Herblay : 25 ans de réclusion criminelle pour le lynchage des policiers de la PJ Cergy

Les trois hommes jugés pour le lynchage de deux policiers à Herblay en 2020 ont été condamnés vendredi soir à 25 années de réclusion criminelle. La cour d’assises du Val-d’Oise, à l’issue de deux semaines de procès, a estimé qu’ils étaient tous coupables de tentative de meurtre sur des personnes dépositaire de l’autorité publique.

Herblay, le 7 octobre 2020, dDeux policiers s’étaient fait dérober leurs armes et tirer dessus. (LP/C.L.)
Herblay, le 7 octobre 2020, dDeux policiers s’étaient fait dérober leurs armes et tirer dessus. (LP/C.L.)

    Aucun des trois accusés n’a avoué avoir tiré dix balles sur les deux policiers de la PJ au sol, qui venaient d’être roués de coups, l’un d’eux étant déjà inconscient. Aucun n’a voulu désigner celui qui, parmi eux, avait ouvert le feu avec une des armes de service dérobées. À l’issue de quinze jours de procès, la cour d’assises du Val-d’Oise a conclu ce vendredi soir, après plus de dix heures de délibéré, qu’ils étaient tous les trois coupables de tentative de meurtre sur les deux policiers de la PJ Cergy, pour des faits commis lors d’une scène unique de crime.

    La cour a ainsi condamné Stanley C., Bakary D. et Lyess S. à la même peine de 25 années de réclusion criminelle. Elle a estimé que la qualité de policiers des deux victimes était bien apparente ou connue des accusés, lesquels ont toujours assuré avoir pris les fonctionnaires pour des gitans. La cour a enfin affirmé que l’intention d’homicide était établie, ce qui avait été vigoureusement contesté par la défense.

    « Cela ne doit pas se reproduire »

    Jeudi, l’avocate générale avait requis 30 ans de réclusion assortis d’une période de sûreté des deux tiers. À noter que la cour d’assises a requalifié les faits reprochés à Lyess S. qui était accusé initialement de complicité de tentative de meurtre, pour avoir donné des instructions aux autres. La cour a par ailleurs retenu l’état de récidive des trois accusés qui avaient déjà été condamnés pour des faits de trafic de stupéfiants les années précédentes.

    À l’annonce de la décision de la cour, les deux policiers victimes de ce lynchage d’Herblay du 7 octobre 2020, dans cette zone d’activités où ils auraient pu mourir, sont bouleversés et soulagés dans la salle des pas perdus. Leurs collègues venus en nombre les assister et les soutenir durant tout le procès et particulièrement à l’heure du verdict ont vécu ce même soulagement. « Il y a une justice » confie l’un d’eux, quelques instants après le jugement. « C’est le signe que cela ne doit pas se reproduire », ajoute un autre fonctionnaire de l’antenne PJ de Cergy. « C’est une décision logique. Il y avait une scène unique et aucun n’a voulu dire qui avait tiré », prolonge un autre fonctionnaire. Un responsable du syndicat Alliance confie sa satisfaction alors que les proches des trois accusés sont eux effondrés en entendant la lourdeur des peines prononcées. Parmi ces derniers, on ne comprend pas pourquoi certains des accusés se sont tus, pourquoi ils ont respecté « le code des bandits » décrit par l’avocate générale jeudi matin, « alors qu’ils savent tous qui a fait cela », confie une jeune femme en pleurs lors d’un échange avec un policier.

    Agressés alors qu’ils venaient juste vérifier une adresse

    « Ils ont la chance d’être vivants. Mais cette chance ne résulte pas des accusés », avaient plaidé les avocats des deux policiers, parties civiles, plus tôt dans le procès, décrivant des fonctionnaires terriblement atteints. « Ils donneraient n’importe quoi pour retrouver leur vie d’avant. Les séquelles, ils vont les conserver toute leur vie. » Aujourd’hui, les frais d’hospitalisation et les frais engagés par l’État se chiffrent dans cette affaire à quelque 600 000 euros. Une somme provisoire qui devrait doubler. Dominique avait été frappé puis blessé par deux balles. Son collègue, victime d’un enfoncement du crâne lorsque sa tête a heurté le sol après des coups de pied, inconscient, avait reçu quatre balles. Tous deux avaient subi cette agression hors norme alors qu’ils venaient juste vérifier une adresse à Herblay.



    La défense avait, jeudi après-midi, dénoncé l’éventualité de mettre les trois accusés « dans le même sac ». Me Philippe-Henri Honegger avait contesté la thèse du parquet d’une scène unique de crime. « Le doute sur l’identité du tireur, il est énorme. Il est impossible de savoir. Un seul a tiré et vous allez condamner deux innocents ? À trente ans, tranquillement ? C’est ça la justice ? » a-t-il plaidé face aux jurés. « On ne peut pas condamner deux innocents pour avoir un coupable. »

    Il a évoqué l’affaire de Viry-Chatillon, similaire, pour laquelle la coaction des accusés avait été retenue. « Mais on avait alors la preuve que chacun voulait tuer », souligne-t-il alors. Pour lui, comme pour les autres avocats de la défense, l’intention de tuer les policiers ne pouvait être retenue cette fois-ci. « Le tireur a fait le choix volontaire, à dix reprises, de ne pas toucher la tête. Il évite scrupuleusement d’atteindre des zones vitales. » La cour d’assises du Val-d’Oise n’a pas été de cet avis.