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Police-Justice

Sainte-Soline: un opérateur du Samu dit avoir eu ordre de ne pas envoyer des secours, la préfète s'explique

Selon Le Monde, un opérateur du Samu affirme ne pas avoir eu l'autorisation d'intervenir à Sainte-Soline, alors que la LDH demandait l'évacuation d'un blessé. La préfète des Deux-Sèvres explique qu'un tel ordre a pu être donné seulement pour éviter que le Samu ou les pompiers ne soient pris à partie.

Un enregistrement obtenu par Le Monde et qui met le feu aux poudres, alors que deux manifestants gravement blessés à Sainte-Soline sont toujours entre la vie et la mort. Ce mardi soir, le quotidien a publié la transcription d'un appel téléphonique, enregistré par la Ligue des droits de l'Homme, entre un médecin de l'association et un opérateur du Samu lors de la manifestation contre les méga-bassines, dans les Deux-Sèvres.

Samedi 25 mars, le médecin de la LDH, généraliste en centre de santé, est posté à Melle, à une quinzaine de kilomètres de la manifestation, mais est en liaison avec des observateurs sur place, à Sainte-Soline. Il demande au SAMU l'évacuation immédiate d'un manifestant blessé.

"On n’a pas l’autorisation d’envoyer des secours sur place"

Selon Le Monde, ce médecin a déjà appelé les secours, "d’abord pour réclamer un hélicoptère, ensuite parce que les observateurs de la LDH lui ont dit que les secours n’arrivaient pas."

À​​​​​​​ 14h50, il rappelle les pompiers, puis est mis en liaison avec un opérateur du Samu. "On a eu un médecin sur place et on lui a expliqué la situation, c’est qu’on n’enverra pas d’hélico ou de Smur sur place, parce qu’on a ordre de ne pas en envoyer par les forces de l’ordre", lui affirme l'opérateur.

"Alors moi je suis avec des observateurs de la Ligue des droits de l’homme qui disent que leurs observateurs sur place disent que c’est calme depuis trente minutes et qu’il est possible d’intervenir", répond le médecin.

"Je suis d’accord avec vous, vous n’êtes pas le premier à nous le dire. Le problème, c’est que c’est à l’appréciation des forces de l’ordre dès qu’on est sous un commandement, qui n’est pas nous", explique le Samu.

L'échange se poursuit, et interrogé par l'avocate de la LDH Chloé Saynac, qui était dans la même salle que le médecin, l'opérateur du Samu explique "qu'on n’a pas l’autorisation d’envoyer des secours sur place, parce que c’est considéré comme dangereux".

"Et si vous n’y allez pas, ce ne serait pas une non-assistance à personne en danger?" demande l'avocate. "Nous devons avoir nos secours en sécurité également, malheureusement on n’a pas l’autorisation de les envoyer comme ça", répond l'opérateur.

"On n’a pas l’autorisation de toutes les institutions sur place, pour l’instant, on est sous leur commandement", martèle-t-il, avant d'indiquer que c'est le "commandement sur place" qui "interdit l'accès."

Droit de réponse de la préfète

Dans un très long communiqué, la préfète des Deux-Sèvres a apporté ce mardi soir son droit de réponse à cet article du Monde titré "Sainte-Soline: l’enregistrement qui prouve que le SAMU n’a pas eu le droit d’intervenir",

"Le principe fondamental d’intervention des secours dans un contexte hostile est de garantir au premier chef la sécurité des personnels des sapeurs-pompiers ou du Samu", rappelle Emmanuelle Dubée.

"Pour ce faire, il appartient aux forces de l’ordre, informées en temps réel de la situation, de définir si l’arrivée d’un véhicule de secours à un certain point est possible ou non de façon sûre pour lui", poursuit la préfète.

"Il n’est donc pas surprenant que, si ces conditions de sécurité n’étaient pas réunies, les forces de l’ordre aient pu, pour certaines géolocalisations et dans certaines périodes de temps, indiquer qu’un envoi d’ambulance n’était pas possible dans l’immédiat."

"Nous n'intervenons pas en zone d'exclusion"

"Ce n’est donc que pour éviter que le Samu ou les pompiers ne soient pris à partie ou victimes collatérales des affrontements violents que cette consigne a pu être passée, dans un contexte où les groupes violents se déplaçaient très rapidement", conclut la préfète, qui salue aussi "l’engagement sans faille des pompiers, du Samu et des forces de l’ordre."

"Nous n'intervenons pas en zone d'exclusion. Il n'y a pas de débat", écrit de son côté le Samu sur les réseaux sociaux.

"Nous n'avons pas été obstrués dans l'exercice de notre fonction, mais bien assurés les soins dans des circonstances particulièrement dangereuses pour nos équipes", affirmait déjà le Samu en début de semaine.

Reste que l'enregistrement publié par Le Monde a provoqué de nombreuses réactions, en particulier à gauche. "À Sainte-Soline, les secours ont été empêchés d’intervenir pour secourir un homme en urgence absolue par la police. Une vie brisée pour rien", dénonce le député insoumis David Guiraud, qui demande à Gérald Darmanin de "s'expliquer et s’il le faut, démissionner.

Ariel Guez