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Première condamnation au Royaume-Uni pour l'excision d'une fillette à l'étranger

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C'est une condamnation inédite au Royaume-Uni: une Britannique de 39 ans a été reconnue coupable jeudi d'avoir remis une fillette de trois ans entre les mains d'une femme qui l'a excisée lors d'un voyage au Kenya.

Selon le jury, Amina Noor a contribué à ce que cette fillette subisse des mutilations géniales féminines (MGF) il y a 17 ans, en l'emmenant au Kenya en 2006 et en l'accompagnant dans une «clinique» où une femme pratiquait l'excision.

Elle a été libérée sous caution et connaîtra sa peine le 20 décembre.

Amina Noor est la première personne de nationalité britannique jugée coupable d'avoir aidé à faire pratiquer une excision à l'étranger, en vertu d'une loi de 2003 sur les mutilations génitales qui prévoit une peine maximale de 14 ans de prison.

Se félicitant de cette condamnation, Patricia Strobino, une représentante du parquet général, a dit espérer que ce verdict «encouragera les victimes potentielles et les survivantes de mutilations génitales féminines à se manifester», et enverra un «message clair» à tous ceux qui aident ou pratiquent l'excision, au Royaume-Uni ou à l'étranger.

La victime, de nationalité britannique, est désormais âgée de 21 ans. Elle avait dénoncé les faits auprès de sa professeure d'anglais lorsqu'elle avait seize ans.

Pour constituer son dossier - sachant qu'elle était très jeune lors des faits - il a fallu mener des investigations au Kenya, et trouver des médecins spécialistes de ces mutilations au Royaume-Uni, a relevé Patricia Strobino.

Un examen effectué en 2019 a établi que la victime avait bien subi une ablation du clitoris.

«Maudite»

De nationalité britannique depuis l'âge de seize ans, Amina Noor est née en Somalie puis est partie vivre au Kenya quand elle avait huit ans à cause de la guerre civile.

Lors de l'enquête, elle avait semblé «choquée» d'apprendre que la fillette avait subi une excision lors de leur voyage au Kenya.

Dans ses premières déclarations, elle avait dit s'être rendue dans cette «clinique» avec l'enfant et être restée à la porte pendant une intervention qu'elle pensait n'être «qu'une injection».

«Non seulement la procédure a été menée» sur la fillette, mais «la prévenue a discuté précisément le type» de mutilations génitales féminines «avant d'emmener la fillette à la clinique», a défendu la procureure Deanna Heer lors de l'audience.

Amina Noor, qui réside dans le nord-ouest de la capitale britannique, a finalement déclaré pendant son procès qu'elle avait été menacée d'être «maudite» et «désavouée» par sa communauté si elle ne prenait pas part à l'excision de la petite fille.

«C'était une pression contre laquelle je n'avais aucun moyen d'agir», a-t-elle estimé.

Avant Amina Noor, une Ougandaise résidant dans l'Est de Londres a déjà été condamnée à onze ans de prison en 2019 pour avoir elle-même excisé une fillette de trois ans.

Les mutilations génitales féminines (MGF) sont une pratique courante dans certaines régions d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Asie, qui consiste à enlever partiellement ou totalement le clitoris et les lèvres vaginales d'une jeune fille.

La procédure - souvent réalisée dans de mauvaises conditions sanitaires - peut entraîner de graves complications.

«Au sein de certaines communautés du Royaume-Uni, bien que ces délits et ces pratiques soient répandus, il est souvent très difficile d'amener les personnes à se présenter (...) car elles craignent d'être exclues» ou isolées, a souligné Patricia Strobino.

En Angleterre, les mutilations génitales féminines sont illégales depuis 1985. La loi a été étendue en 2003 aux Britanniques et aux résidents permanents qui pratiquent ces mutilations ou cherchent à les faire pratiquer à l'étranger.

Les Nations Unies estiment qu'au moins 200 millions de filles et de femmes ont déjà subi une mutilation génitale. 31 pays à travers l'Afrique, le Moyen-Orient ou l'Asie sont concernés, même si l'ampleur exacte du problème reste difficile à mesurer.

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