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"C'est quand même abusé": un lycée parisien interdit à ses élèves le port de la jupe et de la robe

Des lycéens devant un établissement scolaire parisien (Photo d'illustration).

Des lycéens devant un établissement scolaire parisien (Photo d'illustration). - FRED DUFOUR

Depuis la rentrée, un lycée du 18e arrondissement de Paris a considérablement durci les règles vestimentaires inscrites dans son réglement intérieur. Robes, jupes, pantalon cargos et t-shirts à motifs sont désormais proscrits au sein de l'établissement... au grand dam des élèves qui font part de "leur incompréhension" à BFMTV.com.

Deux jours après la rentrée scolaire, deux grosses poches sur les côtés de son jean ont valu à Bérangère*, élève en Terminale au sein du lycée privé Charles-de-Foucauld dans le 18e arrondissement de Paris, deux heures de colle et un renvoi pour la journée.

"À la grille à l'entrée, les surveillants m'ont dit que ma tenue n'était pas appropriée et j'ai dû rentrer chez moi... J'étais révoltée car j'avais un pantalon en jean, je ne pensais pas que ça poserait problème", témoigne Bérangère, 16 ans, interrogée par BFMTV.com.

Le règlement intérieur de l'établissement privé du XVIIIe arrondissement de Paris.
Le règlement intérieur de l'établissement privé du XVIIIe arrondissement de Paris. © BFMTV

En fin d'année dernière, le règlement intérieur de l'établissement a été durci par la direction. Ainsi le port de la jupe, de la robe, de pantalons larges ou déchirés, de crop tops, de t-shirts à motifs ou à inscription sont interdits pour les élèves depuis la rentrée de septembre.

"L'incompréhension" des élèves

"La plupart des élèves sont vraiment énervés: c'est quand même abusé de ne pas pouvoir mettre ce qu'on veut. Quand on a 16 ans, la manière dont on s'habille est hyper importante. Ça définit un peu qui on est, notre personnalité", s'indigne Bérangère, qui a dû aller se racheter une panoplie de t-shirts unis pour l'occasion.

"On est tous dans l'incompréhension", affirme aussi Martin*, élève de Terminale. "Ça n'a pas trop de sens. Le fait de pouvoir choisir nos vêtements n'empiètait pas le moins du monde sur notre travail... ça n'a rien à voir".

Par ailleurs, "les filles sont clairement plus pénalisées que les garçons dans cette histoire", tranche Bérangère. "On nous enlève encore des droits... quand on pense qu'à une certaine époque on n'avait pas le droit au pantalon, c'est quand même un peu drôle".

Martin, le jeune homme de 17 ans, raconte que cette nouvelle règlementation a déjà pu mener à des situations "lunaires". "C'est déjà arrivé que des surveillantes ou certaines professeurs femmes viennent faire des remarques aux filles sur leur tenue... alors qu'elles-mêmes sont en robe ou en jupe". À en croire les adolescents, les professeurs sont partagés sur la question: certains prennent discrètement position en leur faveur, tandis que d'autres préfèrent faire la sourde oreille.

"Leur apprendre le savoir-être" au travail?

Quant aux parents d'élèves, ils sont deux à avoir interpellé la direction du lycée sur cette question depuis début septembre. D'autres, comme le père d'un élève de seconde, tempèrent. "Rien de dramatique. Ça se tasse déjà. Ce sont des ados, c'est normal qu'ils râlent un peu mais tout le monde va s'y faire". Selon lui, ces règles ont "le mérite de leur apprendre du savoir-être pour le futur monde du travail qui les attend".

Le directeur Thierry Courrège, défend auprès de BFMTV.com sa volonté de "simplifier et d'uniformiser les règles pour tout le monde", sans pour autant imposer l'uniforme auquel il est plutôt défavorable. "Le but initial était de faciliter la gestion inter-établissement en mettant noir sur blanc les règles qui définissent une tenue décente. D'éviter que le personnel ait à juger les tenues des élèves au cas par cas chaque matin".

Le chef d'établissement n'est pour autant pas totalement fermé à l'idée de rediscuter certains points du règlement, notamment ceux qui concernent le port de la jupe ou de la robe. "Il s'agit d'un raccourci. Je n'ai absolument rien contre ces deux tenues, je trouve même ça charmant. Certains points pourront être abordés après les élections du conseil de vie de la classe, qui auront lieu dans une dizaine de jours".

L'éternel débat sur le port de l'uniforme est revenu sur le devant de la scène politique début septembre. Pour le ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, ce nest pas "une solution miracle" mais une expérimentation "mérite d'être testée". Le département des Bouches-du-Rhône s'est déjà positionné favorablement pour sa généralisation afin de gommer les inégalités, tandis que certains syndicats font pas de plus de réserve à ce sujet.

* La lycéenne a préféré témoigner sous convert d'anonymat.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV