Des migrants à Douvres, dans le Kent, après avoir été interceptés dans la Manche, le mardi 4 octobre 2022. Crédit : Gareth Fuller/PA Wire
Des migrants à Douvres, dans le Kent, après avoir été interceptés dans la Manche, le mardi 4 octobre 2022. Crédit : Gareth Fuller/PA Wire

Les exilés de moins de 18 ans débarqués sur les côtes britanniques devront se soumettre, "d'ici à la fin de l'année", à des tests approfondis pour pouvoir faire reconnaître leur minorité. Parmi lesquels des radios et des IRM des mains, des dents de sagesse et des genoux, a fait savoir le ministre d'État à l'immigration Robert Jenrick.

La mesure sera mise en place avant la fin de l’année. À leur arrivée sur le territoire britannique, les migrants se déclarant mineurs seront désormais soumis à des tests scientifiques pour vérifier leurs dires. L'objectif, pour Robert Jenrick, ministre d’État à l’immigration : sanctionner ceux qui "abusent du système", référence à un homme de 41 ans qui, il y a quelques jours, s’est fait passer pour un mineur afin d’obtenir l’asile au Royaume-Uni. "Nous prenons la question de l'évaluation de l'âge très au sérieux", a-t-il martelé.

Au Royaume-Uni, les exilés déclarés mineurs bénéficient d’une assistance immédiate des autorités et sont hébergés dans des centres spécialisés. Les adultes demandeurs d'asile, en revanche, passent souvent des mois à attendre que leur demande d'asile soit approuvée.

Les nouveaux tests incluront des radiographies des dents de sagesse, des mains et des poignets, et des IRM des genoux et des clavicules, a précisé Robert Jenrick devant les députés de la Chambre des Communes. Ils seront effectués en plus des examens déjà existants pratiqués par les travailleurs sociaux, qui "estiment l'âge de la personne en évaluant son comportement et ses compétences linguistiques", explique le Daily Mail.

En janvier déjà, le ministre conservateur avait plaidé pour la mise en place de radios et de scanners pour la reconnaissance de minorité. Ces propositions avaient suscité l’ire du comité consultatif scientifique du gouvernement. Car en plus d'exposer les enfants à un risque de radiation, ces tests ne seraient pas des plus fiables et ne clarifieraient pas l'âge "avec précision". En 2021, la British Dental Association avait elle aussi déclaré "s'opposer vigoureusement" à l'utilisation de radiographies dentaires pour établir l'âge des demandeurs d'asile.

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De l’autre côté de la Manche, en France, ces évaluations sont basées sur des critères physiques, comme les tests osseux. Mais cette pratique est très controversée et a d'ailleurs été condamnée par le Comité de l'ONU. Lors de la validation de ce système par le Conseil constitutionnel en 2019, les associations avaient partagé leur déception. Pour elles, ces tests sont "aussi fiables qu'une boule de cristal", la marge d’erreur étant estimée entre dix-huit mois et trois ans. Ainsi, "un adolescent de 14 ans peut présenter la maturation osseuse d'un adulte", avait dit une avocate.

Des enfants traités comme des adultes

Si le gouvernement concentre ses efforts sur la reconnaissance de minorité, deux rapports du Conseil des réfugiés et du GMIAU publiés en septembre 2022 soulignent, eux, les profondes déficiences du système britannique dans l'accueil même de ces mineurs. Selon le Conseil, sur un échantillon de 141 dossiers de demandeurs d’asile considérés comme adultes - et donc non évalués par des travailleurs sociaux - étudiés en 2021, "94 % ont été jugés à tort comme adultes". Ils avaient été envoyés dans des centres d’hébergement pour adultes avant que le Conseil ne soit alerté. "Sans accès à un soutien ou à l’éducation", ajoute l'association.

Et selon des données récupérées auprès d’une soixantaine d'autorités locales, une ONG de défense des droits de l’Homme affirme qu’en 2021, sur 450 jeunes dont l’âge était contesté par le ministère de l’Intérieur, les trois quarts se sont révélés être des mineurs. 

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Au début de l'année, le Royaume-Uni a également été pointé du doigt après la révélation, par le journal The Guardian, de la disparition de dizaines de mineurs non accompagnés hébergés dans un hôtel de Brighton, dans le sud de l’Angleterre. Des sources issues des services de protection de l’enfance ont décrit au quotidien des enlèvements ayant lieu jusque devant la porte de l’hôtel de Brighton. "Les enfants sont littéralement embarqués à l'extérieur du bâtiment, ils disparaissent et ne sont pas retrouvés. Ils sont pris dans la rue par des trafiquants", a déclaré l’une d’elles. À ce jour, une cinquantaine n’ont toujours pas été retrouvés.

D’après une note interne consultée par The Guardian au mois de juin 2023, cet hôtel très controversé devrait pourtant rouvrir ses portes aux enfants exilés. "Bonne nouvelle. Nous serons opérationnels le 27 juin", indique le message.

Au total, plus de 400 enfants non accompagnés ont disparu des hôtels du pays gérés par le Home Office. Parmi eux, 154 sont toujours portés disparus, selon un récent débat parlementaire, malgré les efforts de la police pour les retrouver.

 

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