Atteinte du Covid long depuis trois ans : "J'ai dû faire le deuil de ma vie d'avant"

Alors qu'une étude met en évidence la disparition de symptômes du Covid long après un an d'infection, des patientes racontent leurs séquelles qui persistent.

La cinquième vague de Covid-19 confirme son reflux dans le Nord - Pas-de-Calais, à l'approche de la levée de certaines restrictions sanitaires.
Si certaines patientes n’ont (presque) pas de symptômes lorsqu’elles contractent le Covid, d’autres ne s’en remettent jamais complètement. (©JB/Lille actu/Illustration)
Voir mon actu

Fatigue chronique, essoufflement, troubles neurocognitifs… Les symptômes du Covid long sont aussi variés que nombreux. En France deux millions de personnes en souffrent, selon une étude de Santé Publique France, parue en juillet 2022. Généralement, les troubles sont importants et persistants. 

Pourtant, une étude du British Medical Journal, parue le 11 janvier 2023, explique que « la plupart des symptômes », liés à une forme prolongée, mais légère du Covid tendent à disparaitre durant l’année qui suit l’infection. 

Plus de symptômes graves à long-terme

Selon les chercheurs, une grande partie des personnes atteintes d’infection bénigne « ne souffrent pas de symptômes graves ou chroniques à long terme », comme nous l’expliquions dans un précédent article.

Mais selon des médecins français, il faut être prudent quant aux résultats de cette étude : « C’est une étude rétrospective, ce qui signifie que l’on ne suit pas une cohorte de patients. […] En termes de fiabilité de résultats, il peut y avoir des biais », indiquait auprès d’actu.fr Jérôme Larché, docteur en médecine interne à Montpellier et spécialiste du Covid long, 

« Les résultats d’un tel article restent limités sur les maladies chroniques plus rares qui peuvent apparaître avec le Covid », nous expliquait Antoine Flahaut, épidémiologiste et directeur de l’Institut de santé globale de Genève. 

« Il est donc possible que ce type de désordres et d’incapacités ne se résolve pas spontanément après un an. »

À lire aussi

« Le sport, c’était toute ma vie »

Maud*, 45 ans, abonde. Elle a contracté le Covid il y a trois ans, au début de la pandémie. Et pourtant, de lourdes séquelles lui restent. « Même si je vais mieux, je n’ai pas du tout retrouvé la santé que j’avais avant. J’étais super sportive, je pratiquais la course à pied très régulièrement or, je ne suis plus qu’à 70 % de mes capacités d’avant« , explique cette chargée de relations presse à Rennes auprès d’actu.fr.

Vidéos : en ce moment sur Actu

Celle qui partait souvent le week-end avec son mari pour participer à des marathons ou des trails à l’étranger a mis entre parenthèse ce pan de sa vie. « Le sport, c’était toute ma vie. Pourtant, je ne pourrais peut-être plus jamais faire de marathons », se désole Maud.

J'ai du faire le deuil de mon ancienne vie.

MaudAtteinte du Covid long

Depuis qu’elle a attrapé le Covid, en mars 2020, la Rennaise souffre d’une dysphonie, après avoir contracté une péricardite.

« J’ai une paralysie du larynx à gauche, j’ai donc un handicap au niveau de ma voix, et de mon souffle. Je suis aussi devenue asthmatique, j’ai des douleurs articulaires, musculaires, inflammatoires… », énumère-t-elle.

Des symptômes qui évoluent 

Même son de cloche chez Lise, 39 ans. Elle aussi fait partie des premières personnes à avoir contracté le Covid, en mars 2020. « Et je suis loin d’en être sortie », se désole-t-elle, contactée par actu.fr.

Ses symptômes aussi sont persistants, et notamment ses troubles neurologiques : « J’ai des paresthésies au niveau des bras et jambes [une atteinte des fibres nerveuse, NDLR]. Je souffre d’un brouillard cérébral dont je n’arrive pas à me débarrasser. Une fatigue chronique qui n’évolue pas, ainsi que des problèmes respiratoires, sur lesquels j’ai tout de même progressé, même si je ne peux toujours pas reprendre le sport », raconte cette chargée de mission en projet européen.

Selon elle, les patients atteints de Covid long voient leurs symptômes évoluer : « C’est très fluctuant dans le temps, à des périodes, ils se manifestent moins, mais c’est persistant. Si l’on a l’impression que les symptômes diminuent, c’est aussi parce que l’on s’y habitue. »

À lire aussi

« On a toujours des séquelles »

Elle aussi était une femme très en forme, qui faisait du sport, et de nombreux déplacements en Europe pour son travail. 

Maintenant, je ne peux plus me déplacer comme ça, donc je m'adapte. Je ne peux plus reprendre une vie active comme avant. On a toujours des séquelles, il y a des périodes où c’est mieux, mais ça finit par revenir, on n’est jamais sûr de rien. On marche sur des œufs même trois ans après.

LiseAtteinte du Covid long

Au départ, lorsqu’elle attrape le virus, l’affection n’est pas sévère. « On m’a dit que j’étais jeune et que ça allait passer. Puis j’ai eu une atteinte au niveau respiratoire, des symptômes neurologiques qui sont apparus dans les deux mois qui ont suivi. Malheureusement, ils ne sont jamais partis », se remémore cette Bretonne. 

Finalement, après une année d’errance médicale, Lise met un nom sur ce mal qui l’atteint : le Covid long.

À lire aussi

S’habituer à la douleur

De son côté, Maud se sent chanceuse : certes, elle a perdu une partie de ses capacités sportives et cognitives, « mais je connais d’autres malades qui sont en fauteuil roulant, qui n’ont pas eu de prise en charge rapide et simple », ajoute-t-elle. Elle a pu bénéficier d’un suivi régulier, elle a des séances de kiné respiratoire et de nombreux examens très réguliers. 

Je ne sais pas si je vais mieux ou si je me suis habituée à la douleur. Mais en tout cas je vis avec. Et je me suis battue pour retrouver ma forme d'avant, et pouvoir recourir. Même si désormais, je cours moins longtemps, je refais du sport, c'est positif.

MaudAtteinte du Covid long

Forcément, depuis qu’elle est atteinte de Covid long, la vie de Maud a bien changé, et beaucoup d’habitudes sont devenues compliquées. « Même si je ressors, je ne revois plus mes amis, tout est plus dur. Si je passe une soirée avec des copains, c’est compliqué parce que je ne peux pas forcer ma voix ».

Alors quand tout le monde parle fort où qu’elle se trouve dans un bar bruyant, c’est « épuisant ». 

À lire aussi

Des patients plus fragiles

Pour son travail aussi, sa dysphonie est handicapante. En tant que chargée de relations presse, elle passe beaucoup de son temps au téléphone. « Mais j’ai la voix qui se coince, j’ai mal au larynx, à la gorge, c’est un frein quand on doit parler à des gens à longueur de journée ». 

Et puis plus globalement, Maud est beaucoup plus fragile. « J’ai eu un rhume il y a peu, et au lieu de finir au bout d’une semaine, ça a duré un mois et demi. Je récupère plus doucement. On a l’impression d’être devenus fragiles. J’ai aussi des problèmes de cycles [menstruels] que je n’avais pas avant. Alors quand j’entends que l’on peut récupérer nos capacités au bout d’un an, ça me met un peu en colère ! », tempête-t-elle. 

« On est sur le qui vive tout le temps, car le Covid atteint notre système immunitaire et nous affaiblit. Je connais des patients qui ont contracté des maladies auto-immunes », explique Lise.

Pour elle, beaucoup de théories sur le Covid long ont émergé depuis le début de la pandémie, « mais pas de consensus scientifique à l’heure actuelle, donc tant qu’il n’y a rien de concret, on est des cobayes« .

*Le prénom a été changé

Dernières actualités

France - Monde

Voir plus