Iran L'Alsacienne Cécile Kohler est prisonnière depuis un an

Originaire de Soultz, Cécile Kohler, enseignante agrégée de lettres modernes, et son compagnon, Jacques Paris, ont été arrêtés le 7 mai 2022. Depuis, l’Alsacienne, autorisée à deux sorties hebdomadaires dans la cour de la prison d’Evin, n’a pu s’entretenir avec sa famille qu’à trois reprises. Le dernier appel remonte au 17 avril.
Laurent BODIN - 07 mai 2023 à 06:25 | mis à jour le 07 mai 2023 à 18:55 - Temps de lecture :
Le portrait de Cécile Kohler est accroché sur la grille du portail de l’hôtel de ville de Soultz, sa ville natale.  Cela fait un an qu’elle est détenue arbitrairement dans une prison en Iran.   Photo L’Alsace /Darek SZUSTER
Le portrait de Cécile Kohler est accroché sur la grille du portail de l’hôtel de ville de Soultz, sa ville natale. Cela fait un an qu’elle est détenue arbitrairement dans une prison en Iran.   Photo L’Alsace /Darek SZUSTER

La vie de la famille Kohler s’est arrêtée il y a un an. À Soultz, chez les parents Pascal et Mireille comme pour Noémie, Luc et Robin, les trois autres adultes de cette fratrie de quatre enfants, le temps est suspendu. Les jours et les semaines s’écoulent au rythme des moments de désespoir, des marques de soutien et de solidarité et de ces quelques lueurs dans le noir.

« Rien de nouveau »

En un an de vie volée par le régime de Téhéran, Cécile Kohler a passé trois appels téléphoniques à ses parents depuis la prison d’Evin, dans la banlieue de Téhéran.

La dernière conversation, rendue publique ce dimanche, a eu lieu le 17 avril dernier. Comme les deux précédentes, elle a réveillé l’espoir et la douleur de la famille. Le rendez-vous n’était pas annoncé. À l’instar des précédents, le 18 décembre et 22 février, il a été bref. Quelques minutes seulement qui sont aussi une manière pour le régime de Téhéran de faire savoir que l’otage est en vie, à défaut d’être libre. « Cet appel ne nous a rien appris de nouveau. Nous en sommes toujours au même stade », résume Noémie, à la tête du comité de soutien Liberté pour Cécile créé en novembre dernier.

Paroles d’amour et mots de réconfort

Lors de cette communication, Cécile était évidemment sous surveillance. Il lui était donc impossible de raconter sa vie en détention, ses peurs et ses douleurs. Dans ce cas, ce sont des paroles d’amour et des mots de réconfort, sur le moment pouvant paraître vains, qui sont échangés. Cécile s’inquiète pour la famille, demande des nouvelles des uns et des autres, raconte le minimum de sa vie suspendue derrière les barreaux. Cécile Kohler comme ses parents savent que la conversation est écoutée par les autorités iraniennes. L’exigence d’en dire le moins possible pour ne surtout pas faire de faux pas ajoute encore à la douleur partagée. La réponse à la question essentielle - « Pourquoi Cécile et son compagnon ont-ils été arrêtés par les policiers iraniens ? »- ne viendra jamais. Personne n’en sait rien, si ce n’est que Cécile et Jacques sont de simples pions dans la politique des otages étrangers qui guide la politique étrangère de l’Iran depuis des décennies.

Voyage touristique

Ce 7 mai 2022, Cécile, enseignante de 37 ans agrégée de lettres modernes, est interpellée, avec son compagnon Jacques Paris, alors que tous deux achèvent un voyage touristique en Iran. Les autorités du pays les accusent d’espionnage parce qu’ils ont été en contact avec des syndicalistes du pays. Rien de bien étonnant, en réalité, alors que Jacques Paris est le responsable de Force Ouvrière éducation, chargé du secteur international. Il est aussi le mentor de Cécile, pressentie pour lui succéder. Cécile Kohler est, certes, responsable syndicale. Un engagement qui colle bien à son caractère et sa propre éducation, où la solidarité et l’engagement pour les autres ne sont pas des vains mots. Ses collègues du lycée Les Pierres Vives de Carrières-sur-Seine (Yvelines) et tous ceux qui l’ont croisée en témoignent. Ces accusations d’espionnage sont le prétexte traditionnel des régimes dictatoriaux pour priver de liberté leurs ressortissants, comme les étrangers.

Monnaie d’échange, au cas où…

Depuis un an, Cécile Kohler, ainsi que son compagnon et cinq autres ressortissants français, sont des « otages d’État », selon l’expression du ministère français des Affaires étrangères. Lequel ne ménage pas ses efforts mais n’a pas de moyens de pression sur le régime de Téhéran, confronté à une « révolution du voile » moins médiatique mais toujours aussi vivace. Cécile et Jacques sont accusés d’espionnage par les autorités, mais la justice iranienne ne les a pas informés de chefs d’accusation. Officiellement, ils ne sont pas poursuivis par la justice.

En France, un mouvement de soutien s’organise. La photo de Cécile s’affiche à Soultz, sur le bâtiment de la Collectivité européenne d’Alsace à Strasbourg et Colmar. L’affichage sur la façade des bâtiments de la Région, prévue mi-avril, a été reporté deux jours avant la date prévue. Les choses semblaient bouger en Iran. Il n’en a rien été, si ce n’est un appel téléphonique. L’injustice dure désormais depuis un an pour Cécile Kohler et son compagnon. Beaucoup plus longtemps pour les cinq autres Français, dont la chercheuse Fariba Adelkhah , formée à Strasbourg, libérée de prison mais toujours retenue dans le pays.

Le rassemblement sur le parvis du Trocadéro pour les Français retenus en Iran reconnu otage d’état en Iran le 28 janvier 2023.  Photo L’Alsace /Vincent VOEGTLIN

Des évènements de soutien de Paris à Bergerac

« Le 7 mai prochain marquera le triste anniversaire de l’arrestation de Cécile Kohler et de son conjoint, Jacques Paris, lors d’un séjour touristique en Iran. Après un an de détention, nous n’avons toujours aucune information sur leur dossier, ni sur un éventuel procès. Leur détention est totalement arbitraire et sans fondement », écrit le comité de soutien dans un communiqué. « Nous demandons au gouvernement iranien le respect sans conditions des droits fondamentaux et la libération immédiate de Cécile Kohler et Jacques Paris. »

Le comité de soutien prépare plusieurs évènements de soutien au mois de mai à l’occasion de ce triste anniversaire : le dimanche 7 mai , rassemblement de soutien place Gabriel-Péri, à Nanterre ; le mercredi 10 mai , conférence de presse organisée par Mme le Bâtonnier de Bergerac-Sarlat, en présence notamment d’Ingrid Betancourt à 14 h 30, à Bergerac ; le dimanche 14 mai, rassemblement de soutien à Cécile Kohler et Jacques Paris au Champ-de-Mars, à Paris.

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