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Pollution

La forte pollution du début de l'ère industrielle dévoilée par les peintures de Claude Monet et William Turner

Durant la révolution industrielle, l’exploitation du charbon a provoqué des niveaux de pollution atmosphérique sans précédent. Les œuvres de Turner et de Monet en portent des traces, révèlent deux chercheurs.

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Pluie, Vapeur et Vitesse – Le Grand Chemin de fer de l'Ouest (en anglais : Rain, Steam and Speed – The Great Western Railway) est un tableau de Joseph Mallord William Turner (1775-1851) réalisé en 1844.

Pluie, Vapeur et Vitesse – Le Grand Chemin de fer de l'Ouest (en anglais : Rain, Steam and Speed – The Great Western Railway) est un tableau de Joseph Mallord William Turner (1775-1851) réalisé en 1844.

© Ann Ronan Picture Library / Photo12 / AFP

Qu'elles soient réalistes ou impressionnistes, les peintures célèbres peuvent nous renseigner sur des phénomènes atmosphériques s'étant déroulées au moment de leurs créations. Anna Lea Albright (Université de la Sorbonne, Paris) et Peter Huybers (Université Harvard, Cambridge, Etats-Unis) se sont intéressés aux toiles de deux maîtres de l'impressionnisme : le Français Claude Monet (1840-1926) et le Britannique Joseph Mallord William Turner (1775-1851). Avec une question : comment certaines de leurs œuvres composées au moment de la révolution industrielle ont-elles reflété la pollution atmosphérique des deux côtés de la Manche ?

Les contrastes reflètent la pollution grandissante

Le choix de ces deux artistes a été dicté par le grand nombre de leurs toiles représentant des paysages champêtres ou urbains, les mêmes motifs se répétant souvent à quelques années d'intervalle.

Les historiens d'art avaient déjà noté que les styles des deux peintres avaient évolué dans la même direction : les contours de leurs sujets se sont fait plus diffus et leurs palettes de couleurs se sont progressivement éclaircies au fil du temps. Restait maintenant à déterminer à quel point leurs représentations pouvaient être un indicateur fiable de la pollution de l'air ambiant engendré par la combustion du charbon et le relargage massif dans l'atmosphère de dioxyde de soufre (SO2).

Pour ce faire, les deux chercheurs ont étudié 60 peintures à l'huile de Joseph Mallord William Turner datant de 1796 à 1850, et une quarantaine de peintures de Claude Monet réalisées de 1864 à 1901. Au préalable, ils ont dû mettre au point un étalonnage des contrastes lumineux à partir de photographies prises dans des conditions claires et polluées. En parallèle, et afin de rendre compte des variations de concentrations d'aérosol anthropogène, ils ont utilisé le CEDS ("Community Emissions Data System"), un inventaire des rejets atmosphériques d'origine humaine au cours du temps par pays et par secteur d'activité.

Résultat : au fur et à mesure que le taux de SO2 atmosphérique augmentait, les peintures de Turner et Monet sont devenues plus impressionnistes, leurs contrastes reflétant précisément la pollution grandissante.

Un  modèle applicable à d'autres villes polluées comme Pékin ou Delhi ?

Le modèle mis au point par les chercheurs a été appliqué à d'autres peintres et s'est avéré fiable dans l'évolution du travail du Français Gustave Caillebotte (1848-1894), du Franco-danois Camille Pisarro (1830-1903) et de la Française Berthe Morisot (1841-1895).

Les deux chercheurs souhaiteraient désormais étendre leurs travaux à des villes comme Pékin ou Delhi pour vérifier si l'art contemporain reflète également la pollution de ces mégapoles.

Depuis quelques années, les scientifiques adorent scruter les toiles de grands maîtres afin d'y déceler les indices de réels phénomènes ambiants. Ainsi, l'ondulation des cieux rougeoyants dans Le Cri d'Edvard Munch pourrait-il refléter l'explosion cataclysmique du volcan indonésien Krakatoa entré en éruption en 1883 de l'autre côté de la planète. Autre exemple avec le Paysage du soir au lever de lune de Vincent Van Gogh qui a pu être daté en 2003 par l'astronome Donald Olson au 13 juillet 1889, à exactement 21 heures et 8 minutes...

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