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Terran 1, la première fusée entièrement imprimée en 3D bientôt lancée dans l'Espace

© Relativity

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Par Eric Boever

Non, ce n’est pas de la science-fiction, une fusée entièrement fabriquée à partir d’imprimantes 3D sera prochainement lancée dans l’Espace. 

Terran 1, c’est son nom, préfigure peut-être ce que seront les fusées dans l’avenir : des engins fabriqués dix fois plus rapidement et avec cent fois moins de pièces qu’une fusée classique grâce au mariage de l’intelligence artificielle, de la robotique et de l’impression 3D.

L’étape suivante sera la fabrication d’une fusée entièrement recyclable. Destination : l’Espace, la Lune et peut-être un jour Mars !

Un premier essai de lancement a eu lieu ce mercredi soir, depuis la Floride. Il a été interrompu pour des raisons techniques. Un deuxième lancement devrait avoir lieu dans les prochains jours. 

L’impression 3D permet de diviser par 100 le nombre de pièces nécessaires

Vous avez sans doute déjà vu ou manipulé un objet sorti d’une imprimante 3D mais voilà qu’on franchit un pas supplémentaire. Après des années de recherche et d’essais, la société américaine Relativity Space a réussi à fabriquer une fusée 3D capable d’aller dans l’Espace et d’y emmener des satellites, voire un jour des astronautes.

Cette prouesse technologique a été réalisée en utilisant la plus grande imprimante 3D métal au monde, Stargate, située à Los Angeles.

Principaux avantages, la rapidité et la simplification du processus de fabrication. Il faut 60 jours à peine pour produire la fusée Terran 1, à partir de la matière première jusqu’au vol. C’est dix fois plus rapide que pour un engin classique.

Et surtout, en fusionnant l’impression 3D, l’intelligence artificielle et la robotique autonome, Relativity Space parvient à imprimer la structure et les moteurs de ses fusées, ce qui permet de réduire considérablement les points de contact et le nombre de pièces utilisées.

La fabrication de Terran 1 nécessite ainsi cent fois moins de pièces que d'habitude et n’exige aucun outillage fixe, ce qui, selon la société, entraîne "une simplification de la chaîne d’approvisionnement et une augmentation de la fiabilité globale du système."

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La nouveauté se situe aussi au niveau du carburant puisque la première fusée imprimée en 3D au monde visera également à devenir le premier véhicule alimenté au méthane à atteindre l’orbite. 

Pour Pierre-Emmanuel Paulis, instructeur au Space Center de Redu et président de la Mars Society Belgium, cette aspect est loin d'être anodin, il est même hautement stratégique : "Remplacer l'oxygène et l'hydrogène liquide par du méthane constitue une avancée majeure en vue de la conquête de Mars car que trouve-t-on à la surface de Mars? Du méthane! Et donc, cela permettrait à de futurs engins spatiaux de faire le plein de carburant pour un voyage retour".  

Etape suivante, la fusée 100% réutilisable capable d’aller sur Mars

Relativity Space ne compte pas s’arrêter là. Après Terran 1, la première fusée imprimée en 3D, son usine du futur devrait produire Terran R, la première fusée 3D entièrement réutilisable, elle aussi produite en 60 jours. Créée également dans l’usine du futur de Relativity, Terran R sera capable de lancer plus de 20 000 kg en orbite terrestre basse (LEO) et elle sera donc entièrement réutilisable, y compris ses moteurs, son premier étage, son deuxième étage et sa coiffe.

Cette fusée de l’avenir possède des caractéristiques aérodynamiques uniques avec des structures générées et optimisées par algorithme. Comme l’affirme le site de la société : "Le processus d’impression 3D exclusif de Relativity est rendu possible par les logiciels brevetés, les matériaux exotiques imprimés en 3D et les géométries de conception uniques qui ne sont pas possibles avec la fabrication traditionnelle". Bref, en développant ensemble son usine du futur et ses fusées 3D, Relativity Space voit l’avenir en grand : "nous bouleversons 60 ans d’aérospatiale".

Confirmation par Pierre-Emmanuel Paulis : "Nous sommes en train de vivre une véritable révolution technologique dans le secteur spatial. Ces imprimantes 3D sont l'avenir, elles sont fiables, elles utilisent du métal, on est donc loin des matériaux en plastique qui ne supporteraient pas la vitesse de 28.000 kilomètres/heure d'une fusée, leur bilan carbone est beaucoup moins important que les procédés traditionnels de fabrication des fusées, bref l'impression 3D n'a que des avantages, d'ailleurs le monde entier y investit, que ce soit en Europe ou en Chine."

Si tout va bien, Terran R sera lancé depuis Cap Canaveral à partir de 2024

Et pourquoi pas des voitures, des pantalons ou des pizzas imprimés en 3D ?

A quoi serviront ces fusées 3D ? En tant que lanceur de nouvelle génération, Terran 1 est conçu pour assurer le déploiement et le réapprovisionnement des engins évoluant dans l’Espace. Son ambition est de jouer un rôle majeur dans l’exploration spatiale et de concurrencer les acteurs actuels, à commencer par la société SpaceX d’Elon Musk.

Pour cela, Relativity estime avoir de bons arguments : "Notre architecture révolutionnaire, unique et pilotée par logiciel est capable de répondre aux besoins changeants des clients désireux d’envoyer des satellites dans l’Espace, tout en fournissant le service de lancement le plus agile et le plus abordable du marché. Conçu et imprimé aux États-Unis, Terran 1 est le produit le plus innovant issu de l’industrie aérospatiale depuis l’aube de la privatisation de l’espace il y a 20 ans. "

Et la future version R de Terran aura une ambition encore plus affirmée en proposant d’assurer le lancement de satellites de nouvelle génération et un transport multiplanétaire : "Terran R offrira aux clients commerciaux et gouvernementaux un accès abordable à l’Espace, en orbite basse et au-delà. Terran R aide à répondre à l’intérêt croissant du secteur commercial pour l'Espace et offrira également à terme aux clients un cargo spatial capable de missions " point à point " entre la Terre, la Lune et Mars. "

Mais pour Pierre-Emmanuel Paulis, l'utilisation de la 3D ne fait que commencer : "SpaceX fabriquait déjà les combinaisons de ses spationautes en impression 3D, on passe maintenant aux fusées, c'est incroyable mais je suis persuadé que d'autres développements suivront, par exemple pour d'autres moyens de locomotion plus terrestres, mais aussi dans le domaine vestimentaire ou même alimentaire. On portera des vêtements ou on mangera des pizzas sortis d'imprimantes 3D. Vous savez, notre vie en 2023 ne serait pas la même sans les avancées technologiques générées par la conquête spatiale, eh bien cela va continuer. Nous sommes à l'aube d'une révolution inimaginable". 

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