"Une nouvelle forme de parodie" : le carton des "deepfakes" qui font chanter et danser de faux politiques

Publicité

"Une nouvelle forme de parodie" : le carton des "deepfakes" qui font chanter et danser de faux politiques

Par
Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron et Marine Le Pen, avec l'intelligence artificielle.
Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron et Marine Le Pen, avec l'intelligence artificielle.
- TikTok

C’est une tendance que les adeptes de TikTok ont forcément vue passer ces derniers mois sur la plateforme. En plus des reprises de chansons avec des voix générées par l’intelligence artificielle, des créateurs de contenus vont désormais plus loin, et appliquent des visages sur ces chanteurs.

Sur TikTok, difficile de passer à côté de cette tendance. Emmanuel Macron en train de chanter Alouette, les rappeurs de PNL remplacés par Eric Zemmour, Marine Le Pen se déhanchant sur le morceau "Waka Waka" de Shakira. Avec les progrès de l’intelligence artificielle, ces pastilles humoristiques ont inondé les réseaux sociaux ces derniers mois. Des contenus qui cumulent plusieurs millions de vues.

Des personnalités virales sur les réseaux

Le point commun entre FrenchAICovers et Fiasco sur TikTok : ils ont posté leurs premières vidéos au début de l’été dernier. Le succès arrive vite, tant leurs contenus connaissent une grande viralité. L’un des vidéastes derrière la page Fiasco, qui souhaite rester anonyme, a découvert la puissance de l’IA grâce à des vidéos de Donald Trump et Joe Biden aux États-Unis, avec des discours manipulés et trompeurs. Il est frappé par le champ des possibles qui s'ouvre à lui grâce l’intelligence artificielle.

Publicité

Quant à Younès, derrière la page FrenchAICovers, les vidéos avec des rappeurs réalisées aux États-Unis l’ont poussé à s’investir. Développeur informatique, ce Nordiste suit avec attention le développement de l’IA. Il achète un micro, une carte graphique assez puissante pour le montage, et commence à créer "des modèles de voix" comme il dit. Ses premières réussites : des reprises avec les voix des rappeurs Booba et Rohff. Puis quelques semaines plus tard, courant août, il reproduit des clips et ajoute les visages correspondants aux voix. "C’est une nouvelle forme de parodie", confie celui qui a baigné dans la culture internet. "Il y un côté satirique." Ces vidéastes constatent rapidement que Kylian Mbappé, mais aussi Emmanuel Macron sont des personnalités qui génèrent beaucoup de vues.

Des voix faciles à reproduire

La voix des artistes et des hommes politiques est à la portée du grand public. Deux sites (payants) permettent d’accéder à une "banque de voix", Voicify.ai et Lalas.com. D’autres gratuits proposent des voix synthétisées. Ces créateurs de contenus assurent ne pas avoir de cible favorite. Ils cherchent simplement le décalage entre la voix et l'image qui promettra le succès de leur vidéo. "On a un vidéo, une musique, on regarde si elle est exploitable, et on regarde quelle est la personnalité qui va le plus matcher avec l’IA. Le fait de mettre Macron ce n’est pas un choix prédéfini", précise l’un des deux vidéastes de la page Fiasco, âgé de 25 ans. Selon lui, "cela permet de présenter la politique, un premier pas, en faisant d’autres recherches. On élargit certains mondes au grand public en faisant de l’humour."

Limiter les dérives de l'intelligence artificielle

Tous les trois ont conscience des dérives possibles des deepfakes. Ils réclament d’ailleurs un meilleur encadrement de ce type de contenus. Eux font attention à bien préciser que leurs contenus sont générés par de l’intelligence artificielle, parfois même directement sur la vidéo. "Il faut que ça se voit", assure Younès. Avec ses vidéos, il a le sentiment "d’éduquer les internautes sur le sujet des deepfakes, mais c’est sans le vouloir." Selon le développeur, "les gens comprennent que ça existe, que ce sont des choses qui sont possibles, et que cela peut rendre des vidéos très crédibles". Ces vidéos humoristiques sont une manière de sensibiliser sur les dérives possibles des technologies liées à l’IA. Elles participent "à une culture de la deepfake", estime Younès.

"Comme toute technologie, cela peut être utilisé à mauvais escient. On peut tomber facilement dans une vidéo qui veut détourner pour des fins politiques." Le jeune homme cite cette fausse vidéo du président ukrainien Volodymyr Zelensky, au tout début du conflit entre l’Ukraine et la Russie, où il appelle les Ukrainiens à rendre les armes. "Cela me fait peur car les outils que j’utilise sont régulièrement mis à jour. Si un particulier comme moi est capable d’utiliser ces outils, imaginez dans un autre cas, où une personne veut chercher à créer des fake news…"

pixel