dispenser aux jeunes filles et aux femmes l’éducation à laquelle elles n’ont plus droit. Créée le 8 mars dernier, Radio Begum fait figure d’un porte-voix pour les femmes afghanes réduites au silence depuis l’invasion des talibans. Alors que les collèges, les lycées et les universités ont fermé leurs portes aux femmes, la radio demeure le seul média gratuit à fournir un accès à l’éducation aux jeunes filles afghanes. À sa tête, Hamida Aman.

Quand une radio remplace l’école

Au total, six matières sont proposées. Des questions, des réponses, des points à retenir… Tout est réalisé de manière à ce que les auditrices se sentent comme dans une salle de classe. Les cours durent 30 minutes, le matin en dari et l’après-midi en pachto. Les deux langues du pays sont utilisées pour toucher le public le plus large possible et ce dans tout le pays. Si la radio peut continuer d’émettre, c’est parce que la direction a reçu l’accord des talibans. Sans cet aval, il aurait été impossible de réaliser un tel projet. Zia Udin Bakthiar, le directeur adjoint de la radio, est l’un de ceux qui ont obtenu l’accord de l’émirat islamique d’Afghanistan : « On ne se cache pas, un média ne peut pas se cacher. On ne fait rien qui ne soit contraire à la loi. Tant que la sécurité le permettra, on va continuer notre travail. » Au total, ce dernier semestre, plus d’une centaine de médias auraient fermé à cause des restrictions de liberté, a annoncé Radio France

Six heures de cours chaque jour, des consultations gynécologiques et une aide psychologique 

En dehors des cours d’histoire-géographie, d’éducation civique, de théologie ou d’anglais, qui occupent 6 heures d’antenne par jour, des émissions abordent des sujets très intimes, dans la limite de ce qui est permis par les talibans. « Chaque jour, une gynécologue vient animer une émission d’une heure où elle répond aux appels des auditrices et donne des conseils. C’est une émission évidemment très populaire », explique Hamida Aman au micro de France Inter

« On parle aussi des droits des femmes en utilisant le prisme de l’islam comme paravent, car il est important que les femmes sachent ce qui se dit sur leurs droits dans l’islam pour mieux pouvoir se défendre. C’est vraiment la meilleure argumentation et la plus imparable », défend la fondatrice de Radio Begum. 

Dans cette radio décidément pas comme les autres, une aide psychologique est également dispensée. Sidika Ahmadi est la psychologue de l’équipe et anime une émission qui donne rendez-vous aux femmes pour écouter leurs douleurs. « Il y a une multiplication des appels de jeunes filles qui sont de plus en plus jeunes à être en dépression et à parler de suicide », se désole Hamida Aman.