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La Cour suprême britannique juge illégal de renvoyer des demandeurs d'asile au Rwanda

La Cour suprême britannique a confirmé mercredi 15 novembre l'illégalité du projet hautement controversé du gouvernement d'expulser vers le Rwanda les demandeurs d'asile, d'où qu'ils viennent, arrivés illégalement sur le sol britannique.

Une manifestante à l'extérieur de la Cour suprême britannique à Londres, le 15 novembre 2023 demande l'abandon de la politique migratoire renvoyant des demandeurs d'asile au Rwanda.
Une manifestante à l'extérieur de la Cour suprême britannique à Londres, le 15 novembre 2023, demande l'abandon de la politique migratoire renvoyant des demandeurs d'asile au Rwanda. © Kirsty Wigglesworth / AP
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Les hauts magistrats ont ainsi rejeté l'appel du gouvernement du Premier ministre Rishi Sunak et jugé que c'est à juste titre que la cour d'appel avait conclu que le Rwanda ne pouvait être considéré comme un pays tiers sûr.

Le projet avait été rejeté par une cour d'appel britannique en juin dernier. La Cour suprême a rendu son jugement à l'unanimité.

Pour justifier leur décision, les juges s’appuient sur le bilan rwandais en matière de droits de l'homme et de traitement des demandeurs d’asile, rapporte notre correspondante à Londres, Émeline Vin. Selon eux, le Rwanda ne respecte pas ses obligations internationales, il rejette 100 % des demandes d’asile venant de Syriens, de Yéménites ou d’Afghans - qui fuient des zones de conflit.

Ils reprochent aussi au pays de renvoyer des demandeurs, voire des réfugiés dans leur pays d’origine, une pratique contraire à la Convention des Nations unies.

Ce partenariat ferait courir des risques aux demandeurs d’asile et enfreint les lois britanniques.

Cette décision est un coup dur pour le Premier ministre Rishi Sunak, qui doit faire face aux pressions de son parti conservateur et d'une partie de l'opinion publique sur la question de l'immigration, à moins d'un an des prochaines élections législatives.

Même s’il avait hérité le projet de ses prédécesseurs, Rishi Sunak en avait fait le pilier de sa promesse de faire baisser l’immigration. Le gouvernement fraîchement remanié n’a pas encore dévoilé son « plan B » ; des sources ministérielles rejettent la possibilité de quitter la Convention européenne des droits de l'Homme.

Kigali « conteste » la décision, Londres affiche vouloir poursuivre le projet

Malgré ce revers juridique, Londres a affiché sa volonté de poursuivre le projet en question. Devant les députés, Rishi Sunak a indiqué que son gouvernement travaillait déjà à un « nouveau traité » avec Kigali. « S'il apparaît clairement que nos cadres juridiques nationaux ou nos conventions internationales continuent de nous entraver, je suis prêt à modifier nos lois et à réexaminer ces relations internationales », a-t-il ajouté, alors que certains élus de sa majorité réclament un retrait de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Après l'annonce, Kigali aussi a immédiatement annoncé « contester » la décision juridique. « Nous contestons la décision selon laquelle le Rwanda n'est pas un pays tiers sûr pour les demandeurs d'asile et les réfugiés », a déclaré la porte-parole de la présidence rwandaise Yolande Makolo. « Le Rwanda n’est pas d’accord avec ce point, parce qu’aujourd’hui, sur notre territoire, il y a plus de 130 000 réfugiés, il y a des migrants venus de la Libye et qui sont repartis d’une façon régulière en Europe, au Canada ou aux États-Unis. Donc on ne voit pas sur quoi s’est basé le juge pour affirmer que les réfugiés ne seraient pas sécurisés », a expliqué le porte-parole adjoint du gouvernement de Kigali, Alain Mukuralinda.

Mais malgré la décision de la plus haute instance de justice britannique, Kigali affirme rester ouvert à d’autres partenariats. « Cet accord prend fin, mais cela ne veut pas dire que si ce qui a été démontré comme défaut est corrigé, l’accord ne peut pas être repris, que ce soit avec le gouvernement anglais ou avec un autre pays », a précisé Alain Mukuralinda au micro de notre correspondante à Kigali, Lucie Mouillaud.

L’accord initial signé en avril 2022 prévoyait le versement d’environ 160 millions d’euros par Londres au Rwanda en échange de l’accueil des demandeurs d’asile arrivés illégalement au Royaume-Uni.

Lors d'un entretien téléphonique, le Premier ministre britannique Rishi Sunak et le président rwandais Paul Kagame « ont réitéré leur ferme engagement à faire fonctionner (leur) partenariat en matière d'immigration et ont convenu de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que cette politique soit solide et légale », a indiqué Downing Street dans un communiqué.

L'enjeu porte sur les problèmes structurels du système judiciaire rwandais qui rendent le pays peu sûr pour les réfugiés. Ce qu'il faut retenir c'est le terme "refoulement." Il s'agit d'un terme technique qui signifie que les réfugiés voient leur demande d'asile rejetée et sont ensuite renvoyés dans leur pays d'origine. Ainsi, par exemple, une personne originaire d'Afghanistan qui a fui les talibans serait renvoyée dans le giron des talibans. On ne peut pas régler ce problème en signant un accord.

01:07

Steve Smith, directeur de l'association de défenses des droits humains, Care4Calais

Christina Okello

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