Menu
Libération
L'histoire attendra

L’Australie vote «non» au référendum sur les droits des Aborigènes

Le référendum historique qui se tenait ce samedi 14 octobre en Australie sur les droits des Aborigènes a vu la victoire du «non», après une campagne qui a creusé les divisions raciales dans le pays continent.
par Benjamin Delille et AFP
publié le 14 octobre 2023 à 11h37

C’est un échec à tous les niveaux. Pour la reconnaissance des droits des Aborigènes d’abord, qui espéraient enfin une reconnaissance de leurs droits via une «voix» spécifique inscrite dans la Constitution. Pour le gouvernement australien d’Anthony Albanese ensuite, qui avait fait de ce référendum l’un des moments forts de son mandat. «Les Australiens ont voté contre un changement de la Constitution, a indiqué le vice-Premier ministre Richard Marles après la publication de premiers résultats signalant un échec du référendum. Nous respectons tout à fait ce résultat.» Les 17,7 millions d’Australiens devaient voter pour dire s’ils acceptent ou non de reconnaître dans la Constitution les Aborigènes comme les premiers habitants de l’île-continent.

D’abord largement majoritaire, le camp favorable au changement de la Constitution de 1901 n’a cessé de perdre du terrain ces derniers mois, en raison notamment de la campagne menée par l’opposition conservatrice, dirigée par l’ancien ministre de la Défense Peter Dutton. Le projet prévoyait de créer un conseil consultatif - surnommé «La Voix» - auprès du Parlement et du gouvernement afin d’émettre des avis sur les lois et les politiques publiques qui affectent les populations autochtones, Aborigènes et insulaires du détroit de Torres. Celles-ci représentent 984 000 personnes, soit 3,8 % de la population australienne.

Le camp conservateur, soutenu par de nombreux internautes déchaînés qui n’ont pas hésité à abreuver les réseaux sociaux de fausses informations en tout genre, estimait que cette réforme était un bricolage constitutionnel qui entraînerait des divisions au sein de la société, en créant une distinction de citoyenneté. En ligne, une avalanche de commentaires racistes accompagnait la désinformation. Sur Facebook ou dans des boucles WhatsApp, on pouvait lire pêle-mêle que «la Voix» permettrait aux «Aborigènes de prendre le contrôle du pays» ou encore que «les blancs devront payer» pour vivre en Australie.

C’est donc une déception majeure pour les partisans du «oui» qui n’ont pas réussi à colmater la brèche ouverte par ces mensonges. Pour ceux-là, la réforme aurait au contraire contribué à panser les plaies encore vives d’un passé de colonisation et de répression raciale. D’autant que la communauté autochtone, présente sur le continent depuis au moins 60 000 ans, souffre encore d’inégalités criantes aux conséquences graves : leur espérance de vie est inférieure de huit ans à la moyenne nationale, et les taux de suicide et de mortalité infantile y sont deux fois supérieurs.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique