Pour économiser de l'eau, les maires de certaines communes sont contraints d'interdire la construction de nouvelles piscines et parfois même de stopper net tout nouveau projet d'habitation. Ces décisions radicales sont une nouvelle étape dans la sobriété subie face au dérèglement climatique.

"L’été dernier, c’était la première fois que le réseau d’eau arrivait à zéro, nous avons été très marqués", témoigne auprès de Novethic Stessy Speissman, le maire de Gerardmer, dans les Vosges. Face au manque d’eau, il compte interdire la construction de nouvelles piscines dès qu’il aura obtenu l’accord de l’ensemble des élus de sa commune. "Les piscines c’est du luxe, du superflu. Nous avons la chance d’avoir le lac pour se baigner. Ce sera une interdiction pure et simple inscrite dans le Plan Local d’Urbanisme" explique-t-il.
Son cas n’est pas isolé. Depuis le début de l’année 2023, de nombreux maires en France ont déjà mis en place de telles décisions drastiques. À Elne, dans les Pyrénées-Orientales, la construction de nouvelles piscines est interdite par arrêté reconductible, au moins jusqu’en avril 2023. Dans le Var, selon France 3, neuf communes envisagent des décisions similaires. D’autres communes vont même plus loin et refusent la construction de nouvelles habitations. C’est un énième signe de la sobriété nécessaire face au dérèglement climatique rapide.

"On dépasse la limite"


"Ça suffit, on dépasse la limite", lance le maire de Gerardmer. Pour la première fois l’été dernier, la commune a dû pomper l’eau du lac pour s’approvisionner. Des activistes avaient troué des spas privatifs toujours en marche pour alerter sur le besoin d’économiser l’eau. "Les restrictions d’eau ont lieu de plus en plus tôt chaque année. Dès mai, nous allons restreindre l’arrosage, le nettoyage des pavés, la mise à niveau des piscines et des spas…", explique Stessy Speissman. En mars 2023, après les sécheresses de l’hiver, le niveau d’eau du lac est aussi bas qu’au mois de mai habituellement.
Le maire de Gerardmer va aussi interdire les constructions de nouvelles habitations dans les coteaux qui entourent le lac. Ces derniers ont connu un essor urbanistique rapide entre 2018 et 2020. "Ce sont à 80% des résidences secondaires ou des locations saisonnières avec une eau utilisée pour le loisir, par exemple avec des spas, c’est pour ça qu’on accélère", explique Stessy Speissman.

Un coup d’arrêt pour l’urbanisme


De plus en plus de villes donnent un coup d’arrêt à l’urbanisme face aux pénuries d’eau. Plusieurs maires du pays de Fayence ont suspendu les permis de construire pour une durée de 4 ans. Egalement, le préfet de l’Ardèche vient de demander à 22 communes de ne plus accepter de permis de construire pouvant affecter les ressources en eau, selon France Bleu, afin de pousser les mairies à trouver de nouvelles solutions. 
"Nous avions déjà refusé un permis pour un centre de loisirs autour de l’eau", témoigne auprès de Novethic Guy Massot, le maire de Vallon Pont d’Arc, l’une des communes concernées. Il mise aussi sur une tarification plus élevée en été pour décourager la consommation d’eau de loisir, dont il ne connaît pas la part exacte, et sur une mutualisation des ressources avec d’autres communes mieux dotées.
"L’interdiction des piscines fait partie d’un ensemble de mesures. Il n’y a pas un grand nombre de piscines à Gerardmer, seulement 2 ou 3 nouvelles par an. Mais c’est un symbole, et il faut peut-être des symboles pour sensibiliser l’ensemble de la population", explique Stessy Speissman. Selon lui, moins de 20% de l’eau est utilisée par des particuliers. Le reste sert à la production d’énergie et à l’industrie. Des secteurs qui doivent aussi s’adapter en urgence pour ne pas subir, comme en 2022, des fermetures forcées
Fanny Breuneval

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