Toutes les deux minutes dans le monde, une femme meurt pendant sa grossesse ou en accouchant

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Toutes les deux minutes dans le monde, une femme meurt pendant sa grossesse ou en accouchant

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La mortalité maternelle touche en majeure partie les pays en développement d'Afrique subsaharienne et d'Asie du Sud.
La mortalité maternelle touche en majeure partie les pays en développement d'Afrique subsaharienne et d'Asie du Sud.
© AFP - ZOOM DOSSO / AFP

Selon plusieurs rapports des agences de l'ONU, environ 830 femmes meurent chaque jour dans le monde du fait de complications liées à la grossesse ou à l’accouchement. Une mortalité maternelle qui a très peu diminué ces dernières années.

Les femmes dans le monde continuent de mourir massivement de complications liées à leurs grossesses ou leurs accouchements. Plusieurs rapports publiés ce jeudi 23 février par l'ONU  sur la mortalité maternelle et dévoilés par l'Organisation mondiale de la santé montrent que,  toutes les deux minutes, une femme meurt pendant sa grossesse ou en accouchant. La majeure partie de ces décès se sont produits dans des pays en développement et la plupart auraient pu être évités, selon l'OMS. Fait notable, ces dernières années, ce taux de mortalité stagne dans presque toutes les parties du monde.

"Alors que la grossesse devrait être une période d'immense espoir et une expérience positive pour toutes les femmes, elle reste tragiquement une expérience terriblement dangereuse pour des millions de personnes dans le monde qui n'ont pas accès à des soins de santé de haute qualité et respectueux", a déclaré le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'Organisation mondiale de la santé.

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287 000 décès maternels dans le monde en 2020

Les rapports de différentes agences onusiennes montrent qu'il y a eu environ 287.000 décès maternels dans le monde en 2020. Un chiffre en très légère baisse par rapport aux 309.000 de 2016. Si l'on observe des progrès significatifs dans la réduction des décès maternels entre 2000 et 2015, les gains sont largement au point mort, voire dans certains cas inversés.

Dans les zones Europe/Amérique du Nord et Amérique latine/Caraïbes, le taux de mortalité maternelle a augmenté de 2016 à 2020, de 17% et 15% respectivement. Ailleurs, le taux a stagné. Le rapport note toutefois que des progrès sont possibles. Par exemple, les zone Australie/Nouvelle-Zélande et en Asie centrale et méridionale ont connu des baisses significatives : de 35% et 16% respectivement de leurs taux de mortalité maternelle au cours de la même période, tout comme 31 pays à travers le monde.

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En Afrique subsaharienne, selon l'OMS, un certain nombre de pays ont réduit de moitié le taux de mortalité maternelle depuis 1990. Des progrès encore plus considérables ont été réalisés dans d’autres régions, dont l’Asie et l’Afrique du Nord. Entre 1990 et 2015, le taux mondial de mortalité maternelle, soit le nombre de décès maternels pour 100.000 naissances vivantes, n’a diminué que de 2,3% par an.

99% des décès maternels ont lieu dans des pays en développement

Ces taux de mortalité particulièrement élevés s'expliquent avant tout par l'inégalité de l'accès aux soins dans de nombreuses régions du monde. Ainsi, 99% des décès maternels se produisent dans des pays en développement, dont plus de la moitié en Afrique subsaharienne et près d'un tiers en Asie du Sud, souligne l'OMS. Plus de la moitié de ces décès ont lieu dans des régions plongées dans des crises humanitaires.

En 2020, environ 70% de tous les décès maternels se sont produits en Afrique subsaharienne. Dans neuf pays confrontés à de graves crises humanitaires, les taux de mortalité maternelle étaient plus du double de la moyenne mondiale : 551 décès maternels pour 100.000 naissances, contre 223 dans le monde.

Ce risque de mortalité maternelle est particulièrement élevé chez les adolescentes de moins de 15 ans en raison du risque majeur de développer des complications au cours de la grossesse ou de l’accouchement, dans la plupart des pays en développement.

"En moyenne, dans ces pays, les femmes ont beaucoup plus de grossesses que dans les pays développés", note l'OMS, ce qui multiplie le risque de mourir du fait d’une grossesse au cours de leur vie. Ainsi, la probabilité qu’une jeune femme décédera un jour d’une cause liée à la grossesse ou à l’accouchement est de 1 sur 4.900 dans les pays développés, contre 1 sur 180 dans les pays en développement. Ce risque est encore plus fort dans les pays connus pour leur fragilité : il s'élève à 1 pour 54, à cause notamment de l’effondrement des systèmes de santé dans ces zones.

La plupart des complications pourraient être évitées

"Ce rapport nous rappelle brutalement à nouveau l'urgente nécessité de redoubler d'efforts dans notre engagement en faveur de la santé des femmes et des adolescents", selon Juan Pablo Uribe, directeur mondial de la santé, de la nutrition et de la population à la Banque mondiale et directeur du Mécanisme de financement mondial.

En effet, d'après l'Organisation mondiale de la santé, la majeure partie des complications qui apparaissent durant la grossesses et qui causent ces décès pourraient être évitées ou traitées. Les principales complications, qui représentent 75% de l’ensemble des décès maternels, sont : des hémorragies sévères, pour l’essentiel après l’accouchement, des infections, de l'hypertension durant la grossesse; des complications dues à l'accouchement ou des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité. D'autres complications sont également liées à des maladies comme le paludisme et le VIH durant la grossesse.

Face à ce constat, l'OMS assure dans son rapport que, "toutes les femmes doivent avoir accès aux soins prénatals pendant la grossesse, bénéficier de l’assistance d’un personnel qualifié lors de l’accouchement et recevoir des soins et un soutien au cours des semaines qui suivent cet accouchement."

Une hémorragie sévère après la naissance de l’enfant peut tuer une femme en bonne santé en deux heures seulement si celle-ci ne bénéficie d’aucune assistance. "L’injection d’ocytocine immédiatement après l’accouchement réduit de manière efficace le risque d’hémorragie", souligne l'OMS. De même, le risque d’infection après l’accouchement peut être supprimé par la pratique d'une bonne hygiène et si les premiers signes d’infection sont reconnus et traités rapidement.

2,7 millions de nouveau-nés sont décédés en 2015

Conséquence directe de la mauvaise prise en charge des grossesses, la mortalité des nouveaux-nés particulièrement élevées dans de nombreuses régions du monde. Ainsi d'après l'OMS, on estime qu'environ 2,7 millions de nouveau-nés sont décédés en 2015 et 2,6 millions d’autres enfants sont mort-nés. "Il est fondamental que toutes les naissances aient lieu en présence de professionnels de la santé compétents, car une prise en charge et un traitement rapides peuvent sauver la vie de la mère et de l’enfant", milite l'organisation.

Pour limiter les risques liées aux grossesses, l'OMS assure également qu'il est primordial de prévenir les grossesses non désirées ou trop précoces. "Toutes les femmes, y compris les adolescentes, doivent avoir accès à la contraception, à l’avortement dans de bonnes conditions de sécurité dans le plein respect du cadre législatif et à des soins de qualité suivant l’avortement", assure le rapport.

Améliorer l'accès à des services de santé maternelle de qualité

Le rapport de l'OMS souligne que les femmes pauvres qui vivent dans des zones reculées ont le moins de chances de recevoir des soins médicaux appropriés. Cela est particulièrement vrai dans les régions où il y a peu de professionnels de santé, comme en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud. Aujourd'hui encore, seules 51% des femmes des pays à faible revenu bénéficient d'une aide médicale qualifiée lors de l’accouchement. Autrement dit, des millions de naissances ont lieu sans l’assistance d’une sage-femme, d’un médecin ou d’une infirmière. Un phénomène aggravé par la pandémie de Covid-19.

Environ un tiers des femmes ne subissent même pas quatre des huit contrôles prénatals recommandés ou ne reçoivent pas de soins postnatals essentiels, tandis que quelque 270 millions de femmes n'ont pas accès aux méthodes modernes de planification familiale.

L'OMS préconise ainsi l’utilisation de traitements plus efficaces et d’un coût plus abordable des soins mais aussi un meilleur accompagnement des pays concernés. "Nous pouvons et devons faire mieux en investissant d'urgence dans la planification familiale et combler la pénurie mondiale de 900.000 sages-femmes afin que chaque femme puisse obtenir les soins vitaux dont elle a besoin", assure la directrice exécutive du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), la docteure Natalia Kanem.

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