Violences faites aux femmes : les eurodéputés appellent les États membres à ratifier la Convention d’Istanbul

Le texte des députés européens appelle également à l’accès universel à un éventail complet de services de santé sexuelle et reproductive, à une éducation sexuelle adaptée à l’âge, à des services de planification familiale, à divers contraceptifs modernes et au droit à un avortement sûr et légal. [SHUTTERSTOCK/kikpokemon]

Les membres du Parlement européen ont voté mercredi (15 février) pour inciter les États membres de l’UE à ratifier la Convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, conformément à un arrêt de la Cour de justice européenne (CJUE) de 2021.

En 2017, le Conseil de l’Europe, dont le siège se situe à Strasbourg, a présenté cette Convention visant à prévenir les violences basées sur le genre, à renforcer la protection des victimes et à mettre fin à l’impunité des auteurs de ces violences.

Elle a été signée par l’UE cette même année, mais n’a jamais été ratifiée en raison de l’opposition de plusieurs États membres. La Bulgarie, la République tchèque, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie et la Slovaquie refusent toujours d’y adhérer.

L’avis de la Cour de justice de l’UE du 6 octobre 2021 a toutefois indiqué que l’Union européenne pouvait ratifier la Convention d’Istanbul sans avoir l’accord de tous les États membres, ouvrant ainsi la voie au vote de mercredi.

L’eurodéputée suédoise Arba Kokalari (Parti populaire européen, PPE), rapporteure de la commission des Droits des femmes et de l’Égalité des genres du Parlement, estime qu’« il est temps que l’UE ratifie la Convention d’Istanbul ».

« L’UE doit passer des paroles aux actes pour mettre fin aux violences basées sur le genre, protéger les victimes et punir les auteurs de violences. »

Le texte, adopté par 469 voix pour, 104 contre et 55 abstentions, indique que la Convention d’Istanbul reste la norme internationale et un outil essentiel pour éradiquer les violences basées sur le genre, y compris les violences domestiques, selon un communiqué de presse du Parlement publié à l’issue de la session.

Le texte des députés européens appelle également à l’accès universel à un éventail complet de services de santé sexuelle et reproductive, à une éducation sexuelle adaptée à l’âge, à des services de planification familiale, à divers contraceptifs modernes et au droit à un avortement sûr et légal.

Selon les députés, la mise en place de garanties pour les droits sexuels et reproductifs est considérée comme une manière de prévenir les discriminations et les violences basées sur le genre et s’aligne sur l’objectif de la Convention visant à protéger les femmes, les jeunes filles et les personnes LGBTQIA+.

Elle établit également des lignes directrices complètes pour la protection des femmes contre les violences domestiques et leur prévention.

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Une Convention controversée

En 2008, le processus de rédaction de la Convention a débuté avec un groupe d’experts mis en place par le Comité des ministres de la Justice du Conseil de l’Europe. Une fois le projet finalisé en 2010, la Convention a été soumise à signature en 2011 à Istanbul.

Outre les six États membres de l’UE qui ne l’ont pas encore ratifiée, la Convention a été largement critiquée par les conservateurs européens, et notamment le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, qui a demandé au Tribunal constitutionnel polonais « d’examiner si la Convention est conforme à la Constitution polonaise », selon Reuters.

La Pologne a également débattu de son retrait de la Convention d’Istanbul et a annoncé son intention de s’en retirer en raison de craintes qu’elle n’entraîne un enseignement des questions de genre aux enfants dans les écoles.

En 2022, la Turquie s’est retirée de la Convention avec le soutien du plus haut tribunal administratif du pays, a rapporté le Stockholm Center for Freedom (SCF).

Balázs Hidvéghi, un député européen hongrois du parti Fidesz au pouvoir, a également remis en question la Convention mercredi. Il a accusé le Parlement européen de pression idéologique et de violation des compétences nationales lors du débat sur la Convention d’Istanbul, selon Hungary Today.

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Une violence épidémique

Selon les données du Parlement européen, environ 62 millions de femmes ont subi des violences physiques et sexuelles en Europe. En outre, 44 % des femmes ont subi des violences psychologiques de la part d’un partenaire au cours de leur vie, selon l’Agence européenne des droits fondamentaux (FRA).

Par ailleurs, plus de la moitié des femmes de l’UE (55 %) ont été victimes de harcèlement sexuel au moins une fois depuis l’âge de 15 ans.

Łukasz Kohut, eurodéputé polonais du groupe des Socialistes et Démocrates (S&D), rapporteur de la commission des Libertés civiles, de la Justice et des Affaires intérieures (LIBE), a déclaré que la violence devait cesser.

« Il y a six ans, l’UE a signé la Convention d’Istanbul, qui a pour objectif de prévenir les violences, de protéger les victimes et de poursuivre les auteurs de violences… La réalité — à savoir que les violences se produisent dans de nombreux foyers — doit changer rapidement. »

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[Édité par Anne-Sophie Gayet]

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