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Surpopulation, vétusté... La Contrôleure générale des prisons alerte encore sur les conditions de détention

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Nombre de détenus, taux d'occupation des prisons, nombre de matelas au sol.... les indicateurs du milieu carcéral sont tous à la hausse. Le ministre de la Justice rappelle que 15.000 places en prison doivent être construites.

"Les conditions de détention se dégradent dans toutes leurs dimensions, en même temps que les conditions de travail du personnel pénitentiaire." C'est le constat fait par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté qui alerte le ministère de la Justice sur la surpopulation carcérale.

Dans un avis transmis au garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, l'autorité indépendante chargée de contrôler la prise en charge des détenus relèvent qu'au 1er juin 2023, le nombre de personnes détenues était de 73.699, contre 60.562 places opérationnelles. Et ce chiffre avait progressé de 3% en un an.

La moyenne du taux d'occupation des prisons est d'ailleurs de 145%. Une situation qui oblige, notamment, à l'installation de matelas au sol dans les cellules. Il y en avait 2336 au 1er juin 2023, contre 1885 l'an dernier.

La vie en prison "gangrénée"

Au travers de ces visites mises en œuvre depuis 2022, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a pu observer que très "souvent" les personnes détenues "doivent demeurer plus de 20 heures sur 24 dans des cellules surpeuplées", dans "des bâtiments sont vétustes et insalubres faute de pouvoir être entretenus". Rats, punaise de lit, détritus sont aussi le quotidien des détenus.

Cette surpopulation carcérale entraîne des conséquences à plusieurs niveaux. "La surpopulation gangrène toute la vie de la prison", écrit Dominique Simonnot, mettant en avant "la promiscuité" qui porte "atteinte à la dignité des personnes détenues", mais aussi la non-atteinte des "objectifs de réinsertion assignés à la loi à l'administration pénitentiaire".

"Le personnel pénitentiaire et les soignants ne sont pas mieux lotis. Leur nombre est insuffisant, (...) les agents de l’administration pénitentiaire sont, au même titre que les détenus, exposés aux risques sanitaires liés à l’insalubrité des locaux et à ceux de violence induits par la surpopulation".

Favoriser les mesures alternatives à l'incarcération

Face à ce constat, Dominique Simonnot, rappelant que la Cour européenne des Droits de l'Homme a condamnée la France pour son absence dans l'arsenal législatif de recours pour dénoncer des conditions indignes, estime que cette situation ne se règlera pas que d'un point de vue pénitentiaire, avec la création de nouvelles places de prison, mais par "une véritable politique publique, dotée de moyens propres et pérennes".

"Elle doit s’accompagner d’un questionnement sur la place de l’emprisonnement dans le système pénal et d’un recours accru aux peines alternatives à l’incarcération", conclut la Contrôleure générale.

Si Éric Dupond-Moretti partage le constat sur la surpopulation carcérale, il ne s'accorde pas sur les solutions à y apporter. Dans une lettre, en réponse à l'avis adressé par l'autorité administrative indépendante, le ministre de la Justice indique que "la première solution pour lutter contre la surpopulation carcérale est de construire de nouvelles places opérationnelles de prison". 15.000 places ont été annoncées pour 2027.

Le second moyen de lutter contre cette surpopulation carcérale est, selon la Chancellerie, "de s'assurer que la détention est réservée aux situations qui l'imposent". Il s'agit également de favoriser "l'aménagement" des courtes peines ou de recourir au bracelet électronique ou aux travaux d'intérêt général. Éric Dupond-Moretti rappelle avoir fait passer aux parquets généraux une circulaire les appelant à veiller "sur la stricte nécessité de la détention provisoire en privilégiant le prononcé" d'assignation à résidence sous surveillance électronique.

https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV