Retraites : l'IGPN saisie après des menaces proférées par des policiers sur de jeunes manifestants

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Retraites : l'IGPN saisie après des menaces proférées par des policiers sur de jeunes manifestants

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Lors de la sixième soirée de mobilisation contre la réforme des retraites suite au recours d'Elizabeth Borne au 49.3.
Lors de la sixième soirée de mobilisation contre la réforme des retraites suite au recours d'Elizabeth Borne au 49.3.
© AFP - Claire Serie

Une enquête est ouverte après le dérapage de plusieurs policiers de la BRAV-M, cette brigade motorisée à Paris. L’IGPN, la police des polices va être saisie, après des humiliations et des insultes proférées contre des manifestants.

L’inspection générale de la police nationale (IGPN) est saisie, annonce le préfet de police Laurent Nuñez après les menaces et intimidations proférées par des policiers contre de jeunes manifestants à Paris. Celles-ci ont été révélées dans un enregistrement sonore obtenu par Le Monde et le site Loopsider. Des commentaires à caractère sexuel, des intimidations, des menaces, des gifles : le comportement de ces policiers va à l'encontre de leurs règles déontologiques.
Le préfet de police "a décidé de saisir l'IGPN" après l'"enregistrement sonore d'une intervention de police lors d'une manifestation à Paris le 20 mars", a tweeté la préfecture de police. Il s'agit d'une enquête administrative.

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Des propos humiliants

Un groupe de sept manifestants a été interpellé et placé en garde à vue lundi soir à Paris, en marge d’une manifestation contre la réforme des retraites. Ils sont assis par terre, dos au mur, à l’angle des rues des Minimes et du Béarn, dans le 3e arrondissement de la capitale, selon Le Monde. Ces jeunes sont soupçonnés par les policiers d’avoir participé à des dégradations. L’un d’entre eux a enregistré leurs échanges avec des policiers de la BRAV-M, cette unité décriée pour ses méthodes d'intervention musclées.

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On y entend les fonctionnaires enchaîner les propos humiliants, menaçants et intimidants, notamment envers l'un des sept jeunes. Sur une photo diffusée sur les réseaux sociaux, montrant la scène, ils sont une douzaine de policiers. "La prochaine fois qu'on vient, tu ne monteras pas dans le car pour aller au commissariat, tu vas monter dans un autre truc qu'on appelle ambulance pour aller à l'hôpital", peut-on notamment entendre dans l'enregistrement.

"On va se venger sur d'autres"

Dans cet enregistrement audio de 23 minutes, deux bruits de gifles sont également audibles, avant que l'un des policiers ne lance: "Tu commences à bégayer ! T'en re-veux peut-être une, que je te remette la mâchoire droite ?". "J'espère que demain t'es déferré, tu vas prendre quoi six mois ? Six mois c'est bien et une OQTF (obligation de quitter le territoire)", dit un autre policier au jeune homme, de nationalité tchadienne. Alors qu'un de leurs responsables les informe qu'ils doivent se déplacer dans un autre quartier de Paris, l'un des policiers conclut : "Tu as de la chance, on va se venger sur d'autres personnes."

"Ils sont une vingtaine à moto et ils me tombent dessus", témoigne pour franceinfo Salomé, 22 ans, une des manifestantes arrêtées par la BRAV-M. "Ils me balayent, je tombe sur le dos. Quand j'étais au sol, j'ai reçu un 'Connasse, connasse'. J'ai dit : 'Comment ?' Il m'a dit 'Ta gueule' et ils me font m'aligner avec six autres personnes. C'était vraiment un florilège d'insultes gratuites et de menaces. Des menaces physiques en disant qu'on pouvait être contents en fait, parce qu'un autre soir, ils nous auraient pété les genoux."

Le préfet de police de Paris "choqué"

"Ces propos sont graves et déontologiquement posent des problèmes très graves", a affirmé Laurent Nunez vendredi soir sur France 5 dans l'émission C à vous. La saisine de l'IGPN est "la première décision" que le préfet a prise en écoutant les propos formulés dans la vidéo. "Quand j'entends cette vidéo, je suis comme tout le monde, très choqué", insiste le préfet.

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"Nous sommes extrêmes rigoureux sur l'application des règles déontologiques", tient à souligner Laurent Nunez. "Nous soutenons les policiers", assure le préfet*."Ce qu'ils font en ce moment, c'est remarquable, surtout quand on voit la violence qu'ils ont à subir. Et ils font face, et ils tiennent le coup."* Le préfet salue les forces de l'ordre qui sont "très courageux". "C'est très compliqué de pouvoir travailler quand on prend des pavés, des boulons, des cocktails Molotov." "Mais nous exigeons en contrepartie une déontologie qui soit irréprochable", rappelle le préfet. Pour Laurent Nuñez, "il n'est pas question que je propose sa dissolution" (de la BRAV-M*)*, a-t-il déclaré sur franceinfo.

"Je ne peux pas juger", pour le syndicat Alliance

"Pour l'instant on n'a rien. On a juste un entretien, un fond sonore où on entend des collègues parler", a déclaré sur franceinfo Yannick Landreau, délégué national du syndicat Alliance police nationale. Yannick Landreau confirme avoir entendu l'enregistrement sonore : "Je ne juge pas les propos mais il nous faut encore avoir l'ensemble de l'enquête et des auditions des collègues pour juger et pour connaître les conclusions." "Je ne peux pas juger. Je ne peux pas dire ce qu'il en est", poursuit-il. "Le préfet Nuñez a diligenté une enquête administrative. Quand il y a une enquête administrative on est obligés d'attendre les conclusions".

"Sur les BRAV-M, il y a un dossier qui est assez accablant. C'est vraiment indispensable pour la police nationale de commencer ouvrir le couvercle et de commencer à faire le ménage", rétorque Sébastian Roché, directeur de recherche au CNRS, spécialiste des questions de police et de sécurité. Le chercheur pointe "une masse de dysfonctionnements dans la police française" que l'administration ne peut pas "nier". Le chercheur "souhaite que la police renoue des contacts positifs avec les citoyens" et qu'elle "accepte la critique".

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