Bangladesh : la pollution atmosphérique réduit de huit ans l'espérance de vie
Dhaka, autrefois entourée d'arbres, n'est plus qu'une mégapole entièrement bétonnée. Image via Flickr par ASaber91. CC BY 2.0.
Les habitants de Dhaka, la capitale du Bangladesh, ont vécu un mois de janvier très difficile ; durant neuf jours, la pollution atmosphérique s'est maintenue à un niveau très élevé, le plus dangereux depuis ces sept dernières années. Un indice de qualité de l'air (IQA) égal ou inférieur à 50 correspond à une bonne qualité de l’air alors qu’un indice compris entre 201 à 300 est qualifié de « Très Mauvais » pour la santé. Une valeur supérieure à 300 indique une qualité de l'air extrêmement nocive, susceptible d’avoir de vastes répercussions au sein de la population, et d'entrainer des symptômes respiratoires modérés ou graves chez les groupes sensibles.
À Dhaka, la pollution atmosphérique est un problème de longue date qui ne fait qu’empirer. Des études montrent que les habitants de la mégapole respirent régulièrement un air très pollué, réduisant leur espérance de vie de sept à huit ans en moyenne.
À cause de l'absence de pluie, le mois de janvier au Bangladesh est réputé pour sa mauvaise qualité de l'air. Le centre d'études de la pollution atmosphérique de l'université de Stamford souligne qu’au mois de janvier 2017, la pollution a atteint un niveau «désastreux» durant cinq jours. Puis entre 2017 et 2022, cette durée a nettement augmenté passant de quatre jours en 2017 à huit en 2022.
Pourquoi la qualité de l'air à Dhaka est-elle si mauvaise ?
Une part importante de la pollution atmosphérique à Dhaka provient de trois sources: les fours à briques traditionnels, les particules de poussière présentes dans l'air pendant la saison hivernale et les gaz d'échappement des véhicules.
Dans la banlieue de la capitale, plus d'un millier de fours à briques traditionnels génèrent une quantité importante de pollution atmosphérique. Les fumées et les déchets industriels, la mauvaise gestion des déchets solides, l’incinération des ordures et les gigantesques projets de construction dans toute la ville contribuent eux aussi à la pollution de l'air.
Le centre de recherche sur la qualité de l'air du département de chimie de l'université de Dhaka a étudié les sources de pollution atmosphérique et conclu que la poussière et le smog représentent la moitié de la pollution de la ville. Le smog est composé de fumée et de fines particules provenant de la combustion de biomasse comme la paille, le bois et l’ivraie. Quant à la poussière, elle est produite par les chantiers de construction et les véhicules vieillissants.
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Beaucoup pensent que les gigantesques travaux de construction, tels que le réseau de métro de Dhaka, ont également augmenté la pollution de l'air dans la ville. Image via Wikipedia par Selim Khandoker. CC BY-SA 4.0.
Durant l’hiver, le nombre de chantiers augmente considérablement, car il n y a pas de pluie. Mais la mauvaise gestion de l'excavation des sols et l’élimination inadéquate des déchets de construction favorisent encore plus la présence élevée de particules de poussière dans l'air.
De plus, l’incinération systématique des ordures encourage la pollution atmosphérique, comme l'indique UNICEF Bangladesh sur Twitter :
The burning of garbage in the Buriganga area of #Dhaka is a significant contributor to hazardous levels of air pollution.
Our future.
Our responsibility.#COP25 #ClimateAction© UNICEF/Khan pic.twitter.com/qR3uA4KMDx
— UNICEF Bangladesh (@UNICEFBD) December 13, 2019
À cause de l'incinération des déchets dans le quartier de Buriganga, la pollution atmosphérique à #Dhaka atteint des niveaux très dangereux.
Notre avenir.
Notre responsabilité.#COP25 #ClimateAction© UNICEF/Khan pic.twitter.com/qR3uA4KMDx
— UNICEF Bangladesh (@UNICEFBD) 13 décembre 2019
Le journal The Daily Star a indiqué sur Twitter que les niveaux de pollution atmosphérique sont particulièrement élevés dans les zones où d'importants chantiers sont actuellement en cours, et sont surtout nocifs pour les personnes coincées dans les embouteillages lors de leurs déplacements quotidiens :
The sites with major construction and persistent traffic in Dhaka city have the highest level of air pollution.#Bangladesh #AirPollution https://t.co/YXiyFSXWyV
— The Daily Star (@dailystarnews) December 4, 2022
Les grands chantiers de construction de Dhaka et la congestion du trafic enregistrent à eux seuls le niveau le plus élevé de pollution atmosphérique. #Bangladesh #AirPollution https://t.co/YXiyFSXWyV
— The Daily Star (@dailystarnews) 14 décembre 2022
« Vivre à Dhaka devient très difficile »
Dhaka, avec près de vingt millions d'habitants, est la quatrième ville d'Asie du Sud par sa population. Depuis l'indépendance du Bangladesh en 1971, la capitale a connu une croissance exponentielle grâce la réalisation de nombreux projets d'infrastructure et d'urbanisation, incitant les habitants de villages et autres villes à venir s'y installer. Afin de rendre la ville plus agréable à vivre, le gouvernement a lancé plusieurs grands projets de développement tels que le métro (Dhaka Metro Rail) et une autoroute surélevée (Dhaka Elevated Expressway).
Dans un message sur Facebook, l'économiste Anu Muhammad explique que la pollution atmosphérique de Dhaka est la conséquence directe du « développement » :
যে ধারায় ‘উন্নয়ন’ হচ্ছে মানুষের এই বিষাক্ত যাত্রা তারই ফল। বিশুদ্ধ নিরাপদ বাতাস, নিরাপদ পানি, নিরাপদ খাবার, নিরাপদ জীবন সবই এখন ধরাছোয়ার বাইরে চলে যাচ্ছে। শুধু থাকছে ‘উন্নয়নের’ পরিসংখ্যান!
Les habitants de Dhaka se sont faits manipuler par l’engouement actuel pour le « développement ». L’air frais et sain, l’eau potable, la salubrité des aliments et une vie sans danger sont à présent hors de portée ! Il ne reste plus que les statistiques de ce « développement » !
Syeda Rizwana Hasan, directrice de Bangladesh Environmental Lawyers Association (BELA) (une association de juristes de l'environnement du Bangladesh ), l'un des 40 «Héros de l'environnement » nommés par le TIME magazine et lauréate du prix Goldman pour l'environnement (2009), attribue elle aussi la pollution atmosphérique de Dhaka à des projets de développement non planifiés :
সরকার চাইলে উন্নয়ন প্রকল্পগুলো জবাবদিহির আওতায় এনে বায়ুদূষণ কমাতে পারতো। গাছ লাগিয়ে, জলাশয়গুলো রক্ষা করেও বায়ুদূষণ নিয়ন্ত্রণ করা যেত। বায়ুদূষণ মানুষের জীবনের অধিকারের ওপর হস্তক্ষেপ করছে, মরণের দিকে ঠেলে দিচ্ছে, মানুষকে কঠিন কঠিন অসুখ দিচ্ছে। এদিকে আমরা ন্যূনতম মনোনিবেশ করছি না।
Le gouvernement aurait pu réduire la pollution atmosphérique en responsabilisant les projets de développement. Planter des arbres et protéger les plans d’eau peuvent aussi aider à lutter contre la pollution, laquelle porte atteinte au droit à la vie, provoque des maladies graves et entraîne la mort. Et nous n'en sommes pas conscients.
La militante écologiste Farzana Faruk Jhumu mentionne sur Twitter que « vivre à Dhaka devient chaque jour de plus en plus difficile » :
Living in Dhaka is getting harder every day with the air pollution. #AirPollution https://t.co/2OxeRsK17K
— FARZANA FARUK JHUMU (@FarzanaJhumu) February 9, 2022
Vivre à Dhaka devient chaque jour de plus en plus difficile à cause de la pollution de l'air. #AirPollution https://t.co/2OxeRsK17K
— FARZANA FARUK JHUMU (@FarzanaJhumu) 19 février 2022
La pollution, cause de maladies
Une exposition prolongée et chronique à la pollution atmosphérique a des effets à long terme sur la population, sous forme de maladies et de détérioration de l’état de santé mentale. Dans les hôpitaux publics et privés, le nombre de patients souffrant de maladies respiratoires est en hausse. Les maladies à transmission vectorielle (comme la dengue) sont aussi en augmentation chez les habitants de la capitale et beaucoup souffrent d’une détérioration de leur état mental.
Au mois de novembre 2022, la Banque mondiale a publié une étude (« Breathing Heavy : New Evidence on Air Pollution and Health in Bangladesh ») selon laquelle près de 88 000 personnes décèdent chaque année au Bangladesh à la suite de maladies liées à la pollution atmosphérique.
Bien que le ministère de l'Environnement ait mené une campagne de lignes directrices relatives à la prévention de la pollution en identifiant ses causes, le gouvernement n’a annoncé aucune initiative d'envergure pour tenter de la réduire, à l'exception de l'arrosage des routes pour empêcher la poussière de se répandre dans l’air.
