Pourquoi les Rohingyas fuient le Bangladesh pour l’Indonésie ?

Les réfugiés rohingyas quittent la plage pour rejoindre leurs tentes au port de ferry de Balohan, sur l'île de Sabang, province d'Aceh, le 3 décembre 2023. ©AFP - CHAIDEER MAHYUDDIN
Les réfugiés rohingyas quittent la plage pour rejoindre leurs tentes au port de ferry de Balohan, sur l'île de Sabang, province d'Aceh, le 3 décembre 2023. ©AFP - CHAIDEER MAHYUDDIN
Les réfugiés rohingyas quittent la plage pour rejoindre leurs tentes au port de ferry de Balohan, sur l'île de Sabang, province d'Aceh, le 3 décembre 2023. ©AFP - CHAIDEER MAHYUDDIN
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Ce weekend, deux bateaux de migrants surpeuplés et en panne ont été signalés en mer d'Andaman, à l’est du golfe du Bengale : plus de 400 Rohingyas cherchaient à atteindre les côtes indonésiennes et l'archipel Aceh.

Avec
  • Eloïs Voisin Sociologue, rattachée au Centre de Recherche des Études Sociologiques et Politiques de Paris, spécialiste de la question des Rohingyas

Depuis mi-novembre, plus de 1000 membres de la minorité birmane ont tenté de fuir par la mer les camps de réfugiés du Bangladesh, où les conditions de vie déjà catastrophique ne cessent de se dégrader. Comment expliquer l’ampleur de ce nouvel exode des Rohingyas ?

Les Rohingyas victimes de "nettoyage" ethnique

Les Rohingyas, population réfugiée du Myanmar à qui la citoyenneté birmane fut retirée en 1982 pour des raisons ethniques sont, depuis les années 1990, l’objet de tensions et d’opérations de nettoyages ou d’expulsions vers le Bangladesh, l’Inde ou la Thaïlande. Si Eloïs Voisin, sociologue, rattachée au Centre de Recherche des Études Sociologiques et Politiques de Paris, affirme que certains Rohingyas sont toujours présents au Myanmar, ces derniers sont confinés dans des camps militarisés et leurs droits civils sont niés. “Depuis 2022, nous voyons de plus une augmentation des réfugiés Rohingyas, notamment des femmes et des jeunes filles, qui fuient de plus en plus le Bangladesh qui les avaient d'abord accueillis”, ajoute-t-elle.

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La position du Bangladesh

“Il y a des relations assez hostiles entre le Bangladesh et le Myanmar. Fin 2017 et début 2018, tout le monde saluait l’accueil du Bangladesh des réfugiés Rohingyas. Néanmoins, il faut avoir du recul : depuis les années 1990, on a des rapatriements forcés des Rohingyas vers le Myanmar ainsi que des restrictions extrêmement fortes, des interdictions de travailler et même des baisses des rations alimentaires”, explique Eloïs Voisin. Comme dans les années 1990, les autorités décident aujourd’hui de les diminuer pour forcer le départ des Rohingyas du Myanmar. “Il y a un racisme extrême au Myanmar à l’encontre des Rohingyas. Le génocide s’assoit là-dessus. Au Bangladesh, ils sont perçus comme des migrants parfois violents”.

Qui veut des Rohingyas ?

Par ailleurs, ni la Malaisie ni l’Indonésie ne veulent véritablement accueillir les Rohingyas. Il semble même pour Eloïs Voisin “qu’aucun pays ne le souhaite. Il n’y a pas de solution politique durable aujourd’hui, qu’elle soit régionale ou plus globale. Depuis 2021, il n’y a que 500 réfugiés qui ont été accueillis par des pays comme les États-Unis ou le Canada, sur plus de deux millions au total. Le génocide ne s’arrête pas aux frontières birmanes et cela pose question en termes d’attention internationale”, conclut la sociologue.

Cultures Monde
58 min

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