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Entretien

Gaza: «Dans les hôpitaux, la situation est cauchemardesque»

Alors que les combats se poursuivent à Gaza entre l’armée israélienne et le Hamas, des centaines d’étrangers de binationaux ont pu quitter le territoire palestinien pour l’Égypte par le terminal de Rafah depuis mercredi 1er novembre. Parmi eux, des travailleurs humanitaires, dont certains membres de Médecins sans frontières. Entretien avec Léo Cans, chef de mission de MSF pour la Palestine, basé à Jérusalem. 

Un Palestinien blessé dans un bombardement israélien est amené à l'hôpital de Deir al Balah, dans le sud de la bande de Gaza, le 2 novembre 2023.
Un Palestinien blessé dans un bombardement israélien est amené à l'hôpital de Deir al Balah, dans le sud de la bande de Gaza, le 2 novembre 2023. AP - Hatem Moussa
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RFI : Avez-vous pu faire sortir des membres de MSF de Gaza et comment vont-ils ?

Léo Cans : Je vous confirme que 22 personnels sont sortis par l’Égypte. Ils vont tous très bien. Ils sont tous fatigués parce qu’ils ont travaillé dans des conditions très difficiles. Et on est déjà en train de travailler à faire rentrer de nouvelles équipes afin de pouvoir les remplacer et qu’ils puissent soutenir toutes les équipes locales qui, elles, n’ont pas ce droit ou cette possibilité de partir. Ils sont environ 200.

Qu’est-ce que les équipes sortantes racontent ? Qu’est-ce qui les a le plus marquées sur ce conflit ?

Ce qu’elles racontent, c'est ce que racontent tous les Gazaouis parce qu’elles ont vécu dans les mêmes conditions de vie que le reste de la population : les bombardements incessants, dans le nord comme dans le sud, la difficulté de l’accès à la nourriture, à l’eau potable… Ce sont les besoins primaires qui ressortent. Les collègues qui restent à Gaza, eux, nous racontent les destructions, l’angoisse des nuits. Pendant la nuit, ils dorment avec toute leur famille dans la même pièce parce qu’ils ont peur des bombardements. C’est « soit on vit tous ensemble, soit on meure tous ensemble ». Il est impensable qu’il y ait une partie de la famille qui meure dans une salle qui s’écroule et pas l’autre. Ils nous racontent aussi les cris des enfants, les enfants hurlent à chaque bombe qui tombe, les fenêtres qui explosent, les murs qui tremblent. Les nuits sont très longues.

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Quelles sont les conditions de travail dans les hôpitaux ?

La journée, pour nos équipes médicales qui travaillent dans les hôpitaux, c'est cauchemardesque. Ils sont en train d’opérer des enfants sans anesthésie. J’ai reçu une vidéo d’un de nos chirurgiens qui est train de recoudre le ventre d’une enfant qui doit avoir 12 ans, sans anesthésie. Tout le monde crie autour. Ils font des opérations à même le sol. C’est dans ces conditions-là qu’ils travaillent, ils sont en train de sauver des vies comme ça. Mais ils sont dans une situation de détresse psychologique énorme parce qu’ils ne peuvent pas faire leur travail dans des conditions dignes pour les patients. Malgré tout, ils font de leur mieux et je leur rends hommage. C’est héroïque ce qu’ils sont en train de faire, mais c’est inhumain de mettre des gens dans une telle position. Totalement inhumain.

Quelles sont vos demandes aux belligérants et à la communauté internationale, en tant qu’organisation humanitaire ?

Nous appelons clairement à l’arrêt des bombardements indiscriminés. On voit arriver les victimes dans nos hôpitaux, il y a beaucoup de civils, il y a beaucoup trop d’enfants, de jeunes femmes, de personnes âgées. C’est une population qui est bombardée. (…) Je rappelle aussi que les hôpitaux sont bombardés, les ambulances sont prises pour cible. Il n’y a aucun endroit où l'on peut être en sécurité. Donc la première chose qu’on demande, c'est l’arrêt des bombardements indiscriminés, c’est inacceptable. Deuxièmement, nous demandons de laisser les frontières ouvertes. Les gens qui veulent sortir pour trouver un refuge doivent pouvoir le faire et pouvoir aussi rentrer s’ils le désirent. Laisser également l’aide rentrer, les médicaments, le matériel médical. Les camions rentrent au compte-goutte. Dix, vingt ou trente camions par jour, ce n’est pas à la hauteur des besoins. Encore une fois, on est en train de faire des opérations sans anesthésie, il n’y a rien qui peut justifier ça.

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