Le principal dirigeant de l'opposition au Bangladesh et plus de 100 cadres de son parti ont été inculpés dimanche de meurtre après la mort d'un policier au cours d'une violente manifestation contre la Première ministre Sheikh Hasina, à trois mois des élections législatives.

"Au moins 164 membres du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), dont (son chef) Mirza Fakhrul Islam Alamgir, ont été accusés du meurtre" de ce membre des forces de l'ordre pendant un rassemblement samedi dans la capitale Dacca, a déclaré un responsable de la police, Salahuddin Mia.

Ils encourent jusqu'à la peine capitale s'ils sont reconnus coupables.

Au total, au moins 1.480 opposants ont été arrêtés et inculpés pour des violences depuis le 21 octobre, a fait savoir la police de Dacca.

Bangladesh: le chef et d'autres dirigeants de l'opposition inculpés de meurtre

Secrétaire général du Parti nationaliste du Bangladesh, M. Alamgir, 75 ans, a été "placé en détention pour un interrogatoire", avaient dans un premier temps annoncé les forces de l'ordre, expliquant qu'il serait interrogé sur les violences de samedi, au cours desquelles au moins 26 ambulances ont par ailleurs été incendiées ou endommagées.

La police a en outre assuré que des manifestants avaient mis le feu à un bus à l'aube dimanche, causant la mort d'une personne et de graves brûlures à une autre.

Le BNP avait appelé à une grève nationale dimanche pour protester contre les violences des forces de l'ordre.

- Sécurité renforcée -

Mirza Fakhrul Islam Alamgir dirige le BNP depuis que Khaleda Zia, la présidente de ce parti et deux fois Première ministre, a été emprisonnée après avoir été condamnée en 2018 pour corruption et que son fils s'est exilé au Royaume-Uni. Malade, celle-ci est désormais assignée à résidence.

Bangladesh: le chef et d'autres dirigeants de l'opposition inculpés de meurtre

L'opposition renaissante organise des manifestations pour faire valoir ses revendications depuis des mois.

Les rassemblements -interdits- de samedi dans la capitale à l'appel du BNP et du plus grand parti islamiste du Bangladesh, le Jamaat-e-Islami, ont été les plus importants depuis le début de l'année, ont constaté des journalistes de l'AFP, prenant une nouvelle ampleur à l'approche des législatives dans ce pays de 170 millions d'habitants.

Plus de 100.000 sympathisants des deux principaux partis d'opposition, selon la police, y ont participé pour réclamer la démission de Sheikh Hasina et laisser place à un gouvernement neutre qui serait chargé de superviser les prochaines élections.

Ces manifestations ont dégénéré en violents affrontements pendant plusieurs heures dans le centre-ville.

Dimanche, la sécurité a été renforcée à Dacca, des milliers de policiers et de gardes-frontières paramilitaires du Bangladesh patrouillant dans ses rues.

- Balles en caoutchouc, gaz lacrymogène -

Dans le district de Lalmonirhat, dans le nord du Bangladesh, un responsable des jeunes du parti au pouvoir a été tué dans des heurts avec des adversaires politiques, a affirmé dimanche la police.

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Les forces de l'ordre et les militants de l'opposition se sont par ailleurs affrontés dans la ville industrielle de Narayanganj (centre), selon la police.

Les policiers ont tiré des balles en caoutchouc et fait usage de gaz lacrymogène contre les manifestants après qu'ils eurent brûlé des pneus sur une route et tenté de vandaliser des véhicules, a raconté à l'AFP le chef de la police locale, Golan Mostofa Russell.

Plusieurs gouvernements occidentaux et des groupes de défense des droits humains ont exprimé leur inquiétude face au climat politique régnant au Bangladesh.

Dimanche, l'Union européenne a estimé "vital que soit trouvé un moyen d'aller de l'avant pour des élections pacifiques et participatives".

Les Etats-Unis ont condamné les heurts samedi et appelé au "calme et à la retenue de toutes les parties", brandissant la menace de restrictions de visas.

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Sheikh Hasina, dont le père a été le premier président du Bangladesh, est au pouvoir depuis 15 ans et a vu son pays connaître une croissance économique rapide qui lui a permis de dépasser l'Inde voisine en termes de Produit intérieur brut (PIB) par habitant. Mais son gouvernement est mis en cause pour des affaires de corruption et des violations des droits de l'homme.

Les forces de sécurité sont accusées de détenir des dizaines de milliers de militants de l'opposition et d'en tuer des centaines au cours d'exécutions extrajudiciaires.