Des membres de la Garde maritime nationale tunisienne interceptent un bateau de migrants au large de Sfax. Image d'illustration. Crédit : Picture alliance
Des membres de la Garde maritime nationale tunisienne interceptent un bateau de migrants au large de Sfax. Image d'illustration. Crédit : Picture alliance

Treize corps ont été retrouvés au large de Sfax, ont annoncé jeudi les garde-côtes tunisiens. Au cours de cette opération, 25 exilés ont pu être secourus. Ce nouveau drame survient alors que la situation est toujours très délicate dans la ville pour la population subsaharienne, après des affrontements la semaine passée entre des migrants et la population locale.

Les naufrages ne faiblissent pas au large de la Tunisie. Jeudi 13 juillet, les garde-côtes tunisiens ont annoncé avoir repêché 13 corps de migrants victimes d'un naufrage au large de la ville portuaire de Sfax.

"La nuit dernière, des unités affiliées à la région maritime de Sfax (centre-est) ont contrecarré une tentative de traversée clandestine et ont secouru 25 migrants subsahariens mais 13 corps ont été récupérés", a indiqué la garde nationale dans un communiqué.

Un second naufrage a été rapporté jeudi par le compte Twitter "Je suis migrant". Ce dernier évoque un bateau de 46 personnes, dont sept enfants, qui aurait fait naufrage dans la nuit de mardi à mercredi au large de Sfax. Dans une terrible vidéo accompagnant le message, des corps d'enfants sans vie sont allongés sur le fond d'un bateau de pêche et des hommes récupèrent le corps d'un autre petit garçon.

Vague de violences à Sfax

Sfax, deuxième plus grande ville de Tunisie, est le principal point de départ cette année des candidats à l'émigration vers l'Europe, l'île italienne de Lampedusa se trouvant à moins de 150 km du littoral tunisien. La ville a été secouée la semaine passée par des affrontements entre des migrants et la population locale à la suite de la mort d'un Tunisien tué par un exilé.

Depuis, de très nombreux Subsahariens – parfois installés en Tunisie depuis des années et avec des papiers en règle – ont été chassés de leur domicile et de leur emploi. Des centaines de personnes ont été arrêtées et envoyées à la frontière avec la Libye, dans une zone désertique, créant une situation d'urgence humanitaire absolue. Certaines personnes ont également été expulsées à la frontière algérienne, à l'ouest de la Tunisie.

Selon l'ONG Human Rights Watch (HRW), au moins 100 à 150 migrants étaient toujours bloqués jeudi soir à proximité de la frontière libyenne, vers Ras Jedir, dans une zone militarisée, sans eau, sans abri ni nourriture.

InfoMigrants a pu échanger par téléphone avec ce groupe de personnes, qui compte des hommes, des femmes, dont certaines sont enceintes, mais aussi de très jeunes enfants. "Il faut venir maintenant ! Nous allons mourir. Il fait 40 degrés, et nous n’avons pas une goutte d’eau", implorait mercredi Kelvin, un Nigérian qui affirme avoir été raflé à Sfax avant d'être emmené dans cette zone frontalière.

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Selon HRW, un autre groupe de 200 migrants de pays d'Afrique subsaharienne a été abandonné à son sort près de la frontière algérienne à Tamaghza, à 600 km au sud de Tunis. Des équipes de secouristes seraient en route pour les aider.

Des migrants coincés entre deux frontières

Entre dimanche et lundi, le Croissant-Rouge tunisien a mis à l'abri 630 migrants qui, pour certains, ont passé une semaine dans la zone tampon de Ras Jedir, à la frontière libyenne. Mais l'ONG assure ne pas avoir accès au groupe dans lequel se trouve Kelvin car les personnes seraient en territoire libyen où elle n'a pas le droit de se rendre.

Un discours de plus en plus ouvertement xénophobe s'est répandu dans le pays depuis que le président tunisien, Kais Saied, qui s'est arrogé les pleins pouvoirs en juillet 2021, a pourfendu en février l'immigration clandestine.

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Il a dénoncé l'arrivée en Tunisie de "hordes de migrants" clandestins d'Afrique subsaharienne et un complot "pour changer la composition démographique" du pays. La Tunisie traverse aussi une grave crise économique et financière qui pousse aussi des centaines de Tunisiens à tenter de rejoindre l'Europe par la mer.

 

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