Innovation : le message d'espoir de l'ex-porte-parole des «Pigeons»

 

Ex-porte-parole du mouvement des «Pigeons» et investisseur, Jean-David Chamboredon offre une vision à 360° du secteur de l'innovation digitale en France. 
Ex-porte-parole du mouvement des «Pigeons» et investisseur, Jean-David Chamboredon offre une vision à 360° du secteur de l'innovation digitale en France.  DR

    Il avait mené la fronde

    . Devenu le porte-parole de ces «Pigeons», Jean-David Chamboredon, par ailleurs à la tête du fond d'investissement ISAI, a repris la plume virtuelle début avril pour

    .

    Nomination d'Axelle Lemaire, état de santé de l'écosystème ou attractivé de la France à l'international, cet acteur incontournable de la French Tech et co-fondateur de l'association de lobbying

    fait un tour à 360° du secteur de l'innovation à la française.

    > Vous avez été le porte-parole des «Pigeons», où en est le mouvement ?

    Les Pigeons ont cessé d'exister assez rapidement en tant que communauté. Nous avons fermé notre page Facebook fin octobre 2012 et arrêté toute mobilisation à condition qu'il y ait une discussion constructive avec le gouvernement. Ce qui a abouti au printemps 2013 avec l'annonce par François Hollande de la réforme rétroactive des plus-values de cession. Depuis les «Pigeons» n'existent plus vraiment, ils se sont remobilisés un peu fin 2013 mais existent à travers France Digitale qui est devenu - grâce au mouvement - l'interlocuteur naturel des pouvoirs publics sur les questions digitales et les start-ups en France. Mais médiatiquement «Pigeons», c'est beaucoup plus puissant donc si nous ne sommes vraiment pas contents, nous sommes prêts à remettre notre bec de pigeons et l'hashtag #Geonpi. Pour l'instant, il n'y a pas de raison de se mobiliser.

    > Les entrepreneurs du web, dont vous même, se sont aussi mobilisés sur les réseaux sociaux lors du départ de Fleur Pellerin...

    L'épisode des «Pigeons» a permis un dialogue assez intense avec Bercy et notamment avec Fleur Pellerin et ses équipes. Nous avons eu le sentiment après 15 mois de collaboration qu'il y avait une vraie compréhension mutuelle des enjeux. C'est d'ailleurs assez rare qu'un milieu professionnel appelle à garder un ministre ! Les gens de l'écosystème sont aussi très actifs sur Twitter et le hashtag #Keepfleur est rapidement parti. L'idée était de rendre hommage au fait que pour la première fois nous avions une ministre déléguée qui avait compris. Je me rappelle avoir rencontré Eric Besson (ministre en charge de l'Économie numérique 2010-2012), NDLR) et il ne s'intéressait pas à qui nous étions et ce que nous faisions.

    > Que pensez-vous de la nomination d'Axelle Lemaire à sa place ?

    Elle semblait la meilleure candidate parmi les noms évoqués car c'est quelqu'un qui est international. Le gros danger de la politique est de tout voir sous un angle national sans comparer avec les autres pays et sans comprendre les interconnexions qui existent. Axelle Lemaire, une Franco-canadienne qui a vécu à Londres, a forcément cette vision internationale nécessaire dans le monde digital avec des entreprises mondiales.


    > Dans quel état est le financement des PME innovantes en France ?

    Nous avons une spécificité unique au monde en terme d'aide des pouvoirs publics, c'est l'assurance chômage. Beaucoup de gens profitent de cette indemnisation-chômage pour lancer leur activité. C'est une très bonne chose et on peut même dire que les assurances chômage sont le plus grand «business angel» français et de loin.

    Le grand changement porte sur la différence entre le financement bancaire et le financement en capital. Nous sommes très en retard en France dans le financement des start-ups par des fonds d'investissement et non par les banques. Aux Etats-Unis, ils en en sont à plus de 50%, en Allemagne à 25% et nous à peine à 8%. Il n'y a pas de culture de l'investissement en capital-risque.

    Le problème se pose lorsque les entreprises veulent se développer. Pour une belle entreprise, il est facile de lever jusqu'à 5 millions d'euros lors d'un tour de table en France, c'est plus difficile entre 5 et 10 et quasi impossible sans quitter le pays au dessus de 10 millions sauf si la BPI investit et double les montants. Vous êtes alors obligés d'aller à Londres ou à San Francisco pour financer votre expansion internationale. Les entreprises françaises ont tendance à s'autolimiter dans leurs projets.


    > L'épargne des Français pourrait aussi contribuer au financement de cette économie comme le préconisait une rapport parlementaire pour réorienter l'argent de l'assurance-vie. C'était il y a un an, où en sommes nous dans la réalité ?

    Bercy avait demandé ce rapport sur l'épargne des Français et il y a eu une «réformette» de l'assurance-vie avec la création d'un nouveau contrat, Euro-croissance, une nouvelle fois investi en dette donc pas en capital dans les petites PME. Un autre contrat, Vie-génération, a donc été créé et il est censé financer à la fois le logement social, l'économie solidaire et le capital des PME. Mais les assureurs déconseillent d'acheter ce contrat...

    Les pays qui ont résolu le problème sont ceux avec des fonds de pensions de retraite qui allouent une partie de leurs actifs au capital-risque. Un petit fond néérlandais investit par exemple plus à lui seul que tous les institutionnels français réunis. Notre espoir est une France plus attractive pour les grands investisseurs internationaux grâce à de belles réussites.

    > Il y a justement le bel exemple de Criteo qui est entré avec succès l'automne dernier à la Bourse de New York...

    Les Américains ont vu une belle histoire dans Criteo et il y a un regain d'intérêt des investisseurs en France. Il voit du potentiel, peu importe le pays. J'ai revu en fin d'année dernière des confrères américains qui n'étaient plus venus à Paris depuis 2010. Ils font des visites et rencontre des entreprises grâce à Criteo. Le capital anglo-saxon est pragmatique et va où il peut gagner de l'argent. Il y a peu de candidat à des réussites comme celle-là. La France est bonne dans la consommation collaborative, comme le co-voiturage BlaBlaCar dans lequel je crois. Et le «Big Data», l'agrégation de données, car ce sont des mathématiques et nous sommes bons en maths et en algorithmes. Ce sont d'eux que viendront le prochain grand groupe français.