Grève féministe à Genève«Nous ne voulons pas de dieu, nous ne voulons pas de maître»
Mercredi, une pléthore d’actions a été organisée durant toute la journée. Cours de Pilates, brunchs, lecture de l’appel à la grève, chants pour la liberté et de résistance…
Il est plus de 16 h sur la plaine de Plainpalais. Des femmes, surtout, mais aussi des hommes bravent le soleil, face à une scène où des oratrices invitent à chanter «Bella Ciao», la chanson traditionnelle des mondines qui travaillaient dans les rizières en Italie dans les années 1900, exploitées par les patrons, devenu le chant des partisans antifascistes durant la Seconde Guerre mondiale.
«Nous avons reféminisé le texte, il est toujours celui de la liberté et de la résistance», clament les militantes, avant d’entamer les paroles face à un public violet et poings levés. Cette Grève féministe du 14 juin a démarré tôt. Le Collectif genevois de la Grève féministe a déroulé un programme d’actions pléthorique.
À 8 h, sur la place des Grottes, c’est cours de Pilates, «pour démarrer la journée de grève en douceur», commente une participante, Anne May. Puis un brunch est dressé. Arrive une classe de l’Université ouvrière de Genève. L’Afghanistan, l’Iran, l’Ukraine, le Sri Lanka ou encore le Pakistan sont représentés.
L’heure de la colère
Plus loin, Léonore raconte une anecdote, de celles qui la convainquent d’être mobilisée ce 14 juin: «Cette semaine, un homme sur un groupe a dit qu’il voulait aussi venir, pour mater des seins violets en toute solidarité. Le pire, c’est qu’il se sent légitime, car il se dit un allié…»
À 10 h 46, c’est l’heure de la colère qui correspond symboliquement au moment où les femmes commencent à toucher leur retraite quand les hommes la touchent dès 8 h. Un peu partout en Suisse, l’appel à la grève nationale est lu, en langage inclusif, comme ici sur la place des Grottes. «Nous ferons grève au travail, à la maison, dans la formation, dans la consommation et dans l’espace public», proclame l’appel.
Car, constatent les mouvements féministes, nombre de revendications sont restées lettre morte depuis le 14 juin 2019, quand une marée violette avait submergé le pays. Selon eux, la situation a même empiré pour les femmes avec le relèvement de l’âge de la retraite à 65 ans.
Des Grottes, direction la place Bel-Air, où le syndicat SIT met en lumière le travail domestique. Cinq femmes employées par de riches propriétaires font mine de nettoyer la maison. «Je me suis encore brûlée avec le fer à repasser, je n’arriverai jamais à terminer toutes les chemises de Monsieur, je suis épuisée […]. Nous voulons être régularisées!» clame l’une d’elles.
Conseillers d’État silencieux
À la pause déjeuner, sur la Treille, le Conseil d’État à majorité féminine a invité les fonctionnaires à un buffet. Près de 250 personnes écoutent la doyenne d’âge, Nathalie Fontanet, expliquer que seules les quatre conseillères d’État feront des discours, tandis que les trois hommes resteront silencieux. «C’est ensemble que nous arriverons à l’égalité», ajoute la magistrate PLR.
Geneviève Preti, présidente du Cartel intersyndical de la fonction publique, informe qu’une demande pour ouvrir de «vraies négociations» sera envoyée ce jour au Conseil d’État, avec, comme revendication principale, une baisse du temps de travail sans diminution de salaire.
En début d’après-midi, direction la place de la Navigation, d’où 80 personnes partent en cortège, s’arrêtant d’hôtel en hôtel, afin de dénoncer les conditions de travail des femmes de ménage sous-payées.
Puis nous rejoignons la plaine aride de Plainpalais, point de départ de la manifestation. Sur la scène, des femmes et des hommes chantent, a cappella, «La fille d’Amazigh»: «Nous ne voulons pas de dieu, nous ne voulons pas de maître.»
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