Aux États-unis, on change les noms d’oiseaux qui dérangent

Publicité

Aux États-unis, on change les noms d’oiseaux qui dérangent

Par
Un colibri dans un arbre au Castaways Park à Newport Beach, en Californie, 2021
Un colibri dans un arbre au Castaways Park à Newport Beach, en Californie, 2021
© Getty - Paul Bersebach/MediaNews Group/Orange County Register

Les ornithologues américains ont décidé de modifier officiellement plusieurs noms d’oiseaux communs. Jugés dérangeants, ces derniers seront renommés lorsqu’ils se trouvent rattachés à des patronymes de figures scientifiques jugées racistes, misogynes ou "excluantes".

Les amateurs américains d’ornithologie pourront désormais aligner les noms d’oiseaux sans que cela soit mal compris : la société ornithologique américaine a décidé de tout simplement faire disparaitre ceux qu’elles finissaient par juger "offensants" ou "excluants".

Il n’est pas question ici d’insultes mais de valeurs : sont visés les noms anglais accolés aux patronymes de scientifiques pour lesquels l’histoire a établi un lien avec le racisme ou l’esclavage. C’est le cas, par exemple, d’un petit oiseau chanteur des prairies trouvé dans les grandes plaines : en 2020, son nom anglais est devenu Thick-billed Longspur (soit "Bruant à gros bec"), alors que le précédent (Thick billed McCown Longspur - en français : Plectrophane de McCown) comportait une référence à John P. McCown, un naturaliste amateur devenu plus tard général de l’armée confédérée pendant la guerre civile américaine.

Publicité

Ce projet, discuté depuis de nombreuses années, doit aussi solliciter l’avis du public sur les nouvelles dénominations. A partir de 2024, il doit s’appliquer sur 70 à 80 espèces d’oiseaux recensées en Amérique du Nord, sur les territoires américains et canadiens.

Un processus scientifique "plus inclusif"

"En tant que scientifiques, nous travaillons pour éliminer les préjugés scientifiques. Mais il y a eu des préjugés historiques quant à la façon dont les oiseaux sont nommés", explique Judith Scarl, PDG d’AOS qui juge que "les conventions de dénomination développées dans les années 1800, assombries par le racisme et la misogynie, ne fonctionnent pas pour nous aujourd’hui ".

Colleen Hande, la présidente de l’association, explique aussi,  sur le site de l’AOS : "Il y a du pouvoir dans un nom, et certains noms d'oiseaux anglais ont des associations avec le passé qui continuent d'être exclusives et nuisibles aujourd'hui. Nous avons besoin d’un processus scientifique beaucoup plus inclusif et engageant qui concentre l’attention sur les caractéristiques uniques et la beauté des oiseaux eux-mêmes".

Ainsi, le nom anglais de l’oiseau, s’il ne comporte plus de patronyme accolé, pourra, dans sa forme commune, comporter une caractéristique, plus logique dans sa description, comme c’est le cas en français pour la mésange bleue, le rouge-queue ou encore la mésange huppée. Les noms scientifiques en latin, en revanche, seront toujours utilisés et resteront les mêmes, à moins d’évoluer selon les recommandations des comités de nomenclature, comme c’est le cas pour l'ensemble des espèces du vivant.

Ramener l'attention sur la protection des oiseaux

L’objectif de ce projet n’est pas seulement sociétal : il s’agit avant tout d’attirer l’attention sur la protection des oiseaux aux Etats-Unis, dont la population a considérablement baissé depuis plusieurs années : l’Amérique a en effet perdu près de 3 milliards d’oiseaux, soit 1 oiseau sur 4, depuis 1970. Se concentrer sur leur protection et leur rôle majeur dans la biodiversité est devenu une urgence pour les scientifiques de l’AOS, qui diffuse aussi  des conseils pratiques pour protéger les espèces au quotidien.

pixel