Notre cerveau peut entendre le silence

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Notre cerveau peut entendre le silence

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Le son du silence s'entend-il ? Ou se déduit-il ?
Le son du silence s'entend-il ? Ou se déduit-il ?
© Getty - Christoph Wagner

Entend-on le silence ou bien s'agit-il d'une déduction, que notre cerveau construit par absence d'information ? Une équipe de chercheurs vient de répondre à cette question. À l'aide d'illusions sonores, ils ont démontré que notre cerveau peut entendre le silence.

Peut-on entendre le silence ? Le débat paraît faire écho à une ancienne expérience de pensée philosophique : "Un arbre fait-il du bruit quand il tombe, si personne n'est là pour l'entendre ?". Si cette seconde question, par essence, n'a toujours pas de réponse, la première vient de trouver sa solution, grâce à une étude parue le 10 juillet dernier dans les Comptes-rendus de l'Académie nationale des sciences des États-Unis d'Amérique. "Nous montrons que les silences peuvent « se substituer » aux sons dans des illusions auditives", précisent les auteurs de l'étude " La Perception du silence".

Deux perceptions du silence possible

Deux hypothèses s'affrontent, pour déterminer de quelle façon l'être humain perçoit le silence. S'agit-il d'une expérience cognitive, c'est-à-dire que les moments de silence ne sont pas entendus, mais qu'ils sont déduits ? Le silence serait alors l'interprétation cognitive d'une absence, et n'aurait rien à voir avec système auditif. Ou bien s'agit-il d'une expérience de perception ? Le silence serait perçu par notre système auditif, ce qui signifierait que ce dernier n'est pas uniquement dédié à la perception du son.

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"Nous avons tendance à penser que notre sens de l'ouïe est sollicité par les sons. Mais le silence, quel qu'il soit, n'est pas un son, c'est l'absence de son", précise le principal auteur de l'étude, Rui Zhe Goh, diplômé en philosophie et psychologie à l'université Johns Hopkins, à Baltimore, aux États-Unis. "De façon surprenante, nos travaux suggèrent que cette absence de son est aussi quelque chose que nous pouvons entendre". À en croire l'étude menée par une équipe de philosophes et de psychologues, il semble donc que notre cerveau "entende" bel et bien le son du silence.

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Des illusions silencieuses

Pour s'en assurer, les auteurs de l'étude se sont aidés de sept illusions auditives. Ils ont adapté des expériences bien connues dans lesquelles ils ont remplacé les illusions sonores par des silences : par exemple, les chercheurs ont fait écouter plusieurs sons de silences : un silence continu et deux silences brefs. Ils ont ensuite demandé aux participants d'estimer quel son était le plus long. La durée était en réalité équivalente, mais les personnes interrogées ont estimé que le silence continu était plus long. Cette expérience, nommée One-is-more, donne des résultats identiques avec des sons plus "classiques".

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"Notre approche consistait à nous demander si notre cerveau traitait les silences de la même manière que les sons", assure Chaz Firestone, coauteur de l’étude et professeur adjoint de psychologie et de sciences du cerveau à l’université Johns Hopkins. "Si l’on peut obtenir les mêmes illusions avec les silences qu’avec les sons, cela pourrait être la preuve que nous entendons littéralement le silence".

Dans les différentes expériences, trois illusions de silences, reproduites sur 1 000 personnes, ont permis de constater que les participants à l'étude entendaient des distorsions temporelles analogues à celles des illusions sonores "classiques". Ces résultats suggèrent aux auteurs de l'étude que nous percevons ces illusions basées sur le silence de la même manière que celles basées sur le son. Cela permet d'émettre l'hypothèse que notre cerveau peut utiliser des mécanismes similaires pour traiter à la fois les sons et le silence.

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De nombreuses études montrent que le silence peut être important dans la perception des sons (la façon dont nous laissons des pauses entre les mots, par exemple) mais jusqu'à présent, il n'y avait aucune preuve expérimentale solide que le silence lui-même puisse servir de stimulus pour le cerveau. "Le silence est vraiment perçu, et non pas simplement déduit", concluent les chercheurs dans leur étude. Pour s'en assurer, ils comptent mettre en place de futures expériences, afin d'étudier les silences qui ne sont pas précédés ou suivis d'un son.

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