Maîtresse, mère porteuse et fils illégitime aux États-Unis : cela faisait beaucoup pour un ministre chinois des Affaires étrangères
Des révélations éclairent les circonstances dans lesquelles Qin Gang a été soudainement limogé en juillet dernier. Le ministre serait le père d'un enfant qui a vraisemblablement la nationalité américaine, né grâce à la gestation pour autrui, une pratique interdite en Chine.

- Publié le 27-09-2023 à 16h53

Les circonstances qui entourent la soudaine éviction du ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, officialisée le 25 juillet dernier, sont peut-être en voie de s'éclaircir. Plusieurs médias, dont le "Wall Street Journal" et le "Financial Times", ont pu établir non seulement que Qin, 57 ans, entretenait une relation extraconjugale avec une journaliste chinoise, Fu Xiaotian, 40 ans, depuis 2010 environ, mais aussi qu'il était le père de l'enfant que celle-ci a eu l'an dernier aux États-Unis en recourant aux services d'une mère porteuse. L'un et l'autre vivaient alors à Washington – Qin y était l'ambassadeur de Chine et Fu la correspondante de la chaîne de télévision chinoise Phoenix TV.
L'affaire est triplement embarrassante pour les autorités chinoises. Il y a d'abord la dimension morale. Qin Gang était à Washington avec son épouse. Or le président chinois, Xi Jinping, dont on disait par ailleurs Qin très proche, n'a cessé de promouvoir une éthique révolutionnaire, martelant notamment que la vie familiale devait être le miroir de la vie professionnelle – irréprochables, l'une comme l'autre.
Le père d'un petit Américain ?
Il y a ensuite la gestation pour autrui. La pratique est illégale en Chine, mais de plus en plus de Chinois font ce choix depuis que le régime communiste a assoupli sa politique de contrôle strict des naissances pour autoriser les couples à avoir deux, puis maintenant trois enfants. Ils le font en Amérique pour surmonter d'éventuels problèmes de fertilité, mais aussi pour profiter du XIVe Amendement à la Constitution qui accorde la citoyenneté américaine à tout enfant qui est né sur le territoire des États-Unis.
Et c'est là enfin le troisième souci pour Pékin. Non content d'avoir commis un acte illégal au regard du droit chinois (en sollicitant une mère porteuse), son ministre des Affaires étrangères serait aussi devenu le père d'un petit Américain. Les dispositions du XIVe Amendement ne s'appliquent, certes, pas aux enfants de diplomates, mais il est possible, voire probable, que Qin Gang n'ait pas reconnu son fils. Né d'une mère célibataire qui, elle, n'est pas diplomate, le petit garçon a donc toutes les chances d'être américain.
Le dépit d'une maîtresse délaissée ?
Il est permis de penser que c'est cette dernière dimension qui a précipité la chute de Qin Gang. Difficile d'imaginer, en effet, qu'on ignorait en haut lieu une idylle qui remonte aux années où la jeune femme étudiait à Cambridge et son futur amant était le chargé d'affaires chinois à Londres. La relation s'est poursuivie au gré des affectations du diplomate, jusqu'à sa nomination comme ministre. C'est alors que Qin a voulu prendre quelque distance, ce que sa maîtresse aurait mal supporté. Elle a exprimé sa frustration dans des messages sur les réseaux sociaux suffisamment suggestifs pour qu'ils alertent le Politburo, confronté au danger d'une affaire bientôt étalée au grand jour.
Le scandale n'est pas sans rappeler le cas de Peng Shuai, qui avait défrayé la chronique en novembre 2021. C'était là aussi un dépit amoureux qui avait amené la joueuse de tennis à révéler sa longue liaison avec un ancien dignitaire du parti, Zhang Gaoli, en accusant ce dernier de viol. Les deux situations rappellent que la tradition des concubines, dans les cercles du pouvoir pékinois, n'a pas disparu avec l'Empire chinois. Et, si le lien avec sa disgrâce n'est pas encore établi de façon irréfutable, tout porte désormais à croire que c'est pour avoir lui aussi succombé que Qin Gang a été limogé. Selon plusieurs sources, l'éphémère ministre fait actuellement l'objet d'une enquête sur son "style de vie", expression codée qui fait référence, en Chine communiste, aux affaires de mœurs.