Fuite de données sur le Darknet : comment l'argent russe caché en Suisse alimente la guerre en Ukraine

Mais un pays européen a relevé ce défi avec plus de difficulté : la Suisse. Ce pays est-il bien préparé pour traquer les milliardaires russes et appliquer les sanctions ? Pour l'ambassadeur des États-Unis en Suisse, la réponse est non. Plusieurs affaires de contournement de sanctions sont à l'origine des problèmes.

L'une d'entre elles a éclaté suite à une fuite de données sur le darknet en février 2023. Des pirates russes ont brièvement publié des milliers d'e-mails et de documents bancaires ultrasensibles. Ces données ne proviennent pas d'une banque mais d'un établissement gérant plus de 2 milliards, basé en plein cœur de Zurich. Cette société s'appelle Finaport, et c'est l'un des leaders en gestion de fortunes qui propose ses services directement en russe.

Deux journalistes allemands, récompensés par un prix Pulitzer pour leur révélation des Panama Papers en 2016, ont alors aidé à décrypter cette fuite de données. Ils ont mis au jour des transactions suspectes liées à la famille d'Alexander Ponomarenko, patron d'une entreprise publique russe, ayant bénéficié de contrats publics excessivement lucratifs.

Les enquêteurs ont découvert une stratégie sophistiquée permettant à la famille de rapatrier illégalement son argent en Europe via Finaport. Des millions de dollars ont été déposés sur les comptes de la société fin 2022, sans déclencher d'enquête sur l'origine des fonds. Plus préoccupant encore, l'entreprise russe finance directement du matériel de guerre et envoie des hommes combattre en Ukraine, sans subir de sanctions malgré des doutes persistants sur ses activités. Finaport a également aidé des Russes à contourner les sanctions européennes en leur fournissant des moyens d'obtenir une nationalité ou une domiciliation dans un pays européen.