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Gouvernement

La ministre de la Santé visite un institut opposé à l'IVG et suscite la colère à gauche

Agnès Firmin-Le Bodo s'est rendu jeudi 4 janvier dans les bureaux de cet institut qui planche sur la trisomie 21. Reconnu pour son expertise en la matière, il est également très actif dans la lutte contre l'avortement et l'euthanasie. Ce déplacement fait grincer des dents dans les rangs de la gauche.

Une polémique dont la ministre de la Santé se serait sûrement bien passée. Après avoir été pointé du doigt pour avoir accepté 20.000 euros de cadeaux du laboratoire Urgo, Agnès Firmin-Le Bodo s'est faite épinglée par la gauche. En cause: sa visite ce jeudi à l'institut Jérôme Lejeune à Paris.

Cette fondation, qui planche sur la recherche sur la trisomie 21 et les déficiences intellectuelles d'origine génétique, a été fondée par le généticien Jérôme Lejeune.

L'un des objets de l'association qui a lancé cet institut est "la défense de la vie humaine de son premier instant à son terme". Elle milite régulièrement contre l'avortement.

"Un signal inquiétant du gouvernement"

Son président Jean-Marie Le Méné y voit "l'acte de tuer dans le ventre de sa mère" comme l'explique le site de l'institut. La fondation Lejeune a également lancé une mobilisation "comme un cri d'alarme" contre l'aide active à mourir. "Tout mais pas ça", exhorte la fondation.

"Mettre à l'honneur les historiques et déterminés militants anti-IVG et anti-mariage pour tous est un signal inquiétant du gouvernement. La recomposition de la droite se poursuit", s'agace le président des députés PS sur X (ex-Twitter).

Même son de cloche pour la sénatrice socialiste et ancienne ministre des Droits des femmes Laurence Rossignol.

"Petit message d’adieu de la ministre : 'je vais bientôt quitter mon poste mais les anti-IVG pourront toujours compter sur moi'.

La ministre défend "ses positions connues" sur les sujets de société

Les critiques ont vivement agacé la ministre, proche d'Édouard Philippe, et ce alors qu'un remaniement qui pourrait la faire quitter le gouvernement est dans les tuyaux.

"Cette visite s’inscrivait dans le cadre de la labellisation en centre de compétences déficiences intellectuelles rares" de l'institut Lejeune. Et d'ajouter: "mes positions sur la PMA, l'IVG dans la Constitution et la fin de vie sont connues".

Relativement discrète dans les médias, celle qui était la numéro 2 du ministère de la Santé jusqu'à la démission d'Aurélien Rousseau, assure défendre la ligne du gouvernement.

"La démocratie, c'est aussi échanger avec les personnes qui ne partagent pas vos idées"

Cette ancienne pharmacienne a été à pied d'œuvre l'été dernier pour chercher à diminuer les délais d'accès à la procréation médicale assistée ouverte depuis août 2021 aux femmes seules et aux couples de femmes. Sans grand succès jusqu'ici.

Agnès Firmin-Le Bodo est également sur le pont pour faire atterrir la loi sur la fin de vie, qui n'a de cesse d'être reportée depuis l'été. Quant à la constitutionnalisation de l'IVG, promise par Emmanuel Macron à plusieurs reprises, c'est la ministre des Solidarités Aurore Bergé qui est à la manœuvre.

"Et pour ceux que ça dérange, la démocratie, c’est aussi échanger avec les personnes qui ne partagent pas vos idées. Et en l’occurrence, j’ai eu avec les professionnels de santé de cet institut un échange sur la fin de vie", insiste encore la ministre de la Santé.

"Flatter les entreprises réactionnaires"

Ses propos n'ont cependant guère convaincu les élus de gauche.

"Il y a, avec cette visite ministérielle, une dérive du pouvoir pour flatter les entreprises réactionnaires. Défendre le droit à l’IVG, qui assure à chaque femme le droit de disposer librement de son corps, est un enjeu pour tout responsable politique", a ainsi fait savoir Michaël Delafosse, le maire PS de Montpellier.

"On est vraiment bien partis pour la constitutionnalisation de l’IVG à ce que je vois", ironise encore la députée La France insoumise Sarah Legrain.

En 2017, une pétition signée par 146 scientifiques avait accusé la Fondation Lejeune d'entraver la recherche sur l'embryon. Cet institut est reconnu d'utilité publique depuis 1996.

Marie-Pierre Bourgeois