Violences faites aux femmes: que doit faire la Belgique pour lutter efficacement contre ce fléau?

À l'occasion de la journée contre les violences faites aux femmes, Amnesty fait le bilan de ce que la Belgique a fait et doit encore faire en la matière.

Une manifestation contre les violences faites aux femmes, le 27 novembre 2022 à Bruxelles ©BelgaImage

Si la Belgique s'est dotée ces quatre dernières années d'un "arsenal juridique formidable" en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, "il faut désormais diminuer les violences en elles-mêmes", pointe auprès de Belga Dominique Deshayes, présidente de la section belge francophone d'Amnesty International. "Il faut changer les mentalités et c'est le plus dur", souligne celle qui a résumé les revendications de la plateforme Mirabal. Cette dernière appelle à descendre dans la rue dimanche pour manifester contre les violences commises à l'égard des femmes.

24 féminicides en Belgique en 2023 (et il pourrait y en avoir plus)

En quatre ans, plusieurs avancées légales ont ainsi été engrangées, relève Mme Deshayes, avec notamment la réforme du code pénal sexuel ou le vote de la loi Stop Féminicides en juin dernier. Cette législation définit officiellement la notion de féminicide, permet de collecter des données statistiques, améliore les droits et la protection des victimes et prévoit de former la police et les magistrats. "Nous avons l'arsenal mais, maintenant, il faut diminuer les violences en elles-mêmes", soulève la coordinatrice "Droits des femmes" pour la section belge francophone d'Amnesty.

Car ces violences persistent alors que cette année, 24 femmes ont été tuées en raison de leur genre, selon un décompte du blog Stop Féminicides. "C'est déjà beaucoup pour une population de 11 millions d'habitants. Et encore, ce sont uniquement (les cas) qui sont connus", souligne Mme Deshayes, le calcul étant effectué sur la base d'articles de presse. "Il existe aussi des féminicides indirects, comme lorsque la femme se suicide" en raison des violences subies, ajoute-t-elle.

Pour une sensibilisation pérenne et intersectionnelle

Pour mettre réellement un terme au fait que les femmes, en raison de leur genre, subissent davantage de violences (sexuelles, sexistes, économiques, gynécologiques, etc.), "il faut lutter contre les stéréotypes de genre", qui "font notamment qu'on pense souvent que la femme victime est coupable", avance Dominique Deshayes. "Il faut lutter contre la culture du viol", ajoute-t-elle, c'est-à-dire contre la normalisation et la justification des violences sexuelles dans la société.

Il s'agit par exemple de pointer les vêtements qu'une victime de viol portait lors de son agression. "Nous avons besoin de davantage de campagnes pérennes", poursuit également la présidente d'Amnesty International en Belgique francophone. "Cela devrait devenir une vraie cause nationale", estime-t-elle. Elle imagine ainsi des campagnes de sensibilisation à l'image de ce qui est réalisé en matière de sécurité routière, "où l'on a des panneaux sur la route indiquant 'ici, il y a eu trois morts'".

Par ailleurs, pour réellement changer les choses, l'approche doit être davantage intersectionnelle, estime Mme Deshayes. Ainsi, selon la couleur de peau, l'origine présumée, la classe, l'orientation sexuelle notamment, les discriminations subies diffèrent. En outre, celles-ci s'entremêlent, ce qui signifie que l'on ne peut améliorer la situation d'une femme noire, par exemple, en ne luttant que contre le racisme ou uniquement contre le sexisme. Les deux dimensions impactent sa vie et sont étroitement liées. Il faut être davantage attentive aux "discriminations croisées, qui sont énormes", conclut-elle.

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