L’État aurait-il dû acquérir l’unique lettre de Robespierre à Danton ?

Maximilien de Robespierre (1758-1794), lettre autographe à Georges-Jacques Danton, signée «Robespierre», Paris, 15 février [1793]
Maximilien de Robespierre (1758-1794), lettre autographe à Georges-Jacques Danton, signée «Robespierre», Paris, 15 février [1793]
Maximilien de Robespierre (1758-1794), lettre autographe à Georges-Jacques Danton, signée «Robespierre», Paris, 15 février [1793]
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Une lettre de Robespierre à Danton vendue aux enchères déclenche la colère des historiens. Loris Chavanette nous en dit plus sur l'importance historique de ce document.

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Une colère gronde chez les historiens à cause d'une lettre écrite par Robespierre pour Danton en 1793 qui vient d'être adjugé aux enchères à Versailles pour 218 750 euros. Cette lettre est la seule connue signée de Robespierre adressée à Danton et témoigne de l'amitié qui liait alors les deux hommes. Ce document témoin de l'histoire de la naissance de la république devait-il partir entre les mains d'un collectionneur privé ? Une tribune publiée dans Le Monde signée par une trentaine d'historiens et d'intellectuels regrette que l'État n'ait pas exercé son droit de préemption. Marie Sorbier est allée demander à Loris Chavanette de nous en dire plus sur l'importance historique de cette lettre.

Un morceau d’histoire personnelle et collective

Robespierre écrit à Danton alors que ce dernier vient de perdre son épouse adorée Gabrielle, morte en couche en mettant au monde un enfant mort-né. Une grande tendresse se dégage des quelques lignes que Robespierre adresse à son frère d’arme et témoigne de l'amitié qui liait les deux hommes.

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Car elle engage deux figures majeures de cette période historique et précède de peu le fameux duel que se livrèrent Robespierre et Danton, la lettre est un document important de notre histoire collective.

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L'absence de débat

Si la maison de vente a respecté son devoir d’information de l’État et de ses institutions (BNF, archives, etc..) via diverses publications, l’État n’a finalement pas exercé son droit de préemption, la lettre ayant donc finalement été acquise par un collectionneur privé. Selon Loris Chavanette et les signataires d’une tribune parue dans Le Monde, le choix d’acquérir ou non ce document aurait légitimement dû être mis en débat.

“Cette tribune sert à signifier à l’État notre émotion, notre émoi devant la dispersion d’un trésor national. ” Loris Chavanette

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Le désengagement de l’État relève par ailleurs, selon Loris Chavanette, d’une absence de manifestation préalable des universitaires qui ont pourtant su se mobiliser à d’autres occasions afin que l’État se porte acquéreur de nombre de documents de l’époque. L'historien suppose que cela est dû à une sorte d’embarras face au ton fraternel et aux propos déclaratifs de la lettre.

“Les universitaires trouvaient peut-être que cette lettre était à charge contre Robespierre qui dit “je t’aime” à Danton, alors que quelques semaines après seulement il va l’envoyer à l’échafaud.”  Loris Chavanette

Appel au citoyen vertueux

Afin que ne soit pas totalement relégué hors de l’espace public ce morceau d’histoire, Loris Chavanette interpelle l’acquéreur :

“Si le citoyen collectionneur privé qu’il est est un citoyen vertueux, il aura le sens l’intérêt public. Non content d’observer sous vitre dans son armoire l’unique lettre de Robespierre à Danton, il sera ravi que des enfants puissent la voir sous vitre dans un musée, afin que les professeurs fassent leur travail d’enseignement de notre histoire.“  Loris Chavanette

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